Ils'agit d'un texte d Dans cette vidéo je vous propose un "corrigé" (si l'on peut dire) pour l'explication du texte tombé au bac 2021 en terminale générale.
Commentaire de texte Emile DURKHEIM 18581917, De la division Commentaire de texte Emile DURKHEIM 1858­1917, De la division du travail social Si l'intĂ©rĂȘt rapproche les hommes, ce n'est jamais que pour quelques instants ; il ne peut crĂ©er entre eux qu'un lien extĂ©rieur. Dans le fait de l'Ă©change, les divers agents restent en dehors les uns des autres et, l'opĂ©ration terminĂ©e, chacun se retrouve et se reprend1 tout entier. Les consciences ne sont que superficiellement en contact ; ni elles ne se pĂ©nĂštrent, ni elles n'adhĂšrent fortement les unes aux autres. Si mĂȘme on regarde au fond des choses, on verra que toute harmonie d'intĂ©rĂȘts recĂšle un conflit latent ou simplement ajournĂ©. Car, lĂ  oĂč l'intĂ©rĂȘt rĂšgne seul, comme rien ne vient rĂ©frĂ©ner les Ă©goĂŻsmes en prĂ©sence, chaque moi se trouve vis­à­vis de l'autre sur le pied de guerre et toute trĂȘve Ă  cet Ă©ternel antagonisme2 ne saurait ĂȘtre de longue durĂ©e. L'intĂ©rĂȘt est en effet ce qu'il y a de moins constant au monde. Aujourd'hui, il m'est utile de m'unir Ă  vous ; demain, la mĂȘme raison fera de moi votre ennemi. Une telle cause ne peut donc donner naissance qu'Ă  des rapprochements passagers et Ă  des associations d'un jour. » 1 Se reprend retrouve sa libertĂ© 2 Antagonisme forte contradiction 1. Quelle est l'idĂ©e gĂ©nĂ©rale du texte et quelles sont les Ă©tapes de l'argumentation ? RAPPEL DE METHODE pour rĂ©pondre Ă  cette premiĂšre question, commencez toujours par exposer et explorer en dĂ©tail la structure du texte Ex Le texte de Durkheim semble se diviser en trois parties bien distinctes... ». On prĂ©sentera alors le dĂ©tail du texte de façon suffisamment complĂšte pour que le lecteur non averti puisse comprendre le contenu et l'enchaĂźnement des analyses. A la suite de cette prĂ©sentation comprĂ©hensive, on peut aller une derniĂšre fois Ă  la ligne et rĂ©diger le dernier paragraphe sous la forme L'idĂ©e gĂ©nĂ©rale qui se dĂ©gage de ce texte semble donc, etc. » Ainsi cette rĂ©ponse » Ă  la question posĂ©e se prĂ©sente­t­elle sous une forme argumentĂ©e, l'idĂ©e principale se dĂ©duisant d'une premiĂšre Ă©tude ordonnĂ©e du texte. Rappelons Ă©galement que les questions suivantes indiquent souvent la structure du texte, en invitant Ă  expliquer les formules les plus marquantes, celles autour desquelles, souvent, s'organisent les parties. Une premiĂšre partie s'organise autour de l'affirmation du caractĂšre 1 Ă©phĂ©mĂšre pour quelques instants » ; l'opĂ©ration terminĂ©e, chacun se retrouve et se reprend » et 2 superficiel un lien extĂ©rieur »... les consciences ne sont que superficiellement en contact... » de l'Ă©change, ou plutĂŽt du lien que l'Ă©change Ă©tablit, lorsque cet Ă©change a pour mobile essentiel l'intĂ©rĂȘt. La deuxiĂšme partie s'ouvre sur si on regarde au fond des choses ». La thĂšse est toute harmonie d'intĂ©rĂȘts recĂšle un conflit latent ou simplement ajournĂ© ». Le car » introduit un argument qui justifie cette thĂšse. C'est sans doute la partie la plus difficile Ă  expliquer, car Durkheim y affirme que le rĂšgne de l'intĂ©rĂȘt est Ă©quivalent Ă  un Ă©tat de guerre, Ă©ternel antagonisme » oĂč n'alternent que les conflits et les trĂȘves de courte durĂ©e. On peut considĂ©rer comme une troisiĂšme partie ce qui commence Ă  la puisque Durkheim y Ă©tablit le lien entre cette analyse de l'intĂ©rĂȘt et le diagnostic » de la premiĂšre partie. Il insiste sur l'inconstance de l'intĂ©rĂȘt, qui prend tour Ă  tour la forme de la lutte ou de l'accord, ce qui explique elle­mĂȘme le caractĂšre passager » des rapprochements Ă©voquĂ©s au dĂ©but. 2. Pourquoi peut­on dire que dans un Ă©change les consciences ne sont que superficiellement en contact » ? On peut d'abord remarquer que le texte ne dit pas que dans un Ă©change », les consciences, etc. Cela est vrai dans un Ă©change dirigĂ© par l'intĂ©rĂȘt. Il faudrait alors rĂ©flĂ©chir sur les conditions d'un vĂ©ritable Ă©change, celui dans lequel les consciences ne sont pas superficiellement » en contact, et se demander dans quelle mesure on peut penser que le dĂ©sintĂ©ressement en est la condition nĂ©cessaire. 3. Expliquez Aujourd'hui, il m'est utile de m'unir Ă  vous ; demain, la mĂȘme raison fera de moi votre ennemi. » Il faut repĂ©rer l'importance de cette phrase dans le texte. Ce que dit Durkheim, c'est que c'est une seule et mĂȘme raison qui produit l'affrontement et la trĂȘve. Il n'y a donc ni rĂ©el dĂ©sir d'affrontement, ni rĂ©el dĂ©sir de paix. 4. Le lien social ne peut­il reposer que sur l'intĂ©rĂȘt ? Introduction A la lecture de ce texte, il semble qu'on pourrait considĂ©rer que si le lien social reposait sur le seul intĂ©rĂȘt, il serait superficiel, et consisterait essentiellement en un jeu complexe d'antagonismes. Alain parlait ainsi de la solitude des ĂȘtres que la sociĂ©tĂ© accomplit » Libres Propos, 1927. Serait­il Ă©phĂ©mĂšre » ? Pas nĂ©cessairement. La trĂȘve utile se transmet sans cesse de personne Ă  personne, et on peut penser un Ă©quilibre perpĂ©tuel des antagonismes, qui ne rendrait pas les crises surprenantes, mais n'impliquerait pas l'Ă©tat de guerre permanent entre tous. En revanche ce lien serait superficiel. On peut alors s'interroger sur ce qui rend le lien social plus essentiel », comme d'ailleurs sur ce qu'on entend par lien social ». Essai de rĂ©daction 1. Quelle est l'idĂ©e gĂ©nĂ©rale du texte et quelles sont les Ă©tapes de l'argumentation ? Le texte de Durkheim semble s'organiser en trois parties nettement dĂ©limitĂ©es. Dans la premiĂšre ll. 1 Ă  7, Durkheim analyse le lien créé par un Ă©change qui n'obĂ©irait qu'Ă  l'intĂ©rĂȘt. Il relĂšve le caractĂšre Ă©phĂ©mĂšre et superficiel de ce lien Ă©phĂ©mĂšre, car ce n'est jamais que pour quelques instants » et que l'opĂ©ration terminĂ©e, chacun se retrouve et se reprend tout entier ». Superficiel, parce que les divers agents restent en dehors les uns des autres ». L'Ă©change ne crĂ©e alors qu'un lien extĂ©rieur », dans lequel les consciences ne sont que superficiellement en contact ». La fin de cette premiĂšre partie ajoute l'idĂ©e de fragilitĂ© d'un tel lien car les consciences ni ... ne se pĂ©nĂštrent, ni ... n'adhĂšrent fortement les unes aux autres ». FugacitĂ©, superficialitĂ© et fragilitĂ© seraient donc les trois caractĂšres du lien entre les hommes que l'Ă©change guidĂ© par l'intĂ©rĂȘt peut Ă©tablir entre les hommes. La seconde partie se prĂ©sente comme plus fondamentale si on regarde au fond des choses ». C'est une analyse de l'harmonie d'intĂ©rĂȘts » ou d'un monde oĂč l'intĂ©rĂȘt rĂšgnerait seul. L'idĂ©e semble ĂȘtre que le rĂšgne du seul intĂ©rĂȘt est le rĂšgne de l'antagonisme ». Durkheim appelle ainsi un Ă©tat de guerre » qui ne prend pas nĂ©cessairement la forme de l'affrontement, mais constitue la nĂ©gation de la paix ou de la concorde. Dans un Ă©tat de guerre, on s'affronte ou on mĂ©nage des trĂȘves, mais la trĂȘve mĂȘme continue la logique de guerre et d'affrontement. La troisiĂšme partie revient sur le diagnostic initial en l'Ă©clairant par cette analyse de l'intĂ©rĂȘt. C'est parce que la recherche de l'intĂ©rĂȘt peut revĂȘtir indiffĂ©remment la forme de la trĂȘve ou de l'affrontement que les rapprochements » qu'il suscite sont Ă©phĂ©mĂšres. Durkheim a insistĂ© sur le fait que la forme la plus frĂ©quente de la poursuite des intĂ©rĂȘts Ă©tait prĂ©cisĂ©ment l'affrontement. Ce sera donc celle qui l'emportera le plus souvent. L'idĂ©e gĂ©nĂ©rale du texte consiste donc Ă  affirmer que lorsque l'intĂ©rĂȘt tisse un lien entre les hommes, ce lien est par nature Ă©phĂ©mĂšre, superficiel et fragile, l'essentiel en chacun Ă©tant de continuer Ă  poursuivre son intĂ©rĂȘt propre, intĂ©rĂȘt qui se dĂ©finit fondamentalement contre la poursuite de son intĂ©rĂȘt par chacun des autres. Autrement dit, le rĂšgne de l'intĂ©rĂȘt, s'il ne se traduit pas par un affrontement permanent, constitue nĂ©anmoins un Ă©tat de guerre permanent, ou un Ă©ternel antagonisme » qui ne laisse espĂ©rer que de fragiles pĂ©riodes d'accalmie. 2. Pourquoi peut­on dire que dans un Ă©change les consciences ne sont que superficiellement en contact » ? On peut d'abord remarquer que le texte ne dit pas que dans un Ă©change », les consciences ne sont que superficiellement en contact. Cela n'est vrai que de l'Ă©change dirigĂ© par l'intĂ©rĂȘt. Dans un tel Ă©change, l'autre n'a de valeur pour moi qu'Ă  raison de l'intĂ©rĂȘt que j'espĂšre trouver dans la transaction. Je ne m'intĂ©resse en lui qu'Ă  ce qu'il a d'utile pour moi. Rien ne m'interdit de lui prĂȘter attention par ailleurs, mais ce sera alors indĂ©pendamment de l'intĂ©rĂȘt que je trouve Ă  l'Ă©change. Encore le sens du mot Ă©change » semble­t­il rĂ©duit ici. Dans un dialogue, il peut y avoir une part d'intĂ©rĂȘt, et un danger de passer Ă  cĂŽtĂ© » de l'autre, mais il peut y avoir aussi un contact » plus profond des consciences, et cela peut mĂȘme ĂȘtre le but de l'Ă©change. On peut mĂȘme dire qu'il n'y a vĂ©ritablement Ă©change », en un sens, que si les consciences cessent d'ĂȘtre en contact superficiel ». Echange ne signifierait plus alors transaction », comme c'est peut­ĂȘtre le cas dans le texte. Il faudrait alors rĂ©flĂ©chir sur les conditions d'un vĂ©ritable Ă©change, celui dans lequel les consciences ne sont pas superficiellement » en contact, et se demander dans quelle mesure on peut penser que le dĂ©sintĂ©ressement en est la condition nĂ©cessaire. 3. Expliquez Aujourd'hui, il m'est utile de m'unir Ă  vous ; demain, la mĂȘme raison fera de moi votre ennemi. » Cette phrase prend place vers la fin du texte. L'important semble ĂȘtre l'expression la mĂȘme raison ». ce qui est important c'est que trĂȘves et affrontements ont une cause unique, et que cette cause unique la poursuite de l'intĂ©rĂȘt engendre plutĂŽt l'affrontement que la trĂȘve. La politique, disait Clausewitz, c'est la continuation de la guerre par d'autres moyens. Il n'y a donc ni rĂ©el dĂ©sir d'affrontement, ni rĂ©el dĂ©sir de paix, mais la guerre l'emportera toujours, ou plutĂŽt nous serons toujours dans une logique de guerre, oĂč les alliances n'ont pas mĂȘme la parole donnĂ©e pour garantie. On ne peut dĂ©noncer un retournement d'alliance si on a conscience d'avoir conclu cette alliance par intĂ©rĂȘt. Si l'intĂ©rĂȘt change, je ne suis plus tenu Ă  rien, et l'autre non plus envers moi. Au fond c'est un monde dans lequel personne n'est tenu Ă  rien envers personne, et dans lequel personne n'a de valeur pour personne en tant que tel, mais uniquement au regard de l'intĂ©rĂȘt que l'autre trouve Ă  me respecter.

Durkheim(1960 [1893], p. 146) Ă©crit dans De la division du travail social : « L’individualisme, la libre pensĂ©e ne datent ni de nos jours, ni de 1789, ni de la rĂ©forme, ni de la scolastique, ni de la chute du polythĂ©isme grĂ©co-romain ou des thĂ©ocraties orientales. C’est un phĂ©nomĂšne qui ne commence nulle part, mais qui se dĂ©veloppe, sans s’arrĂȘter tout au long de l’histoire. »

Mais si les sociĂ©tĂ©s supĂ©rieures ne reposent pas sur un contrat fondamen- tal qui porte sur les principes gĂ©nĂ©raux de la vie politique, elles auraient ou tendraient Ă  avoir pour base unique, [...] le vaste systĂšme de contrats particuliers qui lient entre eux les individus. Ceux-ci ne dĂ©pendraient du 5 groupe que dans la mesure oĂč ils dĂ©pendraient les uns des autres, et ils ne dĂ©pendraient les uns des autres que dans la mesure marquĂ©e par les conventions privĂ©es et librement conclues. La solidaritĂ© sociale ne serait donc autre chose que l'accord spontanĂ© des intĂ©rĂȘts individuels, accord dont les contrats sont l'expression naturelle. Le type des relations sociales serait la relation Ă©conomique, 10 dĂ©barrassĂ©e de toute rĂ©glementation et telle qu'elle rĂ©sulte de l'initiative entiĂšrement libre des parties. En un mot, la sociĂ©tĂ© ne serait que la mise en rapport d'individus Ă©changeant les produits de leur travail, et sans qu'aucune action proprement sociale vienne rĂ©gler cet Ă©change. Est-ce bien le caractĂšre des sociĂ©tĂ©s dont l'unitĂ© est produite par la division du travail ? S'il en Ă©tait ainsi, on pourrait avec raison douter de leur stabilitĂ©. Car si l'in-tĂ©rĂȘt rapproche les hommes, ce n'est jamais que pour quelques instants ; il ne peut crĂ©er entre eux qu'un lien extĂ©rieur. Dans le fait de l'Ă©change, les divers agents res-tent en dehors les uns des autres, et l'opĂ©ration terminĂ©e, chacun se retrouve et se reprend tout entier. Émile DURKHEIM, De la division du travail social, 1893. Coll. Quadrige », PUF, 1996, pp. 180-181.

Dela division du travail social. Emile Durkheim - Collection Quadrige - Grands textes (0 avis La fonction de la division du travail Méthode pour déterminer cette fonction; Solidarité mécanique ou par similitudes ; La solidarité due à la division du travail ou organique; Autre preuve de ce qui précÚde; Prépondérance progressive de la solidarité organique et ses

Emile Durkheim E-book € bestellen bij andere boekwinkels De la division du travail social a Ă©tĂ© Ă©crit en 1893 par Émile Durkheim 1858–1917, sociologue français, considĂ©rĂ© comme le pĂšre fondateur de la sociologie française. Cet ouvrage sociologique et mĂȘme philosophique, issu de son travail de thĂšse, est encore aujourd’hui une rĂ©fĂ©rence dans le champ de la sociologie. L'apport de Durkheim Ă  la sociologie est fondamental, puisque sa mĂ©thode, ses principes et ses Ă©tudes exemplaires, comme celle sur le suicide ou la religion, constituent toujours les bases de la sociologie moderne. Toutefois, l'apport de son Ɠuvre va bien au-delĂ  de cette discipline et touche presque toutes les disciplines dans les sciences humaines, dont l'anthropologie, la philosophie, l'Ă©conomie, la linguistique, et l'histoire. S'il ne fut pas le premier sociologue en France, il fut le premier Ă  s'engager pour faire de la sociologie une discipline autonome, se distinguant des autres sciences sociales concurrentes, comme la psychologie et la philosophie. Il a fondĂ© le premier dĂ©partement de sociologie Ă  l'UniversitĂ© de Bordeaux, dans les annĂ©es 1890. Il est l'auteur des cĂ©lĂšbres ouvrages de sociologie - De la division du travail social 1893, - Les RĂšgles de la mĂ©thode sociologique 1895, - Le Suicide 1897 - Les Formes Ă©lĂ©mentaires de la vie religieuse 1912. RĂ©sumĂ© De la division du travail social » Ce livre a Ă©tĂ© Ă©crit dans le but de mieux cerner la cohĂ©sion sociale dans nos sociĂ©tĂ©s modernes en cette pĂ©riode d’industrialisation et d’urbanisation. Durkheim constate, fin XIXe siĂšcle, que les individus sont de plus en plus diffĂ©renciĂ©s, que les consciences individuelles s’autonomisent de façon croissante. Comment, dans ce contexte de montĂ©e de l’individualisme, la cohĂ©sion sociale peut-elle ĂȘtre prĂ©servĂ©e ? Comment expliquer ces mutations ? À quoi aboutissent-elles ? Qu’est-ce qui caractĂ©rise ce passage ? Et comment concilier l’autonomie de l’individu et la cohĂ©sion sociale dans les sociĂ©tĂ©s modernes et contemporaines ? Dans cette thĂšse sur le lien social, Durkheim s’attache Ă  rĂ©pondre Ă  ce questionnement et, dĂšs l’introduction, il avance un dĂ©but d’explication pendant que les individus se diffĂ©rencient de plus en plus, la division du travail progresse et ce, dans toutes les sphĂšres de la vie sociale Ă©conomie, administration, justice, science, etc.
. Bonne lecture. Details Auteur Emile Durkheim ISBN 1230002577555 Taal Franstalig Uitgever Uitvoering E-book Verschijningsdatum september 2018
Dela division du travail social a Ă©tĂ© Ă©crit en 1893 par Émile Durkheim, sociologue français, considĂ©rĂ© comme le pĂšre fondateur de la sociologie française. Cet ouvrage, issu de son travail de thĂšse, est encore aujourd’hui une rĂ©fĂ©rence dans le champ de la sociologie. À l’origine de ce livre, une inquiĂ©tude – qui parcourra l’ensemble de l’Ɠuvre de Durkheim – sur la
Fiche de lecture sur le texte de Durkheim La Division Du Travail Social De la division du travail social » est une Ɠuvre sociologique et mĂȘme philosophique que Durkheim a rĂ©digĂ© dans le but de mieux saisir la mĂ©thode de formation de la sociĂ©tĂ© Ă  partir de l’union des hommes. Elle traite du lien social dans le passage des sociĂ©tĂ©s traditionnelles Ă  celles industrialisĂ©es. La division du travail se dĂ©finie comme une sĂ©paration de l’exercice des activitĂ©s de la sociĂ©tĂ© en vue d’une complĂ©mentaritĂ© et d’une dĂ©pendance rĂ©ciproque. En d’autres termes, la division du travail est l’ensemble des lois qui vise l’application distincte des tĂąches en fonction de l’éducation diffĂ©remment reçue. Cette diffĂ©rentiation doit limiter tout individualisme, tout Ă©goĂŻsme, toute indĂ©pendance pour promouvoir une interdĂ©pendance au sein d’une sociĂ©tĂ©. Pour Durkheim, la division du travail vise un arrangement entre l’autonomie de l’individu et l’adhĂ©rence sociale dans les diffĂ©rentes sociĂ©tĂ©s. C’est une sorte de corporation organisĂ©e, une institution publique dans laquelle il y a association malgrĂ© le fait que chacun travaille dans son domaine de spĂ©cialisation. Parlons de la fonction de la division du travail, elle permet de rendre les individus interdĂ©pendants et solidaires. Pour cela, l’auteur pense que la fonction de la division du travail est surtout morale et sociale. C’est dans la deuxiĂšme partie de son Ɠuvre que Durkheim se questionne sur les causes de la division du travail. Pour lui, la densitĂ© de la morale est cro... collective c’est l’ensemble des valeurs morales partagĂ©e par les individus qui forme la solidaritĂ© mĂ©canique. C’est l’ensemble des croyances et des sentiments communs , donc on constate qu’i l n’y a plus d’in dividualisme. Si un individu sort de cette conscience collective , les impĂ©ratifs sociaux sont trĂšs forts. Toute transgression implique une sanction , o n est exclu de la sociĂ©tĂ©. Elle est basĂ©e sur la famille, la religion donc sur le groupe qui absorbe l’ind ividu, la personnalitĂ© collective est la seule qui existe et les fonctions sont homogĂšnes. La transgression est un crime puni par exclusion de la partie, du clan
 elle est Ă©motive, elle ne veut pas corriger une faute mais juste pour satisfaire la conscienc e collective . Donc on remarque que l ’individu ne pense pas mais subit. Alors que l a solidaritĂ© organique concerne les sociĂ©tĂ©s constituĂ©es non pas par des segments similaire et homogĂšne mais par des organes diffĂ©rents qui ont chacun un rĂŽle spĂ©cial . Cela remet en question les repĂšres qui pousse l’individu a créé ses propres moraux et valeur s. L’activitĂ© du groupe dĂ©pend de l’activĂ©e social et non plus du clan et de la famille , c e n’est plus le lieu natal mais c’est la sociĂ©tĂ© qui dĂ©veloppe l’individua lisme. Ceci se dĂ©veloppe grĂące Ă  la division du travail spĂ©cialisĂ© , c haque individu a une activitĂ© sociale, une fonction, les liens ne sont plus consanguins mais fonctionnelles. Les fonctions sont diffĂ©rentes et l es individus ne sont plus interchangeables , on a des organes spĂ©cifiques. On a le droit coopĂ©ratif c’est -Ă -dire, le droit rend justice Ă  la victime , la sanction ne punie plus mais rend justice. Le droit se divise en fonction aussi. Ce sont les sociĂ©tĂ©s modernes. Comment passe ton de la solidari tĂ© mĂ©canique a organique ? Le clan devient village, qui devient district Ă  l’arrondissement qui forme donc la sociĂ©tĂ©. La solidaritĂ© mĂ©canique existe toujours mais elle n’est plus dominante. La communication joue un rĂŽle important. On se spĂ©cialise pour p ouvoir vivre dans des conditions nouvelles d’oĂč la division de travail. Les individus passent d’une sociĂ©tĂ© Ă  une autre, pourquoi ? Les profits Ă©conomiques sont relatifs, le bonheur aussi. Il y a d’autre s facteur s qui explique ces changements Volume de l a sociĂ©tĂ©, facteurs dĂ©mographique , la densitĂ© matĂ©rielle, rĂ©sulte de l’accroissement dĂ©mographique , les dynamiques morales, intensitĂ© de la communication . Il faut avoir un espace restreint et urbain , une densitĂ© matĂ©riell e, ainsi qu’u ne augmentation des relations, des Ă©changes et de la communication entre les individus. Cela stimule la compĂ©tition et la coopĂ©ration , et l a lutte pour la vie se dĂ©velopp e d’aprĂšs Durkheim , dont chaque individu a une place et une fonction. Cela permet la diff Ă©renciation sociale. Les individus faibles ou fort, on t des places d Ă©jĂ  prĂ©vu dans la sociĂ©tĂ©. Durkheim appelle au passage entre les deux sociĂ©tĂ©s. Dans la sociĂ©tĂ© organique, le problĂšme est qu’aprĂšs la dilution de la conscience collective qu’est ce qui va permettre Ă  des sociĂ©tĂ©s d’ĂȘtre maintenu ? Selon Durkheim, la sociĂ©tĂ© f orme et transforme l’individu, le maintien de valeur commune. La sociĂ©tĂ© fait et crĂ©e, elle socialise l’individu sans prendre en compte l’individu en tant qu’ĂȘtre rationnelle. Les sociĂ©tĂ©s modernes ne connaissent pas toute la division du travail. Pour co nclure, qu’est ce qui permet d’avoir une certaine cohĂ©sion ? Il parle de solidaritĂ© créée par les sociĂ©tĂ©s primaires vers un passage Ă  des sociĂ©tĂ©s Ă  solidaritĂ© organique. Les individus perdent leur lien originel vers une conscience diffĂ©rente. C’est un pr ocessus lent qui se construit petit Ă  petit, c’est une thĂ©orie Ă©volutionniste. La division du travail varie selon la densitĂ© des sociĂ©tĂ©s. Il y a donc des conditions communicationnel, climatique
 les facteurs externe s sont important s, mais les facteurs int ernes jouent un rĂŽle aussi trĂšs important Ă©tant la lutte pour la vie. Tout le monde trouve une place dans la sociĂ©tĂ© , c ’est vivre selon de nouvelle s condition s de vie qui nous sont faite s. Il dĂ©crit donc la crĂ©ation des sociĂ©tĂ©s Ă  travers la division du tr avail. Ce sont des types idĂ©aux donc difficilement applicable s. Mais c ela n’existe pas Ă  l’état pur , les sociĂ©tĂ©s sont libres d’innover et créé de nouvelle conscience de classe et de groupe.. »
EmileDurkheim, De la division du travail Social. Ce texte est un extrait de la division du travail. Dans ce passage, Durkheim présente les avantages de la division du travail c'est a dire de la répartition des taches au sein d'une société. Pour Durkheim cette organisation rend des services économique puisque que les hommes deviennent plus
Sujet. Expliquer le texte suivant Est moral, peut-on dire, tout ce qui est source de solidaritĂ©, tout ce qui force l’homme Ă  compter avec autrui, Ă  rĂ©gler ses mouvements sur autre chose que les impulsions de son Ă©goĂŻsme, et la moralitĂ© est d’autant plus solide que ces liens sont plus nombreux et plus forts. On voit combien il est inexact de la dĂ©finir, comme on a fait souvent, par la libertĂ© ; elle consiste bien plutĂŽt dans un Ă©tat de dĂ©pendance. Loin qu’elle serve Ă  Ă©manciper l’individu, Ă  le dĂ©gager du milieu qui l’enveloppe, elle a, au contraire, pour fonction essentielle d’en faire la partie intĂ©grante d’un tout et, par consĂ©quent, de lui enlever quelque chose de la libertĂ© de ses mouvements. On rencontre parfois, il est vrai, des Ăąmes qui ne sont pas sans noblesse et qui, pourtant, trouvent intolĂ©rable l’idĂ©e de cette dĂ©pendance. Mais c’est qu’elles n’aperçoivent pas les sources d’oĂč dĂ©coule leur propre moralitĂ©, parce que ces sources sont trop profondes. La conscience est un mauvais juge de ce qui se passe au fond de l’ĂȘtre, parce qu’elle n’y pĂ©nĂštre pas. La sociĂ©tĂ© n’est donc pas, comme on l’a cru souvent, un Ă©vĂšnement Ă©tranger Ă  la morale ou qui n’a sur elle que des rĂ©percussions secondaires ; c’en est, au contraire, la condition nĂ©cessaire. Elle n’est pas une simple juxtaposition d’individus qui apportent, en y entrant, une moralitĂ© intrinsĂšque ; mais l’homme n’est un ĂȘtre moral que parce qu’il vit en sociĂ©tĂ©, puisque la moralitĂ© consiste Ă  ĂȘtre solidaire d’un groupe et varie comme cette solidaritĂ©. Faites Ă©vanouir toute vie sociale, et la vie morale s’évanouit du mĂȘme coup, n’ayant plus d’objet oĂč se prendre. Durkheim, De la Division du travail social 1893 La connaissance de la doctrine de l’auteur n’est pas requise. Il faut et il suffit que l’explication rende compte, par la comprĂ©hension prĂ©cise du texte, du problĂšme dont il est question. CorrigĂ©. [Il s’agit d’un extrait de la conclusion de l’ouvrage de Durkheim, De la division du travail social.] On considĂšre souvent que la morale prĂ©suppose la libertĂ© comme condition d’une action qui n’est pas faite simplement pour son intĂ©rĂȘt mais qui peut, au contraire, privilĂ©gier l’intĂ©rĂȘt d’autrui. En effet, sans libertĂ© pense-t-on, l’action n’a aucune valeur d’un point de vue moral elle serait presque comme un instinct. Or, la morale n’est pas possible seule. Elle Ă©pouse donc les exigences sociales. DĂšs lors, est-elle indĂ©pendante de la sociĂ©tĂ© ou bien trouve-t-elle en cette derniĂšre sa condition ? Tel est le problĂšme dont il est question dans cet extrait de l’ouvrage de Durkheim De la division du travail social publiĂ© en 1893. Le sociologue veut montrer que c’est la sociĂ©tĂ© seule qui rend possible la morale. Il dĂ©finit la morale puis montre que la volontĂ© d’indĂ©pendance vis-Ă -vis du social dans l’acte moral est illusoire avant de prouver que la sociĂ©tĂ© est la condition nĂ©cessaire pour qu’il y ait moralitĂ©. Durkheim dĂ©finit de façon large la moralitĂ© par trois caractĂšres. En effet, ce qui est moral selon lui, c’est d’abord ce qui produit de la solidaritĂ©. Il faut comprendre par lĂ  que c’est ce qui lie les hommes les uns aux autres de telle sorte qu’ils agissent ensemble et les uns pour les autres, voire pour le tout. C’est ensuite ce qui contraint l’homme Ă  tenir compte des autres hommes. En utilisant le verbe forcer », Durkheim met l’accent sur le fait que ce qui est moral exerce une pression sur l’individu, c’est-Ă -dire qu’il n’agit pas spontanĂ©ment pour les autres. Ce n’est pas de lui que vient l’initiative en quelque sorte. On peut l’entendre aussi bien de punitions que de remontrances qui visent Ă  faire changer la conduite de l’individu dans le sens de la vie sociale. C’est enfin ce qui le conduit Ă  ne pas seulement suivre ses dĂ©sirs, c’est-Ă -dire ce qui le rattache Ă  lui-mĂȘme. Autrement dit, la morale vise, au dĂ©pend de l’égoĂŻsme, Ă  dĂ©velopper, voire Ă  crĂ©er l’altruisme pour reprendre le terme introduit par Auguste Comte dans le SystĂšme de politique positive 1851-1854. Durkheim dĂ©finit alors des degrĂ©s de moralitĂ© elle est d’autant plus importante que les liens entre les individus sont d’autant plus nombreux et qu’ils sont plus forts. Plus il y a de liens en effet et plus il y a de solidaritĂ© entre les individus. Mais des liens nombreux peuvent ĂȘtre faibles si une grande marge d’égoĂŻsme est possible entre les individus. Des liens plus forts sont ceux qui, Ă  la limite, font que l’individu agit uniquement pour les autres. Les deux combinĂ©s renforcent donc la vie sociale et l’insertion de l’individu dans le tout que constitue alors la sociĂ©tĂ©. Quelle place a alors la libertĂ© ? Durkheim justement en dĂ©duit une critique de la thĂšse qui fait de la libertĂ© la condition de la morale. En effet, cette thĂšse qu’il rapporte consiste Ă  considĂ©rer que la moralitĂ© dĂ©pend d’un acte libre du sujet, acte contingent, qui lui permet de choisir le bien et de repousser la tentation du mal. Dans cette thĂšse, la morale n’a rien Ă  voir avec la sociĂ©tĂ©. Toute la valeur morale de l’individu tient Ă  sa capacitĂ© Ă  ne pas agir sous la contrainte mais uniquement par obligation, c’est-Ă -dire Ă  choisir librement le bien. Durkheim oppose Ă  cette conception qu’elle entraĂźne bien plutĂŽt une dĂ©pendance. Qu’est-ce Ă  dire ? Durkheim nie que la moralitĂ© produise deux effets. PremiĂšrement, il nie qu’elle Ă©mancipe l’individu. Entendue sans complĂ©ment de nom, l’émancipation dĂ©signe le fait de rendre libre Ă  tous les points de vue. DeuxiĂšmement, il nie que la moralitĂ© dĂ©gage l’individu du milieu, comprenons de la sociĂ©tĂ©, auquel il appartient. Il lui oppose un tout autre rĂŽle de la moralitĂ©. Elle vise Ă  amener l’individu Ă  dĂ©pendre des autres et Ă  le faire agir en faveur d’un tout, c’est-Ă -dire Ă  se considĂ©rer comme un membre de ce tout. Elle enlĂšve bien plutĂŽt de la libertĂ© dans ses mouvements. C’est qu’en effet les obligations morales prescrivent certaines actions et en interdisent d’autres, ce qui implique bien une restriction des mouvements possibles. Toutefois, faire de la dĂ©pendance un caractĂšre de la moralitĂ©, n’est-ce pas la confondre avec les obligations sociales ou juridiques ? Que la sociĂ©tĂ© me force Ă  agir d’une certaine façon, n’est-ce pas absolument contraire Ă  la morale ? En effet, Durkheim se fait en quelque sorte une objection, celle d’ñmes nobles qui rejettent la dĂ©pendance que la sociĂ©tĂ© implique. Par Ăąmes qui ne sont pas sans noblesse », il faut entendre des sujets dont les actions montrent une certaine moralitĂ©. La noblesse se dit dans le champ de la morale d’une action qui montre une certaine hauteur de vue, une capacitĂ© Ă  dĂ©passer ses intĂ©rĂȘts particuliers. Or, ces Ăąmes nobles rejettent l’idĂ©e de cette dĂ©pendance. Comment l’entendre ? Faut-il comprendre qu’elles agissent contre cette dĂ©pendance ? Elles ne seraient pas alors morales et manqueraient donc de noblesse. Il faut donc comprendre que c’est en esprit que ces nobles Ăąmes rejettent la dĂ©pendance vis-Ă -vis de la sociĂ©tĂ©, autrement dit, elles estiment que leurs actions n’ont rien Ă  voir avec leur dĂ©pendance vis-Ă -vis de la sociĂ©tĂ©. C’est donc les motifs de leurs actions qu’elles placent hors de la sociĂ©tĂ©. Comment rejeter les motifs d’une action qui se prĂ©sentent Ă  un individu ? Il rĂ©fute l’objection en lui opposant que le point de vue de ces nobles Ăąmes provient de leur incapacitĂ© de voir d’oĂč provient leur moralitĂ©. Autrement dit, elles pensent agir indĂ©pendamment de la sociĂ©tĂ© dont elles dĂ©pendent et de sa moralitĂ©. Ce qui revient Ă  dire qu’elles s’attribuent Ă  elles-mĂȘmes leurs actions, qu’elles trouvent les motifs en elles et donc finalement, qu’elles se considĂšrent libres dans leurs actions. En disant qu’elles ne voient pas les sources profondes de leur moralitĂ©, Durkheim veut indiquer que ces nobles Ăąmes ne saisissent pas ce qui les fait agir. Autrement dit, leurs motifs ne sont pas librement choisis. Ils ont bien la racine de leurs actions dans la sociĂ©tĂ© et dans la moralitĂ© qu’elle inculque aux individus. D’oĂč provient donc cette erreur ? Le sociologue l’impute Ă  une insuffisance de la conscience. En effet, lorsqu’un individu cherche pour quoi il a agi, il se rĂ©fĂšre Ă  ce dont il est conscient. Il fait donc confiance Ă  sa conscience pour connaĂźtre ce qui, en lui, le fait agir. Il faut comprendre ici par conscience cette facultĂ© qui nous permet de nous reprĂ©senter la rĂ©alitĂ© extĂ©rieure ou la rĂ©alitĂ© intĂ©rieure, facultĂ© qui nous permet d’en examiner la reprĂ©sentation. Si Durkheim dĂ©nie Ă  la conscience la possibilitĂ© de rendre compte des motifs de l’action morale, c’est qu’il estime qu’elle ne permet pas de connaĂźtre ce qu’il y a au fond de l’ĂȘtre. Autrement dit, les nobles Ăąmes croient que leurs actions ont des motifs diffĂ©rents des motifs rĂ©els qui leur Ă©chappent. C’est donc le rejet de la conscience comme source de connaissance qui conduit Durkheim Ă  rĂ©futer le point de vue des nobles Ăąmes qui, finalement, penchent pour la libertĂ©. Si donc la morale ne provient pas de la libertĂ© et de la conscience de la libertĂ©, quelle peut en ĂȘtre la source vĂ©ritable ? Durkheim refuse une thĂšse qu’il rapporte selon laquelle la sociĂ©tĂ© et la morale seraient des rĂ©alitĂ©s Ă©trangĂšres dans la mesure oĂč la morale serait sĂ©parĂ©e de la sociĂ©tĂ© et n’aurait guĂšre de consĂ©quences sur elle. Cette thĂšse est solidaire de l’idĂ©e que la morale aurait pour source la libertĂ©. En ce sens, comme la sociĂ©tĂ© consiste en la dĂ©pendance, elle serait Ă©trangĂšre Ă  la morale. Il en dĂ©duit que, de son point de vue, la sociĂ©tĂ© seule rend possible la morale en tant que condition nĂ©cessaire » ou condition sine qua non. Comprenons qu’il faut que la sociĂ©tĂ© soit lĂ  pour qu’il y ait morale. Il faut qu’elle dĂ©veloppe chez l’individu les conduites qui l’amĂšnent Ă  ĂȘtre comme le membre de la sociĂ©tĂ© et non comme un individu attachĂ© Ă  lui-mĂȘme. Que doit ĂȘtre alors la sociĂ©tĂ© ? Il refuse de concevoir la sociĂ©tĂ© comme constituĂ©e d’individus juxtaposĂ©s qui possĂšderaient une morale qu’ils apporteraient dans la vie sociale. Il faudrait alors comprendre que la sociĂ©tĂ© se constitue Ă  partir des individus qui, grĂące Ă  la morale que chacun apporterait, conviendrait d’agir de sorte que ce serait la morale qui rendrait possible la sociĂ©tĂ©. On peut nommer cette conception de la sociĂ©tĂ© la conception atomistique de la sociĂ©tĂ©. Il conçoit donc autrement la sociĂ©tĂ©. Implicitement, il conçoit la sociĂ©tĂ© comme un tout qui existe par lui-mĂȘme. On peut nommer cette conception, la conception holiste de la sociĂ©tĂ© [le mot holisme a Ă©tĂ© inventĂ© postĂ©rieurement par Jan Smuts 1870-1950, un philosophe et un homme politique d’Afrique du sud, en 1926]. C’est en ce sens qu’il soutient au contraire que c’est en tant que membre de la sociĂ©tĂ© que l’homme peut se considĂ©rer comme un ĂȘtre moral. Comment dĂ©partager les deux conceptions ? Pour montrer que c’est bien la sociĂ©tĂ© la condition nĂ©cessaire de la morale et non l’inverse, Durkheim prĂ©cise que ce qui fait la moralitĂ©, c’est la solidaritĂ© avec un groupe. Ainsi faut-il comprendre qu’il y a autant de morales qu’il y a de groupes au double sens oĂč les rĂšgles morales peuvent varier en fonction des groupes et aussi en ce sens que les rĂšgles sont valables pour les membres du groupe. À la limite, pour qu’une morale universelle soit possible, il faudrait une sociĂ©tĂ© universelle ou tout au moins que la sociĂ©tĂ© conduise l’individu comme membre de l’humanitĂ©. En outre, Durkheim rappelle sa thĂšse de la variation de la morale du groupe en fonction de la solidaritĂ©. Il peut donc dĂ©duire de l’absence de vie sociale Ă  l’absence de toute morale faute d’objet Ă  quoi s’appliquer. Interpellant son lecteur dans son raisonnement qu’il Ă©nonce Ă  la deuxiĂšme personne, il l’invite Ă  penser le rapport entre sociĂ©tĂ© et moralitĂ© comme il le soutient, c’est-Ă -dire telle que la suppression de la premiĂšre implique la suppression de la seconde. En un mot, le problĂšme dont il est question dans cet extrait du livre de Durkheim, De la division du travail social paru en 1893 est celui de savoir si la morale est indĂ©pendante de la sociĂ©tĂ© ou bien si c’est la sociĂ©tĂ© qui la rend possible. En effet, Durkheim veut montrer que la morale n’a pas besoin de la libertĂ© et qu’elle Ă©chappe Ă  la conscience individuelle. Aussi comme elle rend l’homme solidaire, elle dĂ©coule de la sociĂ©tĂ©, condition pour que la moralitĂ© qui nous amĂšne Ă  dĂ©passer notre Ă©goĂŻsme soit possible.
Dela division du travail social (Les grands textes) de Durkheim, Emile en ISBN 10: 2130547834 - ISBN 13: 9782130547839 - Presses Universitaires de France - PUF - 2004 - Tapa blanda
De la division du travail social correspond Ă  la thĂšse princi­pale de Durkheim qui avait pour sous-titre Étude sur l’organisa-tion des sociĂ©tĂ©s supĂ©rieures. Elle fut soutenue le 3 mars 1893 Ă  la FacultĂ© des Lettres de Bordeaux. Cette thĂšse est fondamen­tale pour trois raisons. Il s’agit tout d’abord du premier livre de Durkheim dans lequel il tente de fonder la sociologie. L’ouvrage paraĂźt deux ans avant Les rĂšgles de la mĂ©thode sociologique 1894 et quatre ans avant Le Suicide 1897. Il constitue donc en quelque sorte la pierre angulaire » de cet Ă©difice nouveau qu’est la sociologie. Par cette thĂšse, dont les membres du jury admirĂšrent la qualitĂ© et la profondeur, Durkheim s’affirme aux yeux de tous comme le reprĂ©sentant français du projet sociolo­gique. De la division du travail social est donc un passage obligĂ© pour les sociologues, une introduction Ă  cette discipline. Cette thĂšse appartient Ă©galement au patrimoine conceptuel des sciences sociales. Elle est enseignĂ©e Ă  ce titre dans les facultĂ©s de sociologie du monde entier. Les recherches en sciences sociales ne cessent depuis plus d’un siĂšcle de se rĂ©fĂ©rer Ă la solidaritĂ© mĂ©canique etĂ la solidaritĂ© organique, tant ces deux concepts constituent des fondements de notre comprĂ©hen­sion du monde social. Durkheim aborde, Ă  travers les mĂ©tamor­phoses de la notion de solidaritĂ©, la question du lien social. Il offre ainsi un cadre analytique pour analyser Ă  la fois le pro­cessus de diffĂ©renciation des individus et la cohĂ©sion des sociĂ©tĂ©s modernes
 L’ambition de Durkheim Les fondements du lien social La question des formes anormales La solidaritĂ© organique aujourd’hui Les mutations du monde du travail La logique de la dĂ©marchandisation » Il vous reste Ă  lire 98 % de ce chapitre. HomePage Explication De Texte Ă©mile Durkheim De La Division Du Travail Social. Explication De Texte Ă©mile Durkheim De La Division Du Travail Social Page 27 sur 32 - Environ 311 essais Les choix stratĂ©giques effectuĂ©s par Electrolux 52718 mots | 211 pages demeure thĂ©orique, mais se veut suffisamment prĂ©cise pour rĂ©pondre Ă  la plupart des

RĂ©sumĂ© du document C'est le point de dĂ©part de la rĂ©flexion de Durkheim. Qu'est-ce qui fait que dans des sociĂ©tĂ©s modernes qui se diffĂ©rentient toujours plus ou la division du travail social est toujours grandissante, ces sociĂ©tĂ©s tiennent ensemble qu'est-ce qui fait la cohĂ©sion sociale dans des sociĂ©tĂ©s toujours plus diffĂ©rentiĂ©es, qui donnent toujours plus de place Ă  l'individu ? Cette question reste une question actuelle. Ce mouvement se poursuit dans nos sociĂ©tĂ©s modernes. Des normes collectives sont-elles encore capables de rĂ©guler les rapports entre individus, individus que tout tend en apparence Ă  sĂ©parer plutĂŽt qu'Ă  lier. C'est la prĂ©occupation de Durkheim face au devenir de la morale ». Il s'agit ici de la division du travail social et non industriel, le sous-titre Ă©tant Ă©tude sur l'organisation des sociĂ©tĂ©s supĂ©rieures occidentales modernes ». Division du travail en sociĂ©tĂ©, dans les sociĂ©tĂ©s modernes. Cette question n'est pas nouvelle. Elle prĂ©occupe depuis longtemps les Ă©conomistes, dont Adam Smith. Sommaire Analyse fonctionnelle et analyse causale Une fonction intĂ©grer le corps social Deux types solidaritĂ© mĂ©canique et solidaritĂ© organique Un symbole les formes du droit SociĂ©tĂ©s modernes et sociĂ©tĂ©s traditionnelles Un principe tout fait social doit s'expliquer par un autre fait social Trois causes volume de la sociĂ©tĂ©, densitĂ© matĂ©rielle et densitĂ© dynamique dite aussi densitĂ© morale Le double diagnostic durkheimien Division du travail, conflit social et anomie Culte de l'individu et dĂ©clin de la conscience collective quels risques ? Extraits [...] En mĂȘme temps, le savant est complĂštement animĂ© par du normatif. Il a une maniĂšre de s'inquiĂ©ter de la sociĂ©tĂ© moderne dans une forme de nostalgie pour l'harmonie perdue des sociĂ©tĂ©s primitives. Donc attention Ă  toujours relever les traces normatives derriĂšre un discours positif. On peut dire aussi que la maniĂšre dont Durkheim pense la sociĂ©tĂ© est toujours dans un cadre national. Ce qu'il appelle la sociĂ©tĂ© c'est souvent la nation une nation est d'abord nĂ©e de la volontĂ© de vivre ensemble, plus que la langue, etc.. [...] [...] Mais ce culte ruine la croyance en d'autres valeurs. Cette foi commune n'est possible que par la ruine des autres et ne pourrait donc produire l'effet de toutes les autres Ă©teintes. Et si cette croyance est commune, car partagĂ©e par la communautĂ©, elle est individuelle par son objet, car son objet est l'individu. Ce culte n'est pas Ă  la sociĂ©tĂ© qu'il nous attache c'est Ă  nous-mĂȘmes. Ce culte ne constitue pas un lien social vĂ©ritable crainte de voir le lien social se dĂ©faire sous l'impact de ce culte, il tend plutĂŽt Ă  les Ă©loigner. [...] [...] Conclusion de la division du travail social notre premier devoir, pour Durkheim, c'est de nous faire une morale. Il est nĂ©cessaire que les sociĂ©tĂ©s modernes se donnent un socle de valeurs partagĂ©es, composĂ©es des valeurs hĂ©ritĂ©es des LumiĂšres, de la RĂ©volution française, de la confiance en la science, etc. Durkheim est Ă  la fois rĂ©formiste et conservateur, savant soucieux d'ĂȘtre utile . b. Culte de l'individu et dĂ©clin de la conscience collective quels risques ? Il termine sa thĂšse avec quelques remarques s'agissant du culte de l'individu. [...] [...] Ces trois facteurs expliquent comment on passe de sociĂ©tĂ© Ă  solidaritĂ© mĂ©canique Ă  des sociĂ©tĂ©s Ă  solidaritĂ© organique. Durkheim pense la causalitĂ© Ă  sens unique. Jamais il ne pense une possible rĂ©troaction de l'effet sur la cause. Ex. le travail des femmes explique-t-il qu'on fait mois d'enfants ? Donc la division du travail affecte-t-elle la dĂ©mographie en retour. À partir de cette explication par trois causes, Durkheim va poser un diagnostic sur les formes pathologiques ou anormales de la division du travail social. [...] [...] Il va proposer des remĂšdes. III. Le double diagnostic durkheimien a. Division du travail, conflit social et anomie Ă©tat d'indĂ©termination, durable ou transitoire, quant aux normes, rĂšgles et valeurs sur lesquelles fonder la vie en sociĂ©tĂ©. Durkheim dit qu'il y a anomalie ou pathologie chaque fois que cette division du travail ne produit pas un accroissement de la solidaritĂ© social, mais son contraire, Ă  commencer par l'antagonisme du travail et du capital. À mesure que les fonctions industrielles se spĂ©cialisent, la lutte devient plus vive bien loin que la solidaritĂ© augmente. [...]

DURKHEIM De la division du travail social (1893) La connaissance de la doctrine de l'auteur n'est pas requise. Il faut et il suffit que l'explication rende compte, par la comprĂ©hension prĂ©cise du texte, du problĂšme dont il est question. _____ 1 latent : cachĂ©. 2 ajournĂ© : reportĂ© . DURKHEIM, De la division du travail social (1893) Concepts : Introduction Les faits que nous avons Ă©tudiĂ©s sont tous, qu’on nous permette l’expression, des faits sociaux totaux ou, si l’on veut – mais nous aimons moins le mot – gĂ©nĂ©raux c’est-Ă -dire qu’ils mettent en branle, dans certains cas, la totalitĂ© de la sociĂ©tĂ© et de ses institutions potlatch, clans affrontĂ©s, tribus se visitant, etc. et, dans d’autres cas, seulement un trĂšs grand nombre d’institutions
 » M. Mauss, Sociologie et Anthropologie, IIe partie Essai sur le don. Forme et raison de l’échange dans les sociĂ©tĂ©s archaĂŻques », PUF, coll. Quadrige », 1989, p. 275. À part A. Gorz en France, en particulier MĂ©tamorphoses du travail. QuĂȘte du sens, GalilĂ©e, 1988 ; Vincent, Critique du travail, PUF, coll. Pratiques thĂ©oriques », 1987, ou certains auteurs qui se sont intĂ©ressĂ©s Ă©pisodiquement Ă  l’histoire du travail voir par exemple A. Cotta, L’Homme au travail, Fayard, 1987, les auteurs sont surtout allemands et correspondent Ă  des disciplines croisĂ©es – philosophie, sociologie, sciences sociales – qui sont regroupĂ©es sous l’appellation sciences de la sociĂ©tĂ© » et qui n’ont pas d’équivalent en France. J’appelle “idĂ©ologie” l’ensemble des idĂ©es et des valeurs communes dans une sociĂ©tĂ©. Comme il y a dans le monde moderne un ensemble d’idĂ©es et de valeurs qui est commun Ă  de nombreuses sociĂ©tĂ©s, pays ou nations, nous parlerons d’une “idĂ©ologie moderne” en contraste avec l’idĂ©ologie de telle sociĂ©tĂ© traditionnelle », L. Dumont, Homo aequalis I, GenĂšse et Ă©panouissement de l’idĂ©ologie Ă©conomique, Gallimard, 1985, p. 16. L. Dumont emploie ici le terme d’idĂ©ologie dans son sens le plus tardif. Voir note 6 infra. Sciences de la nature et sciences de l’esprit se sont opposĂ©es, quant Ă  leur mĂ©thode, Ă  leur objet et Ă  leur lĂ©gitimitĂ© respectives, Ă  plusieurs reprises, en particulier entre 1880 et 1914, puis du milieu des annĂ©es 1950 au milieu des annĂ©es 1960. Il s’agit de savoir quel est le statut des sciences de l’esprit vis-Ă -vis des sciences de la nature. Voir, pour ces controverses, W. Dilthey, Introduction Ă  l’étude des sciences humaines. Essai sur le fondement qu’on pourrait donner Ă  l’étude de la sociĂ©tĂ© et de l’histoire, PUF, 1942 ; M. Weber, Essai sur la thĂ©orie de la science, Plon, 1965, et, pour le xxe siĂšcle et la querelle du positivisme entre Adorno et Popper, puis Habermas et Albert, De Vienne Ă  Francfort. La querelle des sciences sociales, Éditions Complexe, 1979. DĂšs 1892, Frege, dans un article cĂ©lĂšbre, propose que la valeur de vĂ©ritĂ© constitue la rĂ©fĂ©rence des assertions et des Ă©noncĂ©s, qui ont par ailleurs un sens. Les Principia mathematica de Russell et Whitehead marquent le dĂ©but du positivisme logique. La caractĂ©ristique majeure des auteurs qui se situent dans cette lignĂ©e, c’est d’éliminer du discours les phrases sans sens, comme celles dont est truffĂ©e la mĂ©taphysique, disent-ils. Comme l’exprime lapidairement A. Ayer dans Truth, Language and Logic 1936 Un Ă©noncĂ© est littĂ©ralement dotĂ© de sens si, et seulement si, il est vĂ©rifiable de maniĂšre analytique ou empirique. » Pour l’histoire de cette pĂ©riode, voir P. Jacob, De Vienne Ă  Cambridge, Gallimard, 1980, et M. Canto-Sperber, La Philosophie morale britannique, PUF, 1994. La notion a considĂ©rablement Ă©voluĂ© depuis les idĂ©ologues », dont Destutt de Tracy 1754-1836, Cabanis ou Volney, pour lesquels l’idĂ©ologie est la thĂ©orie de la constitution des idĂ©es Ă  partir des sens, en passant par le moment marxien oĂč l’idĂ©ologie est la reprĂ©sentation – fausse – que la sociĂ©tĂ© se fait d’elle-mĂȘme Si, dans toute idĂ©ologie, les hommes et leur condition apparaissent sens dessus dessous comme dans une camera obscura, ce phĂ©nomĂšne dĂ©coule de leur procĂšs de vie historique, tout comme l’inversion des objets sur la rĂ©tine provient de leur processus de vie directement physique », Marx, L’IdĂ©ologie allemande, in ƒuvres, tome III, Gallimard, coll. La PlĂ©iade », 1982, p. 1056. Voir la Lettre sur l’humanisme, Ă©crite en 1946 par Heidegger pour se dĂ©marquer de l’existentialisme français et de l’utilisation qui Ă©tait faite de sa philosophie en France, par Sartre notamment. Heidegger, Lettre sur l’humanisme, Aubier, 1989. L’école de Francfort est le nom donnĂ© Ă  ce courant de pensĂ©e qui a rassemblĂ©, de 1923, date de la crĂ©ation d’un Institut de recherches sociales Ă  Francfort, Ă  la fin des annĂ©es 1970, des auteurs allant d’Adorno et Horheimer Ă  Habermas, en passant par Marcuse, Fromm et Benjamin. Ils ont pour caractĂ©ristique commune d’ĂȘtre les hĂ©ritiers critiques du marxisme et de revendiquer une approche non pas mĂ©taphysique mais critique des problĂšmes sociaux et politiques. Voir Vincent, La ThĂ©orie critique de l’école de Francfort, GalilĂ©e, 1976 ; Assoun, L’École de Francfort, PUF, coll. Que sais-je ? », 1990, pour une bibliographie plus complĂšte. Par exemple les ouvrages de L. Dumont, assez lus dans ce milieu. Ose savoir », c’est le grand dĂ©fi que Kant lance Ă  l’homme. Selon Kant, l’homme est sorti de sa minoritĂ©, de l’obscurantisme, de la croyance aveugle en l’autoritĂ© ; il doit dĂ©sormais se comporter en individu majeur en se conduisant selon sa raison. Voir E. Kant, RĂ©ponse Ă  la question Qu’est-ce que les LumiĂšres ?, GF-Flammarion, 1992. Chapitre premier. L’actuel paradoxe des sociĂ©tĂ©s fondĂ©es sur le travail Sur toutes les questions traitant des politiques de l’emploi et de la protection sociale, on pourra consulter pour plus de dĂ©tails Join-Lambert, A. Bolot-Gittler, C. Daniel, D. Lenoir, D. MĂ©da, Politiques sociales, FNSP/Dalloz, 1994. Les catĂ©gories Ă  travers lesquelles sont apprĂ©hendĂ©s travail et non-travail n’ont pas Ă©tĂ© considĂ©rablement modifiĂ©es depuis la fin du xixe siĂšcle. Voir N. Baverez, R. Salais, B. Reynaud, L’Invention du chĂŽmage, PUF, 1986. 12,6 % de la population active, 3,3 millions de personnes officiellement, 5 millions si l’on compte toutes les personnes Ă  la recherche d’un emploi, sorties du marchĂ© du travail, en formation, en contrats trĂšs prĂ©caires. On consultera, pour avoir une idĂ©e des diffĂ©rents auteurs qui dĂ©fendent depuis quelques annĂ©es des positions assez proches sur le travail, les ouvrages et articles suivants A. Supiot, Critique du droit du travail, PUF, 1994 livre remarquable dont il sera frĂ©quemment question ici ; A. Supiot, Le travail, libertĂ© partagĂ©e », in Droit social, octobre 1993 et la rĂ©ponse, D. MĂ©da, Travail et politiques sociales », in Droit social, avril 1994 ; C. Dubar, La Socialisation, PUF, 1991 ; une sĂ©rie d’articles dans la revue Projet no 236, intitulĂ©e Le Travail Ă  sa place et dans la revue Esprit no 204, aoĂ»t-septembre 1994, en particulier ceux consacrĂ©s Ă  La France et son chĂŽmage, le partage du travail dans l’impasse » ; le rapport de l’Institut du travail intitulĂ© Les Attitudes devant le travail, septembre 1993. Le Centre des jeunes dirigeants est une association de dirigeants d’entreprises qui a souvent pris des positions avancĂ©es en matiĂšre sociale. La citation est extraite d’un texte intitulĂ© L’illusion du plein emploi », publiĂ© dans le numĂ©ro de janvier 1994 de la revue Futuribles. H. Bartoli, Ă©conomiste et humaniste chrĂ©tien, a Ă©crit en particulier deux ouvrages trĂšs lus Ă  l’époque Science Ă©conomique et travail, Dalloz, 1957, dont est extraite la prĂ©sente citation, p. 49, et La Doctrine Ă©conomique et sociale de Karl Marx, Seuil, 1947. Voir principalement J. Lacroix, Personne et amour, Seuil, 1956, et La notion du travail », in XXIXes JournĂ©es universitaires catholiques, Lyon, 1942 ; R. P. Chenu L’Homo Ɠconomicus et le chrĂ©tien », in Économie et humanisme, mai-juin 1945, et La ThĂ©ologie au xiie siĂšcle, Paris, 1957 ; E. Mounier, Le Personnalisme, Seuil, 1949 ; J. Vialatoux, La signification humaine du travail », Bulletin des sociĂ©tĂ©s catholiques de Lyon, juillet-dĂ©cembre 1948, et H. Bartoli, Science Ă©conomique et travail, op. cit., chapitre ii, Le travail catĂ©gorie finalisante ». Voir Ă©galement la lettre encyclique Laborem exercens du souverain pontife Jean-Paul II, 1981, publiĂ©e in Jean-Paul II parle des questions sociales, Livre de Poche, 1994. Par exemple Un ĂȘtre n’est un ĂȘtre authentique, c’est-Ă -dire un ĂȘtre libre, que dans la mesure oĂč il fait un effort laborieux. » R. Ruyer, citĂ© par Bartoli. Le travail arrache l’homme Ă  l’extĂ©rioritĂ©, il pĂ©nĂštre d’humanitĂ© la nature. Jailli de la nĂ©cessitĂ©, il rĂ©alise l’Ɠuvre de la libertĂ© et affirme notre puissance. [
] L’acte ontologique du travail ne peut s’effectuer qu’en transcendant les bornes de l’environnement animal vers la totalitĂ© du monde humain le travail est l’acte ontologique constituant du monde. [
] Le travail, c’est la vĂ©ritĂ© de l’idĂ©alisme et du matĂ©rialisme, c’est l’homme au principe de la matiĂšre et c’est la conscience Ă©mergeant du vide vers la plĂ©nitude de la joie », Vuillemin, L’Être et le travail, PUF, 1949. A. Supiot, Critique du droit du travail, op. cit., p. 3. Y. Schwarz, ExpĂ©rience et connaissance du travail, Messidor-Éditions sociales, 1988 ; du mĂȘme auteur, Travail et philosophie, convocations mutuelles, Octares Éditions, 1992 ; et articles du mĂȘme auteur, dans les nos 10 et 16 de Futur antĂ©rieur, consacrĂ©s au travail ; J. Bidet, auteur en particulier de Que faire du Capital ?, MĂ©ridiens Klincksieck, 1985, et de Marx et le marchĂ© essai sur la modernitĂ©, PUF, 1990, et codirecteur de la revue Actuel Marx. Voir aussi Le travail fait Ă©poque », Politis, no 7, p. 75 ; Vincent, op. cit., et codirecteur de la revue Futur antĂ©rieur, dĂ©jĂ  citĂ©e. Politis, no 7, op. cit., p. 75. Science Ă©conomique et travail, op. cit., p. 51 et 52. Le TraitĂ© de sociologie du travail, de G. Friedmann et P. Naville, A. Colin, 1972, qui a formĂ© des gĂ©nĂ©rations de sociologues, commence ainsi Le travail est le trait spĂ©cifique de l’espĂšce humaine. L’homme est un animal social essentiellement occupĂ© de travail. Le travail est le commun dĂ©nominateur et la condition de toute vie humaine en sociĂ©tĂ©. » Les auteurs se rĂ©fĂšrent Ă  Bergson pour indiquer que le travail humain consiste Ă  crĂ©er de l’utilitĂ© et Ă  Mayo, pour qui l’homme, animal social et essentiellement occupĂ© par le travail, ne peut s’exprimer et s’épanouir que dans la collectivitĂ© oĂč il exerce son activitĂ© professionnelle ». Le titre de l’ouvrage de Sainsaulieu est Ă©galement significatif dans L’IdentitĂ© au travail, FNSP, 1977, il Ă©crit S’il y a des identitĂ©s collectives, c’est que les individus ont en commun une mĂȘme logique d’acteur dans les positions sociales qu’ils occupent. » Voir en particulier p. 318 Ă  341. Nos sociĂ©tĂ©s ont instaurĂ© de nouvelles formes de sociabilitĂ© en inventant des solutions techniques Ă  leurs problĂšmes d’organisation. [
] DĂšs le dĂ©but des annĂ©es soixante, l’organisation Ă©tait ainsi clairement dĂ©signĂ©e comme lieu d’implication trĂšs forte des individus dans un milieu humain complexe. La scĂšne des rapports de travail habituellement envisagĂ©e sous le double angle des rapports fonctionnels de production et des rapports collectifs de lutte sociale acquĂ©rait ainsi une troisiĂšme dimension celle des Ă©changes humains quotidiens de production, oĂč le fonctionnel, l’interpersonnel et le collectif pouvaient, en se mĂȘlant, contribuer Ă  donner une nouvelle signification au monde du travail », ibid. C. Dejours, Entre souffrance et rĂ©appropriation, le sens du travail », Politis, no 7, p. 23. On lira aussi du mĂȘme auteur, Travail usure mentale. De la psychopathologie Ă  la psychodynamique du travail, Bayard, 1993. H. Bartoli, Science Ă©conomique et travail, op. cit., p. 53 et 54. Ibid., p. 55. Le travail humain porte en lui la double exigence d’un Ă©panouissement de la personne et de la communautĂ© et d’une spiritualisation de la nature, mais il est l’occasion d’aliĂ©nations sans cesse renaissantes. [
] L’appropriation privĂ©e des moyens de production et la prĂ©sence d’hommes sans aucun avoir, la sĂ©paration du capital et du travail rendue inĂ©luctable par la nĂ©cessitĂ© de la possession de gros capitaux pour le lancement d’une grosse affaire en temps de rĂ©volution industrielle, entraĂźnent la double apparition d’une classe vendeuse et d’une classe acheteuse de travail. Le travail est ainsi ravalĂ© au rang d’une marchandise objet de trafic », Ă©crit Bartoli dans le mĂȘme chapitre. Habermas, Le Discours philosophique de la modernitĂ©, Gallimard, 1988, p. 97. C. Offe, Le travail comme catĂ©gorie de la sociologie », Les Temps modernes, 1985, no 466, p. 2058 Ă  2095. Voir aussi, du mĂȘme auteur, plusieurs articles dans le cahier spĂ©cial no 24 de la Kölner Zeitschrift fĂŒr Soziologie und Sozialpsychologie, 1982, et un ouvrage codirigĂ© par C. Offe, Arbeitszeitpolitik, Formen und Folgen einer Neuverteilung der Arbeitszeit, Campus, 1982. R. Dahrendorf, Im Entschwinden der Arbeitsgesellschaft », Merkur, no 8, 1980. B. Guggenberger, Wenn uns die Arbeit ausgeht [Quand le travail vient Ă  manquer], Hanser, 1988. Chapitre II. Des sociĂ©tĂ©s sans travail ? P. Descola, citĂ© par Chamoux, SociĂ©tĂ©s avec et sans concept de travail remarques anthropologiques », in Actes du colloque interdisciplinaire Travail recherche et prospective », Pirrtem-CNRS, Lyon, dĂ©cembre 1992, Groupe transversal concept de travail », p. 21, document ronĂ©otĂ©. PubliĂ© depuis dans la revue Sociologie du travail, hors-sĂ©rie, 1994. M. Sahlins, Âge de pierre, Ăąge d’abondance, Gallimard, 1976, et Au cƓur des sociĂ©tĂ©s raison utilitaire et raison culturelle, Gallimard, 1991. On lira Ă©galement de P. Clastres, La SociĂ©tĂ© contre l’État, Éd. de Minuit, 1986, en particulier le chapitre xi. B. Malinowski, Les Argonautes du Pacifique occidental, Gallimard, coll. Tel », 1989, p. 177. Ibid., p. 118. Ibid. M. Sahlins, L’Économie tribale », in M. Godelier, Un domaine contestĂ©, l’anthropologie Ă©conomique, recueil de textes, Mouton, 1974, p. 245. Les hommes rivalisent entre eux Ă  qui ira le plus vite, Ă  qui fera la meilleure besogne, soulĂšvera le plus de fardeaux pour amener au jardin de gros piquets ou transporter des ignames rĂ©coltĂ©es. [
] En pratique donc, le jardinier ne tire aucun bĂ©nĂ©fice personnel, au sens utilitaire, de sa rĂ©colte, mais la qualitĂ© et la quantitĂ© de sa production lui valent des Ă©loges et une rĂ©putation qui lui sont dĂ©cernĂ©s d’une maniĂšre directe et solennelle. [
] Chacun dans sa propre parcelle expose le fruit de son travail Ă  l’Ɠil critique des groupes qui dĂ©filent devant les jardins, admirant, comparant et vantant les meilleurs rĂ©sultats », in B. Malinowski, op. cit., p. 118. Ibid., p. 119. Aristote, MĂ©taphysique, A, 2, 982b, Vrin, 1986. Quelques lignes plus haut, Aristote Ă©crit Ainsi donc, si ce fut bien pour Ă©chapper Ă  l’ignorance que les premiers philosophes se livrĂšrent Ă  la philosophie, c’est qu’évidemment ils poursuivaient le savoir en vue de la seule connaissance, et non pour une fin utilitaire. [
] De mĂȘme que nous appelons libre celui qui est Ă  lui-mĂȘme sa fin et n’existe pas pour un autre, ainsi cette science est aussi la seule de toutes les sciences qui soit une discipline libĂ©rale, puisque seule elle est Ă  elle-mĂȘme sa propre fin. » En particulier dans la RĂ©publique, livres III, IV, V. Aristote, La Politique, livre I, chapitres iii, iv, v, vi, Vrin, 1982. Ibid., livre VIII, chapitre ii. Ibid., livre III, chapitre v. Platon, Protagoras, 320c-322d, GF-Flammarion, 1967. Ibid. La vie de loisir a en elle-mĂȘme le plaisir et le bonheur de la vie bienheureuse. Mais cela n’appartient pas Ă  ceux qui ont une vie laborieuse, mais Ă  ceux qui ont une vie de loisir, car l’homme laborieux accomplit son labeur en vue de quelque fin qu’il ne possĂšde pas, mais le bonheur est une fin qui ne s’accompagne pas de peine, mais de plaisir », Aristote, La Politique, op. cit., livre VIII, chapitre iii. Ainsi ArchimĂšde s’est-il servi de certaines de ses inventions pour dĂ©fendre sa patrie et non pas pour produire avec un effort moindre. Voir Schuhl, Machinisme et philosophie, PUF, 1947. Sur toute cette pĂ©riode, on pourra consulter les nombreux ouvrages de P. Vidal-Naquet et Vernant, en particulier Travail et esclavage en GrĂšce ancienne, Éditions Complexe, 1988 ; Mythe et PensĂ©e chez les Grecs, Maspero-La DĂ©couverte, 1985 ; Mythe et sociĂ©tĂ© en GrĂšce ancienne, Maspero-La DĂ©couverte, 1974 ; voir aussi Hannah Arendt, Condition de l’homme moderne, Calmann-LĂ©vy, coll. Agora », 1988. Voir Ă©galement les nombreux ouvrages de M. I. Finley, dont Économie et sociĂ©tĂ© en GrĂšce ancienne, La DĂ©couverte, 1984, et Le Monde d’Ulysse, Seuil, coll. Points », 1990. On pourra complĂ©ter par H. Wallon, Histoire de l’esclavage dans l’AntiquitĂ©, R. Laffont, coll. Bouquins », 1988, et Rostovtseff, Histoire Ă©conomique et sociale du monde hellĂ©nistique, Robert Laffont, coll. Bouquins », 1989. Voir Ă©galement les articles du Journal de psychologie normale et pathologique, annĂ©es 1947, 1948 et 1955, en particulier l’article d’A. Aymard, L’idĂ©e de travail dans la GrĂšce archaĂŻque », 1948. CicĂ©ron, De Officiis. Voir la discussion qui suit l’article d’A. Aymard citĂ© in Journal de psychologie normale et pathologique, op. cit., 1948. Sur toute cette partie, voir J. Le Goff, Pour un autre Moyen Âge. Temps, travail et culture en Occident, Gallimard, coll. Tel », 1991. GenĂšse, iii, 19, traduction L. Segond, SociĂ©tĂ© biblique française. Ibid., ii, 2. Saint Paul, IIe ÉpĂźtre aux Thessaloniciens, 3, 10. Ibid., iii, 11-12. Saint Augustin Ă©crit ainsi dans les Confessions Mais tout cela Ă©tait presque le nĂ©ant, Ă©tant encore complĂštement informe, et pourtant cela Ă©tait apte Ă  recevoir une forme [
] Quant Ă  cette terre mĂȘme, votre Ɠuvre, elle n’était qu’une matiĂšre informe, Ă©tant invisible, chaotique et les tĂ©nĂšbres rĂ©gnant sur l’abĂźme. C’est de cette terre invisible, chaotique, de cette masse informe, de ce presque nĂ©ant, que vous deviez former tout ce par quoi subsiste et ne subsiste pas ce monde muable », livre 12, chapitre viii. Nous vous exhortons, frĂšres, [
] Ă  mettre votre honneur Ă  vivre tranquilles, Ă  vous occuper de vos propres affaires, et Ă  travailler de vos mains, comme nous vous l’avons recommandĂ©, en sorte que vous vous conduisiez honnĂȘtement envers ceux du dehors, et que vous n’ayez besoin de personne », IIe Thess., op. cit., iv, 11-12. Voir E. Delaruelle, Le travail dans les rĂšgles monastiques occidentales du ive au ixe siĂšcle », Journal de psychologie
, op. cit., 1948. Les citations de saint Augustin sont extraites de la lettre CCXL, appelĂ©e RĂšgle de saint Augustin et du De opere monachorum, que nous n’avons pas directement consultĂ©s. RĂšgle de saint BenoĂźt, chapitre xlviii, in Journal de psychologie, op. cit. Un des ouvrages essentiels pour mieux comprendre le rĂŽle de la notion d’Ɠuvres dans les religions catholique et protestante est Ă©videmment L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme de Weber, Presses-Pocket, coll. Agora », 1990. Sur le rapport au temps qui va s’inverser, voir le texte de Benjamin Franklin citĂ© par Weber p. 44, et sur les Ɠuvres tout le chapitre ii Le Dieu du calvinisme rĂ©clamait non pas des bonnes Ɠuvres isolĂ©es, mais une vie tout entiĂšre de bonnes Ɠuvres Ă©rigĂ©es en systĂšme », p. 134. J. Le Goff, op. cit. Voir MĂ©tiers licites et mĂ©tiers illicites dans l’Occident mĂ©diĂ©val », in Pour un autre Moyen Âge, op. cit., p. 92. Ibid., p. 96. Cf. G. Duby, Les Trois Ordres ou l’imaginaire du fĂ©odalisme, Gallimard, 1978. Saint Thomas, Somme thĂ©ologique, question 77. MalgrĂ© tout, le travail ne fait pas l’objet d’une valorisation. Voir l’interprĂ©tation que donne Weber de saint Thomas dans L’Éthique protestante
, op. cit., p. 192 Pour lui, ce n’est que naturali ratione que le travail est nĂ©cessaire Ă  la subsistance de l’individu et de la communauté  [La prescription] est valable pour l’espĂšce, non pour l’individu. » Surtout, l’idĂ©e de dĂ©velopper ses capacitĂ©s, par exemple intellectuelles, pour les vendre, demeure inconcevable. Il n’en reste pas moins que le principe Deo placere vix potest est considĂ©rĂ© comme ayant force de loi, de mĂȘme que les paroles de saint Thomas qualifiant de turpitudo la recherche du profit. F. Brunot, Histoire de la langue française, tome VI, Ire partie, fascicule I, p. 1349. L. Febvre, Travail Ă©volution d’un mot et d’une idĂ©e », in Journal de psychologie
, op. cit., 1948, p. 19-28. Ibid. Pour toute cette partie, voir Ă©galement I. Meyerson, Le travail, fonction psychologique », in Journal de psychologie
, op. cit., 1955, p. 3-17. Chapitre III. Acte I L’invention du travail A. Smith, Recherches sur les causes de la richesse des nations, GF-Flammarion, 1991. B. Mandeville, La Fable des Abeilles, ou les vices privĂ©s font le bien public, publiĂ© en 1714, Vrin, 1974. B. Franklin, Advice to a Young Tradesman, citĂ© in Weber, L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Presses-Pocket, coll. Agora », 1990, p. 46. Cf. C. LarrĂšre, L’Invention de l’économie au xviiie siĂšcle, PUF, 1992. Voir p. 36 et suivantes. Th. Malthus, Principes d’économie politique considĂ©rĂ©s sous le rapport de leur application pratique, Calmann-LĂ©vy, coll. Perspectives Ă©conomiques », 1969. Say, TraitĂ© d’économie politique, Calmann-LĂ©vy, coll. Perspectives Ă©conomiques », 1972. Le terme physiocrates » dĂ©signe un ensemble d’auteurs essentiellement français, dont Quesnay 1694-1774, Le Mercier de la RiviĂšre 1721-1793, Turgot 1727-1781, Dupont de Nemours 1739-1817. Ils considĂšrent que seule la terre est productive, que seule la nature physis est capable de crĂ©er de la valeur, du surplus. L’industrie et le commerce sont, quant Ă  eux, non productifs. Pour une analyse de leurs idĂ©es, voir C. LarrĂšre, L’Invention de l’économie au xviiie siĂšcle, op. cit. La manufacture d’épingles est prise comme l’exemple type du lieu oĂč s’exerce Ă  plein la division du travail. Un ouvrier, quelque adroit qu’il fĂ»t », pourrait peut-ĂȘtre Ă  peine faire une Ă©pingle toute sa journĂ©e s’il Ă©tait seul alors qu’à dix, et si chacun ne s’occupe que d’une opĂ©ration particuliĂšre, chacun parvient Ă  en faire quatre mille huit cents. Cf. Recherches
, op. cit., p. 72. Ibid., op. cit., p. 100. Ibid., p. 102. Ibid., p. 75. Ibid., p. 73. 
 qui ne se fixe ou ne se rĂ©alise sur aucun objet, sur aucune chose qu’on puisse vendre ensuite [
] ses services pĂ©rissant Ă  l’instant mĂȘme oĂč il les rend », ibid., p. 418. Principes
, op. cit., p. 5. Il est Ă©vident que nous ne pouvons aborder, sous le point de vue pratique, aucune discussion sur l’accroissement relatif de la richesse chez les diffĂ©rentes nations si nous n’avons un moyen quelconque, quelque imparfait qu’il soit, d’évaluer la somme de cet accroissement », ibid. Ibid., p. 13 ; c’est nous qui soulignons. Ibid., p. 14. Locke, TraitĂ© du gouvernement civil, chapitre v, De la propriĂ©tĂ© des choses », § 27, GF-Flammarion, 1992, p. 163. Le TraitĂ© du Gouvernement civil a Ă©tĂ© publiĂ© en 1690. Tout ce qu’il a tirĂ© de l’état de nature, par sa peine et son industrie, appartient Ă  lui seul », ibid. La plus sacrĂ©e et la plus inviolable de toutes les propriĂ©tĂ©s est celle de son propre travail, Ă©crit Smith, parce qu’elle est la source originaire de toutes les autres propriĂ©tĂ©s. Le patrimoine du pauvre est dans sa force et dans l’adresse de ses mains », Recherches
, op. cit., p. 198. Dans cet Ă©tat primitif qui prĂ©cĂšde l’appropriation des terres et l’accumulation des capitaux, le produit entier du travail appartient Ă  l’ouvrier. Il n’y a ni propriĂ©taire ni maĂźtre avec qui il doive partager [
] Mais cet Ă©tat primitif, dans lequel l’ouvrier jouissait de tout le produit de son propre travail, ne put pas durer au-delĂ  de l’époque oĂč furent introduites l’appropriation des terres et l’accumulation des capitaux », ibid., p. 135-136. Et qui apparaissait d’ailleurs comme tel Ă  un auteur comme Polanyi ; voir La Grande Transformation, Gallimard, 1983. Labor est le terme technique qui dĂ©signe les ĂȘtres humains du moment qu’ils ne sont pas employeurs mais employĂ©s », p. 111, et Weber, Histoire Ă©conomique, esquisse d’une histoire universelle de l’économie et de la sociĂ©tĂ©, Gallimard, 1991, en particulier le chapitre ix, La naissance du capitalisme moderne », § 1 concepts et prĂ©supposĂ©s du capitalisme. Pour distinguer les diffĂ©rentes formes d’utilisation de la main-d’Ɠuvre en vigueur de la fin du Moyen Âge Ă  la RĂ©volution industrielle, voir Weber, Histoire Ă©conomique
, op. cit., en particulier le chapitre ii. Voir ce que Camerlynck dit de Pothier dans Le Contrat de travail, Dalloz, 1982, et cette affirmation de Polanyi dans La Grande Transformation, op. cit., p. 242 Dans l’avĂšnement du marchĂ© du travail, le droit coutumier a jouĂ© en gros un rĂŽle positif. Ce sont les juristes, non les Ă©conomistes, qui ont Ă©tĂ© les premiers Ă  Ă©noncer avec force la thĂ©orie du travail marchandise. » Le TraitĂ© du contrat de louage date de 1764. Voir Camerlynck, Le Contrat de travail, op. cit., chapitre i, p. 3 Le contrat de louage de services chez Pothier ». La loi Le Chapelier, qui date, elle, du 14 juin 1791, interdit toute coalition en s’inspirant ainsi trĂšs fortement de la condamnation que Rousseau avait portĂ©e contre les associations dans le Contrat social livre II, chapitre iii, 1762. Le rapporteur de la loi Le Chapelier indique Il faut remonter au principe que c’est aux conventions libres d’individu Ă  individu de fixer la journĂ©e de travail pour chaque ouvrier, Ă  l’ouvrier de maintenir la convention qui a Ă©tĂ© faite avec celui qui l’occupe. Quant au salaire, seules les conventions libres et individuelles peuvent le fixer. » Les conventions lĂ©galement formĂ©es tiennent lieu de loi Ă  ceux qui les ont faites », Code civil, article 1134. C’est par la convention qui se fait habituellement entre ces deux personnes, dont l’intĂ©rĂȘt n’est nullement le mĂȘme, que se dĂ©termine le taux commun des salaires. Les ouvriers dĂ©sirent gagner le plus possible ; les maĂźtres, donner le moins qu’ils peuvent ; les premiers sont disposĂ©s Ă  se concerter pour Ă©lever les salaires, les seconds pour les abaisser. Il n’est pas difficile de prĂ©voir lequel des deux partis, dans toutes les circonstances ordinaires, doit avoir l’avantage dans le dĂ©bat et imposer forcĂ©ment Ă  l’autre toutes ses conditions ; les maĂźtres, Ă©tant en plus grand nombre, peuvent se concerter plus aisĂ©ment ; et de plus, la loi les autorise Ă  se concerter entre eux, ou du moins ne leur interdit pas, tandis qu’elle l’interdit aux ouvriers
 », Recherches
, op. cit., p. 137. Weber est d’ailleurs extrĂȘmement prudent il ne prĂ©tend pas dĂ©duire » un phĂ©nomĂšne historique d’une transformation des reprĂ©sentations. Voir L’Éthique protestante
, op. cit., p. 103-104. Weber s’attarde sur la notion de Beruf, qui signifie en allemand Ă  la fois mĂ©tier, tĂąche et vocation et qui a pris ce sens avec Luther. Le fait que le travail a Ă©tĂ© soudainement perçu comme une vocation, un devoir imposĂ© par Dieu, n’est pas un produit de la nature. Il ne peut ĂȘtre suscitĂ© uniquement par de hauts ou de bas salaires. C’est le rĂ©sultat d’un long, d’un persĂ©vĂ©rant processus d’éducation. » Weber tente de retrouver les grandes Ă©tapes qui ont conduit de la condamnation de l’ici-bas Ă  sa valorisation. Voir en particulier p. 95 et suivantes et p. 123 et suivantes de l’Éthique protestante
 C’est cette condamnation qui explique en particulier les hĂ©sitations de Malthus au dĂ©but de ses Principes d’économie politique tous les moralistes, dit-il, nous ont bien enseignĂ© qu’il fallait prĂ©fĂ©rer la vertu Ă  la richesse. Si la vertu constitue la richesse, pourquoi la fuir, etc. ? Cf. p. 11 et suivantes. A. Hirschman, Les Passions et les intĂ©rĂȘts, PUF, coll. Sociologies », 1980, p. 15. Montesquieu, L’Esprit des lois, introduction. L. Dumont, Homo aequalis, op. cit. Voir MĂ©ditations mĂ©taphysiques, GF-Flammarion, 1979, et Les Principes de la philosophie, Vrin, 1970. Voir en particulier les PensĂ©es, et, dans celles-ci, Ire partie L’homme sans Dieu », chapitre i La place de l’homme dans la nature les deux infinis » et chapitre ii MisĂšre de l’homme », Le Livre de poche, 1962. Descartes, Discours de la mĂ©thode. F. Bacon, Du progrĂšs et de la promotion des savoirs, Gallimard, coll. Tel », 1991 ; La Nouvelle Atlantide, GF-Flammarion, Ă  paraĂźtre. Voir sur ce point les commentaires de H. Achterhuis dans La responsabilitĂ© entre la crainte et l’utopie », in Hans Jonas, Nature et responsabilitĂ©, Vrin, 1993. Cet auteur interprĂšte la transmutation de la peur en enthousiasme Ă  cette Ă©poque par la croyance subite dans les vertus du progrĂšs et de la production La situation de raretĂ© toujours menaçante oĂč chacun se bat pour possĂ©der les quelques biens disponibles pourrait ĂȘtre rĂ©solue par la production de plus de biens », op. cit., p. 43. Saint Paul, ÉpĂźtre aux Romains, xiii, 1, 2, 5. Hobbes Ă©crit ses Ɠuvres politiques entre 1640 et 1670. Voir Le Citoyen ou les fondements de la politique, GF-Flammarion, 1982, et le LĂ©viathan, Sirey, 1971. Il faut Ă©galement prendre en compte les travaux de l’école moderne du droit naturel, machine de guerre contre la conception classique du droit naturel. Grotius, Pufendorf, Burlamaqui en sont les principaux reprĂ©sentants. On trouvera une analyse de ces pensĂ©es dans R. DerathĂ©, Rousseau et la science politique de son temps, Vrin, 1988. Les reprĂ©sentants de l’école moderne du droit naturel imaginent comme Hobbes une gĂ©nĂ©alogie qui leur permet de distinguer un avant et un aprĂšs, mais ils se donnent », Ă  la diffĂ©rence de Hobbes, la sociabilitĂ©. Grotius et Pufendorf, en particulier, dĂ©duisent l’état civil de la sociabilitĂ© naturelle aux hommes. Ce avec quoi Hobbes, et plus tard Rousseau, rompent. Cf. C. LarrĂšre, L’Invention de l’économie
, op. cit. C’est l’interprĂ©tation qu’en donne en particulier Hegel, voir infra chapitre ix. Il s’agit d’une autre maniĂšre de prĂ©senter le principe de raison, grĂące Ă  sa raison, l’individu trouve en lui-mĂȘme le principe qui lui donne son unitĂ©, qui peut guider ses actions et les expliquer. Les thĂ©oriciens du contrat sont lĂ©gion Grotius, Pufendorf, Burlamaqui, Hobbes, Locke, Rousseau sont les plus connus. Les thĂ©ories du contrat admettent de nombreuses variantes. Voir R. DerathĂ©, Rousseau et la science politique de son temps, op. cit., et Rousseau, Contrat social, op. cit., I, vi. A. Smith, Recherches
, op. cit., p. 82. Cf. MĂ©taphysique λ, 7, 1072a 25-30 et 1072b 10-15, Vrin, 1986, p. 680. A. Smith, Recherches
, op. cit., p. 79. P. Rosanvallon, Le LibĂ©ralisme Ă©conomique. Histoire de l’idĂ©e de marchĂ©, Seuil, coll. Points », 1989, et L. Dumont, Homo aequalis, op. cit., et Essais sur l’individualisme, Seuil, 1991. P. Rosanvallon, Le LibĂ©ralisme Ă©conomique, op. cit., p. II-III La naissance du libĂ©ralisme Ă©conomique [
] doit d’abord ĂȘtre comprise comme une rĂ©ponse aux problĂšmes non rĂ©solus par les thĂ©oriciens politiques du contrat social [
] C’est le marchĂ© Ă©conomique et non pas le contrat politique qui est le vrai rĂ©gulateur de la sociĂ©tĂ©. » Rosanvallon explique ainsi que la rĂ©gulation Ă©conomique, caractĂ©risĂ©e par l’automaticitĂ© des relations, succĂšde aux explications plus politiques, qui auraient Ă©chouĂ©. Nous ne partageons pas cette thĂšse. Il nous semble au contraire que les deux solutions vont continuer de se dĂ©velopper ensemble, ou du moins qu’il existe deux solutions parfaitement envisageables du mĂȘme problĂšme, et qui prĂ©sentent des caractĂ©ristiques diffĂ©rentes. C’est parce qu’il ne fait pas cette diffĂ©rence que Rosanvallon se prive de mettre en Ă©vidence la considĂ©rable originalitĂ© de la pensĂ©e allemande du xixe siĂšcle, en particulier celle de Hegel. Nous y reviendrons. ComitĂ© de mendicitĂ© de la Constituante, 1790, Premier rapport. Voir aussi Barthe, PauvretĂ©s et État-providence », Revue française des affaires sociales, no 3, juillet 1991. Chapitre IV. Acte II Le travail, essence de l’homme EncyclopĂ©die, article Travail », tome XVI, col. 567b, 1765. Sur ce bouleversement conceptuel, et en particulier sur le brutal changement de signification que subit le terme de travail dans les quinze premiĂšres annĂ©es du xixe siĂšcle, on pourra consulter I. Meyerson, Le travail, fonction psychologique », art. cit., p. 7 ; C’est au cours du xixe siĂšcle – siĂšcle d’une vie industrielle et sociale dense – que l’image psychologique du travail tel que nous le connaissons va se dessiner et se prĂ©ciser. » L’idĂ©alisme allemand n’est pas une Ă©cole au sens propre, c’est un moment de l’histoire philosophique allemande, qui commence avec Kant et se termine avec les successeurs de Hegel. On parle Ă  propos de la philosophie kantienne d’idĂ©alisme transcendantal, car Kant dĂ©montre que notre connaissance des objets ne consiste pas en une rĂ©ception passive mais en une construction dont nous sommes partie prenante Ă  travers les formes a priori de la sensibilitĂ© et de l’entendement. Voir article Kant », in Gradus philosophique, L. Jaffro, M. Labrune Ă©d., GF-Flammarion, 1994. De l’Absolu, il faut dire qu’il est essentiellement rĂ©sultat, c’est-Ă -dire qu’il est Ă  la fin seulement ce qu’il est en vĂ©ritĂ©. [
] L’Esprit n’est jamais en repos, mais il est toujours emportĂ© dans un mouvement continuellement progressif. [
] La substance est essentiellement sujet, c’est ce qui est exprimĂ© dans la reprĂ©sentation qui annonce l’Absolu comme Esprit seul le spirituel est effectif », Hegel, PhĂ©nomĂ©nologie de l’esprit, traduction J. Hyppolite, Aubier, 1941, p. 18-19. Ibid., p. 12. Il y a dans les philosophies de Fichte, Schelling et Hegel une vĂ©ritable volontĂ© de rĂ©duire au sens de faire disparaĂźtre » la nature, pour que rien ne rĂ©siste Ă  la formidable puissance de l’Esprit, esprit de Dieu et esprit humain. C’est au mĂȘme moment que Goethe parle de l’esprit qui toujours nie ». On pourra voir en particulier la Philosophie de la nature de Schelling. L’idĂ©e fondamentale est bien qu’il est incomprĂ©hensible que quelque chose », appelĂ© la nature, puisse ĂȘtre, avoir Ă©tĂ© et continuer Ă  ĂȘtre diffĂ©rent de et dĂ©finitivement Ă©tranger Ă  Dieu, qui est Esprit. Hegel, La Philosophie de l’esprit, 1805, PUF, 1982. Ibid., p. 32 Travail, instrument, ruse », et p. 53. Sur la premiĂšre pĂ©riode de Hegel, voir P. Chamley, La doctrine Ă©conomique de Hegel et la conception hĂ©gĂ©lienne du travail », in Hegel-Studien, 1965, et, du mĂȘme auteur, Économie politique et philosophie chez Steuart et Hegel, Dalloz, 1963. De Hegel, voir PhĂ©nomĂ©nologie
, op. cit. ; PrĂ©cis de l’EncyclopĂ©die des sciences philosophiques, Vrin, 1970 ; Principes de la philosophie du droit, Vrin, 1982. Voir aussi J. Hyppolite, Introduction Ă  la philosophie de l’histoire de Hegel, Seuil, coll. Points », 1983 ; K. Papaioannou, Hegel, Presses-Pocket, coll. Agora », 1987 ; E. Weil, Hegel et l’État, Vrin, 1974. Principes de la philosophie
, op. cit., § 198, p. 224. Ibid., § 245, traduction J. Hyppolite, in Introduction
, op. cit., p. 121. Principes de la philosophie
, op. cit., § 198 De plus, l’abstraction de la façon de produire rend le travail de plus en plus mĂ©canique et offre aussi finalement Ă  l’homme la possibilitĂ© de s’en Ă©loigner et de se faire remplacer par la machine », p. 224. C’est ce que montre la structure mĂȘme de l’EncyclopĂ©die des sciences philosophiques, manuel qui comprend l’ensemble du systĂšme philosophique de Hegel et qui se prĂ©sente en trois parties la logique, la philosophie de la nature et la philosophie de l’esprit. Cette derniĂšre prĂ©sente elle-mĂȘme trois moments l’esprit subjectif, l’esprit objectif, l’esprit absolu. Le travail abstrait et industriel appartient au moment de l’esprit objectif l’Esprit s’est incarnĂ© dans des formes particuliĂšres et prend la forme de la moralitĂ© sociale, d’abord dans la famille, puis dans la sociĂ©tĂ© civile, et enfin dans l’État. Mais dans son moment le plus pur et le plus haut, lorsqu’il est esprit absolu, l’Esprit s’exprime par l’art, la religion et la philosophie. Marx, Ébauche d’une critique de l’économie politique, Communisme et propriĂ©tĂ© », in ƒuvres, Économie, Gallimard, coll. La PlĂ©iade », tome II, 1979, p. 89. Ce communisme est un naturalisme achevĂ©, et comme tel un humanisme ; en tant qu’humanisme achevĂ©, il est un naturalisme. Il est la vraie solution du conflit de l’homme avec la nature, de l’homme avec l’homme », op. cit., p. 79. Voir toute la page 61 de Ébauche
, op. cit., sur le travail aliĂ©nĂ© et les fonctions animales. Ibid., p. 62. Ibid., p. 126. C’est exactement ici que s’opĂšre le retournement majeur Marx se saisit du concept hĂ©gĂ©lien de travail, au sens de travail de l’Esprit, mais l’applique Ă  l’homme Le seul travail que Hegel connaisse et reconnaisse, c’est le travail abstrait de l’Esprit », ibid., p. 126. Marx s’empare de ce concept de travail et fait de l’homme, de chaque homme, son sujet. Marx, Notes de lecture », in Économie et philosophie, ƒuvres, Économie, tome II, op. cit., p. 22. Il y aurait lĂ , si P. Chamley a raison, une sorte de rĂ©gression de Marx vis-Ă -vis de l’avancĂ©e conceptuelle de Hegel. Il semble bien en effet que Hegel, qui a lu trĂšs tĂŽt Locke, reprenne de celui-ci une conception Ă©nergĂ©tique et dynamique du travail l’homme met quelque chose de lui-mĂȘme dans l’objet, ce qui est au fondement des hĂ©sitations de Smith et du choix de Ricardo pour la valeur-travail. Mais Hegel abandonnera, d’aprĂšs P. Chamley, cette conception, et passera rapidement Ă  cette autre idĂ©e fondamentale selon laquelle ce qui importe dans le travail n’est pas ce que l’homme met de lui-mĂȘme dans l’objet, mais le fait que l’homme travaille pour obtenir de la reconnaissance, Ă  travers l’échange. Notes de lecture », in Économie et philosophie, op. cit., § 17, Le travail lucratif », p. 27. Ébauche d’une critique
, op. cit., p. 63-64. Travail forcĂ©, il n’est pas la satisfaction d’un besoin, mais seulement un moyen de satisfaire des besoins en dehors du travail. [
] On en vient donc Ă  ce rĂ©sultat que l’homme n’a de spontanĂ©itĂ© que dans ses fonctions animales le manger, le boire, la procrĂ©ation [
] et que dans ses fonctions humaines, il ne se sent plus qu’animalitĂ© ; ce qui est animal devient humain, et ce qui est humain devient animal », ibid., p. 61. C’est la critique fondamentale de Marx contre l’économie politique elle fait semblant de considĂ©rer comme naturel ce qui n’est qu’historique ; cf., par exemple, Économie et philosophie, op. cit., p. 37, 44, 56, 67, 71, etc. Ibid., p. 72. Marx, Principes d’une critique de l’économie politique, Le travail comme sacrifice et le travail libre », in ƒuvres, Économie, tome II, op. cit., p. 289. ConsidĂ©rer le travail simplement comme un sacrifice, donc comme source de valeur, comme prix payĂ© par les choses et donnant du prix aux choses suivant qu’elles coĂ»tent plus ou moins de travail, c’est s’en tenir Ă  une dĂ©finition purement nĂ©gative. [
] Le travail est une activitĂ© positive, crĂ©atrice », ibid., p. 291-292. Ibid., p. 305, commentĂ© par Habermas dans L’idĂ©e d’une thĂ©orie de la connaissance », in Connaissance et intĂ©rĂȘt, Gallimard, coll. Tel », 1991, p. 82. Principes d’une critique de l’économie
, op. cit., p. 303. Ibid., p. 310. On lira avec profit les pages qui prĂ©cĂšdent et, notamment, p. 306 La rĂ©duction du temps de travail nĂ©cessaire permettra le libre Ă©panouissement de l’individu. En effet, grĂące aux loisirs et aux moyens mis Ă  la portĂ©e de tous, la rĂ©duction au minimum du travail social nĂ©cessaire favorisera le dĂ©veloppement artistique, scientifique, etc., de chacun. » Marx et Engels, Critique des programmes de Gotha et d’Erfurt, Éditions sociales, 1981. Ibid., p. 154. Ibid., p. 32. Principes d’une critique de l’économie
, op. cit., p. 311. Ibid., p. 308. Le Capital, livre III, Conclusion, in ƒuvres, Économie, tome II, op. cit., p. 1487. A. de Laborde, De l’esprit d’association dans tous les intĂ©rĂȘts de la communautĂ©, Paris, 1818, p. 3-4, citĂ© in I. Meyerson, Le travail, fonction psychologique », art. cit. L’industrie comprend ainsi tous les genres du bien-ĂȘtre, elle rĂ©unit Ă©galement tous les moyens de l’obtenir ; tout est de son domaine et participe Ă  ses avantages. [
] On pourrait la dĂ©finir par l’intelligence, la sagacitĂ© dans le travail, la simplification dans la main-d’Ɠuvre, la hardiesse dans les entreprises, le gĂ©nie d’utilitĂ© de la sociĂ©tĂ© », ibid., p. 5. Ibid., p. 9. L’obligation est imposĂ©e Ă  chacun de donner constamment Ă  ses forces personnelles une direction utile Ă  l’humanitĂ©. Les bras du pauvre continueront Ă  nourrir le riche, mais le riche reçoit commandement de faire travailler sa cervelle et si sa cervelle n’est pas propre au travail, il sera bien obligĂ© de faire travailler ses bras », Saint-Simon, Lettres d’un habitant de GenĂšve Ă  ses contemporains, Pereire, 1925, p. 41, citĂ© in J. Dautry, La notion de travail chez Saint-Simon et Fourier », Journal de psychologie
, op. cit., 1955, p. 64. Saint-Simon, Introduction aux travaux scientifiques du xixe siĂšcle, citĂ© in J. Dautry, art. cit., p. 65. Ibid., p. 67. Le travail est d’ordre moral et humain, donnĂ© dans la conscience, avant mĂȘme que la nĂ©cessitĂ© l’impose. En consĂ©quence, il est libre de sa nature, d’une libertĂ© positive et intĂ©rieure, et c’est en raison de cette libertĂ© intĂ©rieure qu’il a le droit de revendiquer sa libertĂ© extĂ©rieure, en d’autres termes, la destruction de tous les empĂȘchements, obstacles et entraves que peuvent lui susciter le gouvernement et le privilĂšge », Ă©crit Proudhon in ƒuvres complĂštes, BouglĂ©-Moysset, 1932, tome VIII, 3, p. 89, citĂ© in I. Meyerson, Le travail, fonction psychologique », art. cit., p. 90. Que Proudhon ait beaucoup Ă©tudiĂ© ou non Hegel, en particulier par l’intermĂ©diaire de GrĂŒn voir P. Haubtmann, Proudhon, Marx et la pensĂ©e allemande, PUG, 1981, p. 59 et suivantes, le rĂ©sultat est que les deux penseurs tiennent Ă  peu prĂšs le mĂȘme discours, ou du moins que le schĂšme du travail de l’Esprit chez Hegel est dĂ©sormais Ă©galement celui de Proudhon L’intelligence humaine fait son dĂ©but dans la spontanĂ©itĂ© de son industrie et c’est en se contemplant elle-mĂȘme dans son Ɠuvre qu’elle se trouve » I. Meyerson, art. cit., p. 11. L’homme, crĂ©ateur Ă  travers le travail Le travail, un et identique dans son plan, est infini dans ses applications, comme la crĂ©ation elle-mĂȘme », dĂ©tient ainsi un pouvoir presque magique de transfiguration du monde, dans quoi il trouve son bonheur Je me demande pourquoi la vie entiĂšre du travailleur ne serait pas une rĂ©jouissance perpĂ©tuelle, une procession triomphale. » Marx a insistĂ© Ă  de nombreuses reprises, en bon Ă©lĂšve de Hegel, sur le caractĂšre Ă  la fois nĂ©gatif et positif du travail abstrait moderne La dissolution de tous les produits et de toutes les activitĂ©s en valeurs d’échange suppose la dĂ©composition de tous les rapports de dĂ©pendance personnels figĂ©s historiques au sein de la production [
] Dans la valeur d’échange, la relation sociale des personnes entre elles est transformĂ©e en un rapport social des choses, le pouvoir des personnes en un pouvoir des choses
 », Principes d’une critique de l’économie
, op. cit., p. 208-209. Ces trois passions mĂ©canisantes doivent ĂȘtre convenablement mĂ©langĂ©es pour former des sĂ©ries Ă©quilibrĂ©es. La papillonne, c’est le besoin de variĂ©tĂ© pĂ©riodique, situations contrastĂ©es, incidents piquants
 La cabaliste est la manie de l’intrigue. La composite, la plus romantique des passions, crĂ©e les accords d’enthousiasme cf. chapitre v. C’est Ă  condition de savoir bien combiner ces passions que le travail pourra devenir attrayant. C. Fourier, Le Nouveau Monde industriel et sociĂ©taire ou invention du procĂ©dĂ© d’industrie attrayante et naturelle distribuĂ©e en sĂ©ries passionnĂ©es, Flammarion, 1973. Ibid., p. 37. Sur ces Ă©volutions majeures, voir H. Hatzfeld, Du paupĂ©risme Ă  la SĂ©curitĂ© sociale, PUN, 1989, et A. Soboul, ProblĂšmes de travail en l’an II », Journal de psychologie
, op. cit., 1955, p. 39-58. Voir Ă©galement F. Tanghe, Le Droit au travail entre histoire et utopie, 1789-1848-1989 de la rĂ©pression de la mendicitĂ© Ă  l’allocation universelle, Publications Fac. univ. St-Louis, 1989. Voir, du mĂȘme auteur, Le droit du travail en 1848 », in Le Droit au travail, Institut des sciences du travail, dossier no 13, UniversitĂ© catholique de Louvain, novembre 1991. Turgot, citĂ© par Tanghe, op. cit., p. 47. Rapport sur l’organisation gĂ©nĂ©rale des secours publics, prĂ©sentĂ© Ă  l’AssemblĂ©e nationale le 13 juin 1792, BibliothĂšque nationale, p. 9. L. Blanc, citĂ© par Tanghe, op. cit., p. 61. Le droit considĂ©rĂ© de façon abstraite est ce qui, depuis 1789, tient le peuple abusĂ©. [
] Le droit, stĂ©rilement et pompeusement proclamĂ© dans les chartes, n’a servi qu’à masquer ce que l’inauguration d’un rĂ©gime individualiste avait d’injuste », ibid., p. 64. Par le droit au travail, on crĂ©e en mĂȘme temps un droit et une obligation. On suppose un contrat entre l’individu et la sociĂ©tĂ©, aux termes duquel la sociĂ©tĂ© devrait l’existence Ă  chacun de ses membres, contrat non synallagmatique et qui n’engagerait qu’une des parties », L. Faucher, in J. Garnier Ă©d., Le Droit au travail Ă  l’AssemblĂ©e nationale, Recueil complet de tous les discours prononcĂ©s dans cette mĂ©morable discussion, Paris, Guillaumin, 1848, p. 344-345. Tandis que l’État devrait fournir aux individus, sur leur demande, les moyens de travailler, il ne serait pas armĂ© du pouvoir de les contraindre Ă  chercher dans le travail leur subsistance habituelle. On proclamerait ainsi la supĂ©rioritĂ© de la force, du droit personnel sur le droit social. L’individu deviendrait le maĂźtre, le tyran, et la sociĂ©tĂ©, le serviteur, l’esclave. [
] Le droit au travail est une servitude que l’on impose Ă  la communautĂ© tout entiĂšre, dans l’intĂ©rĂȘt de quelques-uns », ibid. Ibid., p. 345-346. Lamartine, ibid., p. 286-287. L. Faucher, ibid., p. 350 ; L. Wolowski, ibid., p. 360. Cette ligne sĂ©pare les anciens tenants du travail-nĂ©cessitĂ©, conçu comme moyen de subvenir aux besoins, de ceux qui ont dĂ©jĂ  assimilĂ© l’idĂ©e que le travail est la plus haute maniĂšre pour un individu de se rĂ©aliser. Le premier droit de l’homme est le droit de vivre. Ce droit en implique un autre, celui de l’entier dĂ©veloppement et du complet exercice des facultĂ©s physiques, morales et intellectuelles de l’homme ; c’est ce droit qui constitue la libertĂ© », Manifeste des sociĂ©tĂ©s secrĂštes, in 1848 la rĂ©volution dĂ©mocratique et sociale, Éditions d’histoire sociale, 1984. L. Wolowski, in J. Garnier Ă©d., Le Droit au travail Ă  l’AssemblĂ©e
, op. cit., p. 365. Proudhon, MĂ©moires sur la propriĂ©tĂ©, Premier mĂ©moire, p. 215-217, in ƒuvres complĂštes, Nouvelle Édition RiviĂšre. Ibid. L. Blanc, Le Socialisme, Droit au travail. RĂ©ponse Ă  M. Thiers, Paris, Bureau du Nouveau monde, 1849, p. 45-46. CitĂ© par HumilliĂšre, Louis Blanc, Les Éditions ouvriĂšres, 1982, p. 75. Habermas, La crise de l’État-providence », in Écrits politiques, Culture, droit, histoire, Cerf, 1990, p. 109-110. Cette phrase doit ĂȘtre replacĂ©e dans son contexte Habermas Ă©crit quelques lignes plus haut Quant aux Ă©nergies utopiques, elles ne se sont pas absolument retirĂ©es de la conscience historique. C’est bien plutĂŽt une certaine utopie qui est arrivĂ©e Ă  sa fin, celle qui dans le passĂ© s’était cristallisĂ©e autour du potentiel qui rĂ©sidait dans la sociĂ©tĂ© du travail. » Chapitre V. Acte III De la libĂ©ration du travail au plein emploi Pour les horaires et les conditions de travail, voir les trĂšs nombreux rapports officiels et enquĂȘtes de l’époque, en particulier celle du Dr VillermĂ©, citĂ© in Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit. ; Engels, La Situation de la classe laborieuse en Angleterre, Éditions sociales, 1975 ; voir Ă©galement J. Le Goff, Du silence Ă  la parole, Calligrammes-La Digitale, 1985. En cela, le xixe siĂšcle socialiste est trĂšs ricardien. Dans Des principes de l’économie politique et de l’impĂŽt, GF-Flammarion, 1993, Ricardo Ă©crit, dĂšs le chapitre i, que la valeur d’une marchandise dĂ©pend de la quantitĂ© relative de travail nĂ©cessaire Ă  sa production ». Un grand nombre de socialistes reprendront ces thĂšses pour revendiquer en particulier que tout le revenu issu de la production revienne aux travailleurs. Ce vocabulaire religieux il s’agit de l’opĂ©ration par laquelle le pain et le vin se transforment en corps et sang de JĂ©sus-Christ, dans la liturgie catholique est assez bien adaptĂ© ici, nous semble-t-il. La Ire Internationale ou Association internationale des travailleurs a Ă©tĂ© fondĂ©e Ă  Londres en 1864. On en trouvera les statuts dans La Critique des programmes de Gotha et d’Erfurt, op. cit. La IIe Internationale rassemble des courants et des partis trĂšs divers, marxistes, libertaires, syndicalistes, proudhoniens. Le programme d’Eisenach, marxiste 1869, est celui du Parti ouvrier social-dĂ©mocrate Le Parti ouvrier social-dĂ©mocrate poursuit l’établissement de l’État populaire libre. » E. Bernstein 1850-1932 adhĂšre en 1872 Ă  l’Internationale ouvriĂšre. ExilĂ© en Suisse Ă  cause des lois antisocialistes, il dirige avec Kautsky le Sozial Democrat et adhĂšre au marxisme. À Londres, il devient le secrĂ©taire d’Engels. En 1899, il Ă©crit Socialisme thĂ©orique et social-dĂ©mocratie pratique. E. Bernstein, Les PrĂ©supposĂ©s du socialisme, Seuil, 1974. Seule exception Ă  cet unanimisme, la critique radicale de Lafargue, marxiste et guesdiste farouche, en 1883, dans Le Droit Ă  la paresse, rĂ©futation du droit au travail de 1848 ; mais elle n’est pas reprĂ©sentative de la pensĂ©e marxiste ni de la pensĂ©e sociale-dĂ©mocrate. Lafargue ouvre ainsi son ouvrage Une Ă©trange folie possĂšde les classes ouvriĂšres des nations oĂč rĂšgne la civilisation capitaliste. Cette folie traĂźne Ă  sa suite des misĂšres individuelles et sociales qui, depuis deux siĂšcles, torturent la triste humanitĂ©. Cette folie est l’amour du travail, la passion moribonde du travail, poussĂ©e jusqu’à l’épuisement des forces vitales de l’individu et de sa progĂ©niture. Au lieu de rĂ©agir contre cette aberration mentale, les prĂȘtres, les Ă©conomistes, les moralistes, ont sacro-sanctifiĂ© le travail », Le Droit Ă  la paresse, Climats, 1992, p. 17. Sur la mise en place des lois de protection sociale et les rapports de celle-ci avec le travail, voir Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit., p. 255-490. Le socialisme vulgaire a hĂ©ritĂ© des Ă©conomistes bourgeois l’habitude de considĂ©rer et de traiter la rĂ©partition comme une chose indĂ©pendante du mode de production et de reprĂ©senter pour cette raison le socialisme comme tournant essentiellement autour de la rĂ©partition », Marx et Engels, Critique des programmes de Gotha et d’Erfurt, op. cit., p. 33. Il s’agit lĂ  d’une configuration totalement aliĂ©nĂ©e, dans le schĂ©ma marxien par exemple le travail n’est pas voulu pour lui-mĂȘme, mais pour autre chose. En particulier au travers du vote des premiĂšres lois sociales, cf. Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit. Habermas, La crise de l’État-providence », in Écrits politiques, op. cit., p. 113. Il lui faut intervenir dans le systĂšme Ă©conomique en ayant en vue, tout Ă  la fois, d’entretenir la croissance capitaliste, d’aplanir les crises, mais aussi de garantir non seulement les emplois, mais encore la compĂ©titivitĂ© internationale des entreprises, de sorte que des surplus soient dĂ©gagĂ©s qui puissent ĂȘtre redistribuĂ©s, sans que soient dĂ©couragĂ©s les investisseurs privĂ©s. [
] Il faut pour accĂ©der au compromis que suppose l’État-social, et pour parvenir Ă  la pacification de l’antagonisme de classe, que le pouvoir d’État, lĂ©gitimĂ© dĂ©mocratiquement, se constitue en prĂ©servateur et en dompteur du processus “naturel” de croissance du capitalisme », ibid., p. 112. Chapitre VI. L’utopie du travail libĂ©rĂ© Les nouvelles valeurs et la notion d’accomplissement ; rĂ©flexion de philosophie sociale sur l’avenir du travail et des loisirs », H. Lenk, OCDE, in Forum de l’OCDE sur l’avenir, 1994. D. MothĂ©, Le mythe du temps libĂ©rĂ© », Esprit, no 204, 1994. P. Boisard, Partage du travail les piĂšges d’une idĂ©e simple », Esprit, no 204, 1994. D. MothĂ©, Le mythe du temps libĂ©rĂ© », art. cit. Le technicien, le chercheur, l’universitaire, le charpentier peuvent procĂ©der Ă  des calculs pendant leur temps de loisir, sur la plage, dans leur lit. Ils peuvent travailler dans n’importe quel lieu. Que peut faire la diminution du temps lĂ©gal de travail sur ces activitĂ©s intellectuelles invisibles ? », D. MothĂ©, ibid. Elles sont aujourd’hui trĂšs peu nombreuses Ă  part quelques sondages, on dispose des enquĂȘtes du CREDOC sur les aspirations des Français. Cette enquĂȘte annuelle n’analyse nĂ©anmoins pas les reprĂ©sentations en tant que telles. On dispose Ă©galement de quelques enquĂȘtes citĂ©es in H. Riffault, Les Valeurs des Français, PUF, 1994, chapitre sur le travail, ou in Lenk, Forum de l’OCDE, op. cit. Mais les reprĂ©sentations le travail est-il considĂ©rĂ© comme Ă©panouissant ? contraignant ? pourquoi ? en tant que telles sont mal connues. Voir, par une entrĂ©e diffĂ©rente, Souffrances et prĂ©caritĂ©s au travail. Paroles de mĂ©decins du travail, Syros, 1994. Weber, Histoire Ă©conomique
, op. cit., Gallimard, 1991, p. 296 Une exploitation capitaliste rationnelle est une exploitation dotĂ©e d’un compte de capital, c’est-Ă -dire une entreprise lucrative qui contrĂŽle sa rentabilitĂ© de maniĂšre chiffrĂ©e au moyen de la comptabilitĂ© moderne et de l’établissement d’un bilan. » Weber renoue ainsi avec ce qu’il avait dĂ©montrĂ© dans L’Éthique protestante et l’esprit du capitalisme. Il cite B. Franklin cf. Acte I Tiens un compte exact de tes dĂ©penses et de tes revenus », et ajoute que l’esprit du capitalisme fait Ă  chacun un devoir d’augmenter son capital, ceci Ă©tant supposĂ© une fin en soi, p. 46-47. Histoire Ă©conomique
, op. cit., p. 297. K. Polanyi, La Grande Transformation, op. cit., p. 107. Polanyi nous permet de nous Ă©tonner Ă  nouveau devant ce qui aujourd’hui ne provoque plus l’étonnement. Il Ă©crit par exemple p. 70 En fait, la production mĂ©canique, dans une sociĂ©tĂ© commerciale, suppose tout bonnement la transformation de la substance naturelle et humaine de la sociĂ©tĂ© en marchandises. » En particulier, RĂ©flexions sur les causes de la libertĂ© et de l’oppression sociale, Gallimard, coll. IdĂ©es », 1955, et La Condition ouvriĂšre, Gallimard, coll. Espoir », 1951. G. Friedmann, OĂč va le travail humain ?, Gallimard, coll. IdĂ©es », 1978. T. Di Ciaula, Tuta blu bleu de travail, Federop et Actes Sud, 1982. S. Weil, La Condition ouvriĂšre, op. cit. Trois lettres Ă  Mme Albertine ThĂ©venon, 1934-1935, p. 18-19. S. Weil, RĂ©flexions
, op. cit., p. 13. Simone Weil fait certainement allusion aux Principes d’une critique de l’économie politique, op. cit., oĂč Marx explique que la tendance Ă  crĂ©er un marchĂ© mondial est incluse dans le concept mĂȘme de capital », p. 258 et suivantes. Cf. Camerlynck, Le Contrat de travail, op. cit., p. 52. A. Supiot, Critique du droit
, op. cit., p. 98. Cette contradiction entre autonomie de la volontĂ© et subordination de la volontĂ© aboutit Ă  ce que le salariĂ© est Ă  la fois apprĂ©hendĂ© dans l’entreprise comme sujet et comme objet du contrat », ibid., p. 123. Pour l’analyse du droit collectif, voir chapitre iii, particuliĂšrement p. 133 et suivantes. On lira la passionnante analyse de Camerlynck, in Le Contrat de travail, op. cit., qui explique comment P. Durand et une tradition française institutionnaliste ont tentĂ© d’introduire la conception allemande, p. 14-27. Voir Ă©galement chapitre vii du prĂ©sent ouvrage. A. Supiot, Critique du droit
, op. cit., p. 165. Que penser par ailleurs de cette affirmation Comme le travailleur indĂ©pendant, le salariĂ© a le droit d’arbitrer entre les pĂ©riodes qu’il consacre Ă  sa vie de travail et celles qu’il consacre Ă  sa formation ou sa vie sociale, il est juge du danger que prĂ©sente une situation de travail, il peut jouir d’une rĂ©elle libertĂ© dans l’accomplissement de la tĂąche pour laquelle on le paie
 », ibid., p. 169 ? Qui peut se reconnaĂźtre dans ces lignes aujourd’hui ? Le statut s’oppose au contrat le statut est ce qui dĂ©termine les droits et obligations des personnes concernĂ©es par celui-ci par exemple statut des fonctionnaires, statut des directeurs d’hĂŽpitaux
. A. Supiot Ă©crit que cette relation prĂ©tendument Ă©galitaire entre employeurs et salariĂ©s est [
] manifestement inĂ©galitaire », mais que l’édification du droit français peut se lire tout entiĂšre comme une tentative d’englobement du principe d’égalitĂ© concrĂšte dans un cadre juridique dominĂ© par le principe d’égalitĂ© formelle ». Donc subordination ne signifie pas inĂ©galité  Critique du droit
, op. cit., p. 133-136. A. Supiot se rĂ©fĂšre Ă  L. Dumont pour cette dĂ©monstration
 La derniĂšre forme de servitude que prend l’activitĂ© humaine – travail salariĂ© d’un cĂŽtĂ© et capital de l’autre
 », Principes d’une critique de l’économie
, op. cit., p. 272. Le recrutement des forces de travail pour la nouvelle forme de production telle qu’elle se dĂ©veloppe en Angleterre Ă  partir du xviiie siĂšcle [
] s’effectue d’abord par des moyens coercitifs trĂšs incisifs [
] L’expropriation des petits paysans dĂ©pendants par de plus gros fermiers a contribuĂ© Ă  [
] crĂ©er en excĂ©dent une population qui tombait sous le coup du travail forcĂ©. Quiconque ne se rendait pas spontanĂ©ment Ă©tait expĂ©diĂ© dans un Ă©tablissement de travail oĂč rĂ©gnait une discipline de fer ; celui qui quittait son emploi sans un certificat Ă  dĂ©charge dĂ©livrĂ© par le maĂźtre Ă©tait susceptible d’ĂȘtre considĂ©rĂ© comme vagabond ; aucun appui n’était accordĂ© au chĂŽmeur, autre que sous la ferme contrainte de devoir se rendre dans un Ă©tablissement de travail », Weber, Histoire Ă©conomique
, op. cit., p. 326. La Grande Transformation, op. cit., passim dans les chapitres vi, vii et viii ; cf. surtout le rĂŽle de la faim dans le chapitre x et dans le chapitre xiv Le dernier stade a Ă©tĂ© atteint avec l’application de “la sanction naturelle”, la faim. Pour pouvoir la dĂ©clencher, il Ă©tait nĂ©cessaire de liquider la sociĂ©tĂ© organique, qui refusait de laisser l’individu mourir de faim », p. 222. Voir les deux ouvrages citĂ©s. Dans La Condition ouvriĂšre, Simone Weil parle de ses camarades d’esclavage » p. 159, Lettre Ă  un ingĂ©nieur directeur d’usine », juin 1936. Voir Ă©galement ce qu’elle dit de l’oppression sociale Cette contrainte inĂ©vitable ne mĂ©rite d’ĂȘtre nommĂ©e oppression que dans la mesure oĂč, du fait qu’elle provoque une sĂ©paration entre ceux qui l’exercent et ceux qui la subissent, elle met les seconds Ă  discrĂ©tion des premiers et fait ainsi peser jusqu’à l’écrasement physique et moral la pression de ceux qui commandent sur ceux qui exĂ©cutent », RĂ©flexions
, op. cit., p. 39. Cf. aussi p. 77, 83, 129, 139, 143. RĂ©flexions
, op. cit., p. 79. Habermas, La crise de l’État-providence », in op. cit., p. 113. Hannah Arendt, Condition de l’homme moderne, op. cit. Ibid., Prologue, p. 37. Heidegger, Contribution Ă  la question de l’Être », in Questions I, Gallimard, 1982. E. JĂŒnger, Le Travailleur, Christian Bourgois, 1993. Contribution
 », op. cit., p. 206. Ibid., p. 217. C’est l’un des grands messages » de la philosophie heideggerienne. Sur ce point, voir La question de la technique », in Essais et ConfĂ©rences, Gallimard, 1973. M. Heidegger interrogĂ© par le journal Der Spiegel, in RĂ©ponses et questions sur l’histoire et la politique, Mercure de France, 1988, p. 44 et 50. Heidegger, La question de la technique », op. cit., p. 20. Heidegger, Lettre sur l’humanisme, op. cit. Entretien avec Der Spiegel, op. cit., p. 61. M. Horkheimer, Th. Adorno, La Dialectique de la raison, Gallimard, coll. Tel », 1983. Ibid., Introduction, p. 13. Le vĂ©ritable titre du livre est d’ailleurs Dialectique de l’AufklĂ€rung Ibid., p. 23. Ibid., p. 27. Ibid. Ibid., p. 38. Simone Weil ne dit pas autre chose Il semble que l’homme ne puisse parvenir Ă  allĂ©ger le joug des nĂ©cessitĂ©s naturelles sans alourdir d’autant celui de l’oppression sociale, comme par le jeu d’un mystĂ©rieux Ă©quilibre », RĂ©flexions
, op. cit., p. 77. Horkheimer, Adorno, Dialectique
, op. cit., p. 44. À l’époque actuelle [
], ce n’est pas dans les sciences de la nature, fondĂ©es sur les mathĂ©matiques prĂ©sentĂ©es comme Logos Ă©ternel, que l’homme peut apprendre Ă  se connaĂźtre lui-mĂȘme, c’est dans une thĂ©orie critique de la sociĂ©tĂ© telle qu’elle est, inspirĂ©e et dominĂ©e par le souci d’établir un ordre conforme Ă  la raison », in Horkheimer, ThĂ©orie critique, Payot, 1978. Marx, L’IdĂ©ologie allemande, citĂ© et traduit par Habermas in La crise de l’État-providence », Écrits politiques
, op. cit., p. 110. A. Gorz, Adieux au prolĂ©tariat, GalilĂ©e, 1980, et, plus rĂ©cemment, MĂ©tamorphoses du travail
, op. cit. Simone Weil l’avait parfaitement compris et c’est pour cette raison qu’elle reprenait Ă  son compte la critique marxienne tout en refusant ses consĂ©quences, trop optimistes Ă  son goĂ»t La complĂšte subordination de l’ouvrier Ă  l’entreprise et Ă  ceux qui la dirigent repose sur la structure de l’usine et non sur le rĂ©gime de la propriĂ©tĂ© », in Simone Weil, RĂ©flexions
, op. cit., p. 16. Habermas, La crise de l’État-providence », in Écrits politiques
, op. cit., p. 110. L’une et l’autre ouvrent en effet leur principal ouvrage sur le travail RĂ©flexions
, op. cit., et Condition de l’homme moderne, op. cit. par une critique de Marx. Les livres d’Y. Schwarz et Y. Clot en particulier, donnent parfois l’impression d’une sorte de renouveau de la pensĂ©e stoĂŻcienne. Une partie de leur dĂ©monstration consiste en effet Ă  montrer comment, dans l’acte le plus contraint et le plus dĂ©terminĂ©, une part Ă©vidente de libertĂ© et de crĂ©ativitĂ© subsiste dans l’acte de travail, disent-ils, sont convoquĂ©s les traditions, les savoir-faire, mais aussi toute l’habiletĂ© personnelle de chaque travailleur. Dans le travail se dĂ©termine donc une approche particuliĂšrement riche d’ouverture au monde et aux autres. Ce qui est mis en Ă©vidence par ces auteurs, c’est donc la nĂ©cessitĂ© de l’initiative du sujet humain Ă  la source de toute formalisation. Mais en disant que dans l’acte le plus dĂ©terminĂ©, c’est-Ă -dire mĂȘme au cƓur du pire taylorisme, le sujet garde sa crĂ©ativitĂ©, ne risque-t-on pas, d’une certaine maniĂšre, de justifier celui-ci ? Pour Gorz, la libĂ©ration du travail ne peut rĂ©sider que dans la libĂ©ration de l’industrialisme, dans l’alternative Ă©thique radicale du capitalisme. Redonner son sens au travail signifie pour Gorz chercher du sens dans le non-travail. [
] Mais comment Gorz peut-il ne pas comprendre que c’est Ă  partir de la profondeur de l’insertion de la force de travail dans le capital que tout futur prendra forme [
] et qu’il vaut mieux rester sur le terrain que nous offre le marxisme celui de la critique du travail ? [
] Ne faut-il pas lutter contre l’hĂ©tĂ©ronomie du travail et utiliser cette lutte comme instrument contre l’autonomie du capital ? », Vincent, T. Negri, Paradoxes autour du travail », Futur antĂ©rieur, no 10, p. 6-8. H. Kern, M. Schumann, La Fin de la division du travail ? La rationalisation dans la production industrielle, Éd. de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 1989 Jusqu’à prĂ©sent, toutes les formes que prenait la rationalisation capitaliste reposaient sur un principe de base qui concevait le travail vivant comme une barriĂšre s’opposant Ă  la production. [
] Le credo des nouveaux modĂšles de production devient maintenant la qualification et la maĂźtrise professionnelle de l’ouvrier constituent des capacitĂ©s productives qu’il s’agit d’utiliser de maniĂšre accrue », p. 8-9. C’est la grande critique de Hannah Arendt Dans une humanitĂ© complĂštement socialisĂ©e, qui n’aurait d’autre but que d’entretenir le processus vital – et c’est l’idĂ©al nullement utopique, hĂ©las ! qui guide les thĂ©ories de Marx – il ne resterait aucune distinction entre travail et Ɠuvre ; toute Ɠuvre serait devenue travail », Condition
, op. cit., p. 134. Chapitre VII. Le travail, lien social ? On se souvient de l’image qu’emploie Marx dans les Manuscrits de 44 Nos productions seraient autant de miroirs oĂč nos ĂȘtres rayonneraient l’un vers l’autre. » La Monadologie est l’Ɠuvre maĂźtresse de Leibniz. Pour celui-ci, le monde est composĂ© de monades qui s’expriment les unes les autres Ă  l’infini si l’on dĂ©roule chaque monade, pourtant totalement diffĂ©rente de toutes les autres, on trouve le monde entier. C’est en quelque sorte l’unicitĂ© de son point de vue, la maniĂšre unique dont elle exprime toute les autres qui fait la singularitĂ© de chacune. Aristote, Les Économiques, I, 1343a, Vrin, 1993 L’Économique et la Politique diffĂšrent non seulement dans la mesure oĂč diffĂšrent elles-mĂȘmes une sociĂ©tĂ© domestique et une citĂ© car ce sont lĂ  les objets respectifs de ces disciplines, mais encore en ce que la Politique est l’art du gouvernement de plusieurs et l’Économique celui de l’administration d’un seul. » La polis se distinguait de la famille en ce qu’elle ne connaissait que des Ă©gaux, tandis que la famille Ă©tait le siĂšge de la plus rigoureuse inĂ©galitĂ© », Hannah Arendt, Condition de l’homme moderne, op. cit., p. 70. Concernant cette analyse, voir Hannah Arendt, ibid. Tel est, Ă©tymologiquement, le sens d’ Ă©conomie » l’administration du domaine. Hannah Arendt, Condition
, op. cit., p. 66. Hannah Arendt Ă©crit aussi p. 71 Depuis l’accession de la sociĂ©tĂ©, autrement dit du mĂ©nage oikia ou des activitĂ©s Ă©conomiques, au domaine public, l’économie et tous les problĂšmes relevant jadis de la sphĂšre familiale sont devenus des prĂ©occupations “collectives”. » Hegel, SystĂšme de la vie Ă©thique, Payot, 1976. Voir les ouvrages de P. Chamley citĂ©s dans le chapitre iv dont Économie politique et philosophie chez Steuart et Hegel, op. cit. Hegel, Principes de la philosophie du droit, op. cit., § 183. Ibid., § 258. Le Droit naturel, Gallimard, coll. IdĂ©es », 1972. Habermas, Travail et interaction, Remarques sur la philosophie de l’esprit de Hegel Ă  Iena », in La Technique et la science comme idĂ©ologie », DenoĂ«l, 1973. Voir aussi Connaissance et intĂ©rĂȘt, op. cit., chapitre ii, et AprĂšs Marx, Fayard, 1985. Voir par exemple les ouvrages de R. Sainsaulieu dĂ©jĂ  citĂ©s ou le plus rĂ©cent ouvrage de C. Dubar, La Socialisation, op. cit. E. Durkheim, La Division sociale du travail, PUF, coll. Quadrige », 1991. A. Supiot, Critique du droit
, op. cit., p. 31. Voir les nombreuses Ă©tudes de B. Reynaud, en particulier Le Salaire, la RĂšgle, et le MarchĂ©, Christian Bourgois, 1991, et ThĂ©orie des salaires, La DĂ©couverte, 1993. Il s’agit de l’agrĂ©ment ou du dĂ©sagrĂ©ment des emplois en eux-mĂȘmes, de la facilitĂ© avec laquelle on peut les apprendre ou de la difficultĂ© et de la dĂ©pense qu’ils exigent pour cela, de l’occupation constante qu’ils procurent ou des interruptions auxquelles ils sont exposĂ©s, du plus ou moins de confiance dont il faut que soient investis ceux qui les exercent, et enfin de la probabilitĂ© ou de l’improbabilitĂ© d’y rĂ©ussir. Voir Smith, Recherches
, op. cit., chapitre x, section I. Sur ces points, voir Hatzfeld, op. cit., et Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit. Ibid. L’entreprise est en passe de prendre rang parmi les grandes institutions de notre Ă©poque, aprĂšs l’Église, l’ArmĂ©e, la justice, l’École, la commune, l’UniversitĂ© », Ă©crit R. Sainsaulieu dir. in L’Entreprise, une affaire de sociĂ©tĂ©, Presses de la FNSP, 1990. Cf. D. Flouzat, Économie contemporaine, PUF, 1981, p. 148 L’entreprise apparaĂźt ainsi comme un processus qui consomme certains facteurs de production terre, capital, travail pour les transformer en produits vendables. » L’idĂ©e est que le travail humain n’est pas qu’un coĂ»t et que le travail peut constituer un apport de productivitĂ© majeur la formation, la qualification, la motivation, la confiance constituent des atouts majeurs pour l’entreprise et une source d’augmentation de la productivitĂ©. On remarquera d’ailleurs le paradoxe qui consiste Ă  ne prendre en considĂ©ration le travail humain que lorsqu’il est traitĂ© comme du capital
 Ainsi se rĂ©aliserait, d’une maniĂšre dĂ©tournĂ©e, la prĂ©diction de Marx, pour qui le destin du capitalisme est que tout travail devienne du capital. Voir Principes d’une critique de l’économie
, op. cit., le chapitre intitulĂ© Le travailleur devant l’automation ». Marx Ă©crit en particulier Ainsi, toutes les forces du travail sont transposĂ©es en forces du capital. » ConformĂ©ment Ă  la thĂ©orie contractuelle de l’entreprise Par contrat, le propriĂ©taire se procure la main-d’Ɠuvre dont il a besoin. Dans les limites fixĂ©es par le droit du travail, le chef dirige comme il l’entend », Ă©crit P. Sudreau, in La RĂ©forme de l’entreprise, La Documentation française, 1975. L’entreprise n’est que la somme des contrats individuels de travail. Cf. H. Bartoli, Science Ă©conomique et travail, op. cit., p. 227 Il ne suffit pas d’établir des comitĂ©s d’entreprise pour que la participation des travailleurs Ă  la gestion des entreprises soit acquise. Trop faibles pour pouvoir limiter effectivement l’autocratie patronale et technocratique, n’ayant pratiquement pas de pouvoir de dĂ©cision en matiĂšre Ă©conomique, soumis Ă  trop de manƓuvres de la part des conseils d’administration, mal informĂ©s de la marche de l’entreprise, les comitĂ©s d’entreprise se sont rĂ©vĂ©lĂ©s incapables de modifier la nature de l’entreprise. Elle est demeurĂ©e de style et de procĂ©dĂ© capitalistes. [
] Les comitĂ©s d’entreprise ne pouvaient pas devenir les organes d’une vraie dĂ©mocratie industrielle. » Voir le rapport Bruhnes, Choisir l’emploi, Commissariat gĂ©nĂ©ral du Plan, La Documentation française, 1993. H. Bartoli, Science Ă©conomique et travail, op. cit., p. 54. Il ajoute Maintes fois il a Ă©tĂ© dit que l’appropriation privĂ©e des moyens de production constitue l’un des moyens indispensables Ă  la dĂ©fense des valeurs de la propriĂ©tĂ© personnelle. Longtemps on a jugĂ© prĂ©fĂ©rable l’appropriation privĂ©e, parce que, disait-on, elle stimule l’ardeur au travail, garantit l’ordre social, pousse l’homme Ă  mieux comprendre l’excellence de l’état social et Ă  s’y dĂ©vouer. [
] Dans le capitalisme, ces justifications s’estompent. [
] Ce n’est pas le corporatisme, simple masque au rĂ©gime de l’argent, qui se trouve appelĂ© par l’exigence d’une gestion commune des moyens de production, mais bien une Ă©conomie du travail. [
] Le droit Ă  la libertĂ© du travail est le droit de travailler dans une Ă©conomie dotĂ©e d’organisations juridiques positives, celles que requiert le droit naturel du travail humain, non le droit d’Ɠuvrer dans une Ă©conomie anarchique, sans lois, sans institutions sociales. Le droit du travail est un droit social. La libertĂ© du travail dont parlent les libĂ©raux n’en est que la caricature. » P. Durand, citĂ© par Camerlynck, in Le Contrat de travail, op. cit., p. 17. A. Supiot, Critique du droit, op. cit., p. 16. Voir chapitre ix. Privatrecht, volume I, 1895, p. 116-117. Sur Gierke, voir L. Dumont, Essais sur l’individualisme, op. cit., et G. Gurvitch, L’IdĂ©e du droit social, notion et systĂšme du droit social, Sirey, 1932. A. Supiot, Critique du droit, op. cit., p. 18. Camerlynck, Le Contrat de travail, op. cit., p. 17. Le contrat de travail lui-mĂȘme, qu’on nous prĂ©sente comme le fait juridique primaire et irrĂ©ductible, n’est qu’un fait secondaire et dĂ©rivĂ©. À y regarder de prĂšs en effet, il implique, outre un commencement de division du travail, une organisation sociale relativement complexe et suffisamment stable pour que des individus puissent envisager en sĂ©curitĂ© l’avenir dans un acte de prĂ©vision. [
] À cĂŽtĂ© des contrats, oĂč les ouvriers interviennent comme parties, il y a l’institution organique dont ils deviennent membres membres solidaires dont la collaboration active et intelligente Ă  une Ɠuvre commune et la soumission Ă  une mĂȘme discipline font de vĂ©ritables associĂ©s », ThĂšse de E. Gounot, Lyon, 1910, citĂ©e par Camerlynck, in Le Contrat de travail, op. cit., p. 15. Camerlynck, Rapport de synthĂšse Ă©tabli pour le compte de la CECA, 1964, p. 147. Il est certes normal d’insister sur le caractĂšre personnel du lien obligatoire, sur l’intuitus personae qui prĂ©side parfois Ă  la formation de ce lien et sur certaines obligations accessoires en dĂ©coulant. Mais le vinculum juris reste essentiellement un lien d’obligation traditionnel, tel qu’on le rencontre dans les contrats d’échange », ibid. Ibid., p. 148. Voir le chapitre ix. Chapitre VIII. Critique de l’économie Depuis que l’économie politique est devenue la simple exposition des lois qui prĂ©sident Ă  l’économie des sociĂ©tĂ©s, les vĂ©ritables hommes d’État ont compris que son Ă©tude ne pouvait leur ĂȘtre indiffĂ©rente. On a Ă©tĂ© obligĂ© de consulter cette science pour prĂ©voir les suites d’une opĂ©ration, comme on consulte les lois de la dynamique et de l’hydraulique, lorsqu’on veut construire avec succĂšs un pont ou une Ă©cluse », citĂ© par F. Fourquet, Richesse et puissance, une gĂ©nĂ©alogie de la valeur, La DĂ©couverte, 1989, chapitre xvii, La naissance de la science Ă©conomique ». Cet ouvrage magistral analyse l’économie dans sa dimension politique » et conceptuelle. Je remercie Christine Afriat d’avoir attirĂ© mon attention sur lui. A. Cournot, TraitĂ© de l’enchaĂźnement des idĂ©es fondamentales, 1911. L. Walras, Principes d’une thĂ©orie mathĂ©matique de l’échange, mĂ©moire lu Ă  l’AcadĂ©mie des sciences morales et politiques les 16 et 23 aoĂ»t 1873. L. Walras, ÉlĂ©ments d’économie pure, Paris, F. Pichon, 1900. Ibid., p. 27. Ibid. C. LarrĂšre, L’Invention de l’économie
, op. cit. Voir le chapitre i, Droit naturel et sociabilitĂ© ». J. Bentham, An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, 1789, in The Works of Jeremy Bentham, John Browning ed., Edinburgh, W. Tait, 1838, I, i, 2, p. 1. J. Stuart Mill, Autobiography, 1873, citĂ© in M. Canto-Sperber, La Philosophie
, op. cit., p. 19. J. Stuart Mill, L’Utilitarisme, Flammarion, coll. Champs », 1993, p. 54. W. S. Jevons est considĂ©rĂ© comme l’autre grand thĂ©oricien de l’école nĂ©oclassique. Mais alors que L. Walras fait partie de l’école de Lausanne qu’il a fondĂ©e, Jevons 1835-1882 appartient Ă  l’école anglaise. Ce type d’analyse, que l’on a appelĂ© la rĂ©volution marginaliste, est appliquĂ© par les nĂ©oclassiques Ă  de trĂšs nombreux domaines. Voir les Principes d’économie politique de A. Marshall pour sa description. Marshall donne l’exemple des mĂ»res une personne cueille des mĂ»res pour les manger. Cette action lui donne du plaisir pendant un moment. Mais, aprĂšs en avoir mangĂ© une certaine quantitĂ©, le dĂ©sir diminue et la fatigue s’accroĂźt. Lorsque le dĂ©sir de se rĂ©crĂ©er et son Ă©loignement pour le travail de cueillir des mĂ»res contrebalancent le dĂ©sir de manger, l’équilibre est atteint. » L. Walras, ÉlĂ©ments d’économie pure, op. cit. L’Ɠuvre de Nietzsche n’est qu’un long dĂ©veloppement de cette idĂ©e les valeurs, Ă©crit par exemple Nietzsche, sont le rĂ©sultat de certaines perspectives d’utilitĂ© bien dĂ©finies, destinĂ©es Ă  maintenir et Ă  fortifier certaines formes de domination humaine » VolontĂ© de puissance, Gallimard, 1947, tome I, livre II, § 58, p. 218. Il n’y a pas une vĂ©ritĂ© unique que nous pourrions atteindre, mais un pluralisme des points de vue qui correspond au pluralisme foncier du monde lui-mĂȘme. On lira sur ce point J. Granier, Le ProblĂšme de la vĂ©ritĂ© dans la philosophie de Nietzsche, Seuil, 1966. Elle est composĂ©e de personnages comme C. Menger 1840-1921, E. Böhm-Bawerk 1851-1914, F. von Hayek. F. von Hayek, Scientisme et sciences sociales, Presses-Pocket, coll. Agora », 1986, p. 54. Voir en particulier Droit, lĂ©gislation, libertĂ©, oĂč cette approche est particuliĂšrement dĂ©veloppĂ©e, avec la notion des ordres construits ou fabriquĂ©s taxis et des ordres spontanĂ©s ou mĂ»ris kosmos, PUF, 1985. Walras est connu pour avoir trouvĂ© le thĂ©orĂšme de l’équilibre gĂ©nĂ©ral, c’est-Ă -dire dĂ©montrĂ© qu’il existait une solution au systĂšme d’équations reprĂ©sentant les relations d’échange sur le marchĂ© ou les marchĂ©s des produits, des facteurs de production et de la monnaie, ou encore qu’il existe un systĂšme de prix qui permet d’atteindre un Ă©tat d’équilibre stable, et donc une autorĂ©gulation de l’activitĂ© Ă©conomique. L’école de Vienne ira encore plus loin dans cette maniĂšre de considĂ©rer qu’il existe un ordre naturel il y a, profondĂ©ment inscrit dans la pensĂ©e libĂ©rale, l’idĂ©e qu’il existe un ordre naturel ; y toucher » reviendrait Ă  ouvrir la boĂźte de Pandore
 Cette idĂ©e trouve une expression presque caricaturale chez Hayek, lorsqu’il explique que jamais aucun ordre construit ne parviendra Ă  Ă©galer la prĂ©cision et la justesse de l’ordre naturel. Cf. Droit, lĂ©gislation, libertĂ©, op. cit. Comme l’écrit F. Fourquet, in Richesse et puissance, op. cit., p. 262. L’habit d’économiste revĂȘt donc un observateur comme un autre. Tous les Ă©conomistes classiques ont eu une intuition primordiale sur un ordre de prioritĂ©. Les catĂ©gories comptables ou Ă©conomiques n’ont Ă©tĂ© que les moyens intellectuels pour traduire et communiquer cette intuition dans un langage codifiĂ© d’apparence scientifique. Ce qui les conduit, c’est un critĂšre sur la nature de la bonne utilitĂ©. [
] L’idĂ©al historique opĂšre le partage entre le bon grain productif et l’ivraie improductive. » Ainsi doit-on comprendre le fait que c’est la production d’objets matĂ©riels devant ĂȘtre vendus qui est valorisĂ©e. Sur le rapport entre le concept de nation et l’économie, voir F. Fourquet, Richesse et puissance, op. cit. Il suffit de relire Malthus dĂšs le dĂ©but de sa recherche, c’est l’échange qui est au centre de la question. Il ne s’agit que de savoir si l’échange doit porter sur des objets matĂ©riels ou immatĂ©riels. Pour cela, il est nĂ©cessaire de postuler une harmonie des intĂ©rĂȘts telle que, lorsque je poursuis mon intĂ©rĂȘt, soit je poursuis en mĂȘme temps celui des autres fusion des intĂ©rĂȘts, grĂące Ă  la bienveillance, par exemple, soit le bien des autres en rĂ©sulte conformĂ©ment Ă  l’ordre naturel identitĂ© naturelle des intĂ©rĂȘts, la main invisible, soit le bien de tous en rĂ©sulte par une construction identification artificielle des intĂ©rĂȘts, cf. J. Bentham. Pour toutes ces questions, voir E. HalĂ©vy, La Formation du radicalisme philosophique, Felix Alcan, 1903, Ă©puisĂ©, Ă  paraĂźtre aux PUF, coll. Philosophie morale », et en particulier le premier volume La Jeunesse de Bentham. Voir sur ces questions A. Sen, Éthique et Ă©conomie, PUF, 1994 ; Dupuy, Le Sacrifice et l’envie, Calmann-LĂ©vy, 1992 ; Ph. Van Parijs, Qu’est-ce qu’une sociĂ©tĂ© juste ?, Seuil, 1991 ; S. C. Kolm, Philosophie de l’économie, Seuil, 1985 ; et, Ă©videmment, J. Rawls, ThĂ©orie de la justice, Seuil, 1987, en particulier le chapitre v, consacrĂ© Ă  l’utilitarisme. Ou encore plus simplement Si, et seulement si, il est impossible d’accroĂźtre l’utilitĂ© d’une personne sans rĂ©duire celle d’une autre personne », A. Sen, Éthique et Ă©conomie, op. cit., p. 32. Le produit intĂ©rieur brut se calcule en additionnant les valeurs ajoutĂ©es par toutes les branches, c’est-Ă -dire en additionnant les valeurs des biens et services de chaque branche, dont ont Ă©tĂ© retranchĂ©es les valeurs des consommations intermĂ©diaires. Le SECN a Ă©largi le concept de production adoptĂ© dans l’ancien systĂšme 1976 la production Ă©tait considĂ©rĂ©e comme l’ensemble des biens et services Ă©changĂ©s sur un marchĂ© ou susceptibles de s’y Ă©changer. Ainsi l’apport des administrations Ă©tait-il exclu puisque les services qu’elles rendent ne font en gĂ©nĂ©ral pas l’objet d’une vente. On continue nĂ©anmoins de distinguer entre le PIB marchand et le PIB non marchand. Mais, comme les prestations correspondant Ă  des fonctions collectives, le plus souvent prises en charge par des administrations, ne sont pas marchandes, elles sont mesurĂ©es par les dĂ©penses qu’elles reprĂ©sentent salaires et consommations intermĂ©diaires. Dans cette mesure, les services rendus par les administrations sont conçus comme n’étant Ă  l’origine d’aucun enrichissement pour la collectivitĂ©. La mĂȘme activitĂ©, en revanche, si elle Ă©tait exercĂ©e par une entreprise privĂ©e et Ă©tait vendue pour une valeur supĂ©rieure Ă  son coĂ»t de revient, ce qui est habituellement le cas, serait considĂ©rĂ©e comme ayant enrichi la collectivitĂ© de cette diffĂ©rence. Bien qu’étant Ă  l’origine d’une dĂ©pense totale plus grande coĂ»t de revient plus valeur ajoutĂ©e, l’activitĂ© privĂ©e est donc considĂ©rĂ©e comme enrichissant la collectivitĂ©, mais ce n’est pas le cas de la prestation rĂ©alisĂ©e par l’administration. La production est l’activitĂ© Ă©conomique socialement organisĂ©e qui consiste Ă  crĂ©er des biens et services s’échangeant habituellement sur le marchĂ© et/ou obtenus Ă  partir de facteurs de production s’échangeant sur le marchĂ© », SystĂšme Ă©largi de comptabilitĂ© nationale. Cf. A. Chadeau, A. Fouquet, Peut-on mesurer le travail domestique ? », Économie et statistiques, no 136, septembre 1981. L’étude avait montrĂ© que les Français consacraient plus de temps au travail domestique qu’au travail rĂ©munĂ©rĂ©. Pigou, L’Économie du bien-ĂȘtre, 1920. Comme lorsque par exemple nous consommons des ressources naturelles non reproductibles ou trĂšs longues Ă  reproduire et que nous n’établissons pas de bilan entre cette disparition et la production d’une richesse, ou que nous transformons des relations sociales denses en services marchands. Le PIB est l’agrĂ©gat le plus utilisĂ© pour comparer la croissance des Ă©conomies nationales. Or, sa signification reste limitĂ©e, car il ne reprĂ©sente pas le gain Ă©conomique net rĂ©alisĂ© dans le processus de production, puisqu’il peut ĂȘtre obtenu par usure du capital existant. [
] L’agrĂ©gat le plus apte Ă  mesurer le bien-ĂȘtre semble donc ĂȘtre le produit national net, mais celui-ci n’intĂšgre pas tous les Ă©lĂ©ments permettant une Ă©valuation prĂ©cise des gains nets d’utilitĂ©. Certains Ă©lĂ©ments ne font pas l’objet de comptabilisation alors qu’ils augmentent l’utilitĂ© globale, il en est ainsi des services gratuits de l’économie domestique. Plus importants encore, les inconvĂ©nients, nĂ©s des nuisances de la sociĂ©tĂ© industrielle, ne figurent pas en gĂ©nĂ©ral dans les tableaux comptables comme flux nĂ©gatifs. Bien plus, quand les dĂ©sutilitĂ©s externes qui accompagnent la croissance sont comptabilisĂ©es, elles ne sont retenues que par le biais des dĂ©penses de reconstitution partielle de l’environnement et sont considĂ©rĂ©es comme un accroissement du produit », D. Flouzat, Économie contemporaine, PUF, 1981, tome I, p. 70. SystĂšme Ă©largi de comptabilitĂ© nationale, base 1980, MĂ©thodes, collections de l’Insee, C. 140-141, juin 1987, et O. Arkhipoff, Peut-on mesurer le bien-ĂȘtre national ?, collections de l’Insee, C. 41, mars 1976. Malthus, Principes
, op. cit., p. 26. S. C. Kolm, Philosophie de l’économie, op. cit., p. 250. Les douze pages que consacre Malthus Ă  la recherche de ce qu’est la richesse sont extraordinaires. Tous les arguments de l’époque en faveur d’une conception extensive de la richesse sont examinĂ©s. Il Ă©crit Tout savoir, fruit d’une Ă©ducation soignĂ©e ou de talents supĂ©rieurs, aurait le droit d’ĂȘtre compris dans cette estimation de la richesse [
] Pour ce qui regarde les objets immatĂ©riels, la difficultĂ© paraĂźt ĂȘtre insurmontable. OĂč pourrait-on s’en procurer un inventaire ? Ou comment pourrait-on en dresser un de la quantitĂ©, de la qualitĂ© de cette immense masse de savoir et de talents rĂ©servĂ©e Ă  l’usage et Ă  la consommation personnels de ceux qui les possĂšdent, aussi bien qu’à celle de leurs amis ? En supposant mĂȘme qu’il fĂ»t possible de faire un tel inventaire, comment pourrions-nous arriver Ă  obtenir une Ă©valuation, mĂȘme approximative, des articles qu’elle pourrait contenir ? », Principes
, op. cit., p. 3-14. La prise en compte de l’échange mutuellement avantageux comme source essentielle de richesses a certes constituĂ© un progrĂšs » par rapport Ă  la conception exclusivement patrimoniale, au sens de possessions de terres, de biens meubles
 et est allĂ©e de pair avec l’émergence de l’individu. Mais aujourd’hui, de mĂȘme que nous avons Ă  dĂ©passer le stade de la reconnaissance de l’individu, nous devons inventer une conception de la richesse qui prenne en compte l’échange mais ajoute cette dimension patrimoniale richesses des individus ne faisant pas nĂ©cessairement l’objet d’un Ă©change, patrimoine collectif. C’est le capital qu’on emploie en vue de retirer un profit qui met en mouvement la plus grande partie du travail utile d’une sociĂ©tĂ© », Recherches
, op. cit., p. 335. A. Smith, Ibid., p. 334-335. Malthus, Principes
, op. cit., chapitre i. Dans Philosophie de l’économie, op. cit., Kolm explique que le PNB a Ă©tĂ© inventĂ© en pĂ©riode de guerre et d’aprĂšs-guerre, c’est-Ă -dire Ă  un moment, en effet, oĂč l’essentiel Ă©tait de recommencer Ă  produire Cet indice a Ă©tĂ© inventĂ© pour rĂ©aliser la politique keynĂ©sienne, calculĂ© d’abord en Angleterre pendant la guerre par Stone et Meade l’inventeur de l’expression “produit national brut” comme arme secrĂšte pour l’organisation de l’effort de dĂ©fense, puis aux États-Unis et dans les autres pays en France vers 1951. Son objectif initial Ă©tait de raisonner sur l’activitĂ© et la production Ă©conomiques de sous-emploi. Il a ensuite Ă©tĂ© utilisĂ© pour mesurer les capacitĂ©s de production globales et leur croissance » p. 250. Voir plus gĂ©nĂ©ralement le chapitre xii La pensĂ©e Ă©conomique bouleverse le monde le vol d’Icare du keynĂ©sianisme ». A. Sen, Éthique et Ă©conomie, op. cit., p. 32. J. Rawls, ThĂ©orie de la justice, op. cit., chap. v. E. HalĂ©vy, Les principes de la distribution des richesses », Revue de mĂ©taphysique et de morale, 1906, p. 545-595. Je remercie Jean Saglio d’avoir attirĂ© mon attention sur ce texte. R. Aron, Dix-Huit Leçons sur la sociĂ©tĂ© industrielle, leçon VI, Les types de sociĂ©tĂ© industrielle », Gallimard, coll. Folio », 1986, p. 127. Il Ă©crit aussi, p. 83 Il n’y a pas de preuve que l’organisation la plus efficace pour augmenter le plus vite possible la quantitĂ© de ressources collectives soit simultanĂ©ment l’organisation qui rĂ©partisse le plus Ă©quitablement les biens disponibles. En termes abstraits, une Ă©conomie efficace n’est pas nĂ©cessairement une Ă©conomie juste. » A. Marshall, dans les Principes d’économie politique, op. cit., 1890, analyse la maniĂšre dont les diffĂ©rentes classes sociales investissent de maniĂšre diffĂ©rente dans l’éducation de leurs enfants Le placement de capitaux en vue de l’éducation et du premier apprentissage des ouvriers en Angleterre est limitĂ© par les ressources des parents dans les divers rangs de la sociĂ©tĂ©. » Cf. Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit. En matiĂšre d’assurance-maladie, par exemple, toutes les cotisations, qui sont proportionnelles aux salaires et non pas aux risques des individus, sont mutualisĂ©es, versĂ©es dans un mĂȘme fond qui sert au financement des soins de tous, donc selon les besoins de chacun. La logique est d’ailleurs un peu celle du De chacun selon ses facultĂ©s Ă  chacun selon ses besoins ». Il est obligatoire, dĂšs lors que l’on travaille ou que l’on se trouve dans un certain nombre de situations qui se rapprochent artificiellement de la condition de travailleur, de cotiser Ă  un rĂ©gime de SĂ©curitĂ© sociale, pour l’employeur et pour le salariĂ©. La protection ne dĂ©pend donc pas du bon vouloir ou de l’épargne du salariĂ©. Ceci constitue le meilleur moyen pour que toutes les personnes soient couvertes et pour que l’accĂšs Ă  la protection sociale ne dĂ©pende pas du niveau de ressources. Cf. Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit., p. 270 et suivantes. P. Veyne, Comment on Ă©crit l’histoire, Seuil, coll. Points », 1979. A. Sen, Éthique et Ă©conomie, op. cit., p. 10. L. Robbins, Essai sur la nature et la signification de la science Ă©conomique, MĂ©dicis, 1947, citĂ© in M. Godelier, RationalitĂ© et irrationalitĂ© en Ă©conomie, Maspero, 1966, p. 19. Cette dĂ©finition est trĂšs cĂ©lĂšbre parce qu’elle sera reprise par toute une tradition L. von Mises, P. Samuelson, R. Burling
 M. Herskovitz, E. LeClair, R. Burling, R. Salisbury, H. Schneider, citĂ©s in M. Godelier, Rationalité , op. cit., et surtout in M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit. Ibid., p. xi. R. Burling, ThĂ©ories de la maximisation et anthropologie Ă©conomique », in M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit., p. 113. E. LeClair Jr, ThĂ©orie Ă©conomique et anthropologie Ă©conomique », in Un domaine contesté , op. cit., p. 124-126. C’est nous qui soulignons. Cf. ci-dessus, note 354 concernant L. Robbins. Il n’y a pas de techniques ni de buts Ă©conomiques spĂ©cifiques. C’est seulement la relation entre des fins et des moyens qui est Ă©conomique. [
] Si tout comportement impliquant une allocation de moyens est Ă©conomique, alors la relation d’une mĂšre Ă  son bĂ©bĂ© est Ă©galement une relation Ă©conomique, ou plutĂŽt a un aspect Ă©conomique, tout autant que la relation d’un employeur avec son ouvrier salariĂ© », R. Burling, in M. Godelier, Rationalité , op. cit., p. 19. O. Lange, Économie politique, PUF, 1962, citĂ© in M. Godelier, Rationalité , op. cit., p. 24. K. Polanyi, L’économie en tant que procĂšs institutionnalisĂ© », traduit in M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit., p. 53-54. La mĂ©thode ainsi que le contenu de la thĂ©orie Ă©conomique sont issus de deux caractĂ©ristiques fondamentales de l’Angleterre du xixe siĂšcle la production industrielle en usines et le marchĂ©. En tant que principe d’intĂ©gration de toute l’économie, l’échange marchand oblige ses participants Ă  se conformer Ă  des rĂšgles trĂšs spĂ©ciales. Chacun tire sa subsistance de la vente de quelque chose sur le marchĂ©. [
] Il faudrait souligner que c’est l’organisation marchande qui oblige ses participants Ă  rechercher le gain matĂ©riel personnel », G. Dalton, ThĂ©orie Ă©conomique et sociĂ©tĂ© primitive », traduit in M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit., p. 183. Sur la notion de besoin, voir les extraits et les textes de W. Moore p. 193, J. Boecke p. 241, M. Sahlins p. 243, in M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit. Dans une Ă©conomie domestique, la motivation Ă©conomique n’agit pas continuellement ; c’est pourquoi les gens ne travaillent pas continuellement. En somme, il y a deux voies vers la satisfaction, vers la rĂ©duction de l’écart entre fins et moyens produire beaucoup ou dĂ©sirer peu. OrientĂ©e comme elle l’est vers une modeste production des moyens de subsistance, l’économie domestique choisit la seconde solution, la voie du Zen. Les besoins, disons-nous, sont limitĂ©s. Leur activitĂ© Ă©conomique ne se fragmente pas en un troupeau galopant de dĂ©sirs aiguillonnĂ©s par un sentiment continu d’inadĂ©quation c’est-Ă -dire par une raretĂ© des moyens », M. Sahlins, L’économie tribale », traduit in M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit., p. 243. Voir les textes citĂ©s dans M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit., p. 183-212 Les hypothĂšses paramĂ©triques de l’analyse Ă©conomique d’autrefois Ă©taient prĂ©sentĂ©es comme des faits physiques. Les lois de l’économie marchande que l’on en dĂ©rivait prenaient de ce fait valeur de lois de la nature. Les processus Ă©conomiques semblaient rĂ©pondre Ă  des lois physiques particuliĂšres, distinctes des conventions sociales. L’approche Ă©conomistique qui sĂ©parait l’économie de la sociĂ©tĂ© et crĂ©ait un corps d’analyse thĂ©orique de l’industrialisme marchand trouva une expression plus raffinĂ©e vers la fin du xixe siĂšcle dans les travaux de Jevons, Menger, Clark et Marshall. [
] La nĂ©cessitĂ© institutionnelle pour les individus de poursuivre leur intĂ©rĂȘt privĂ© matĂ©riel au sein d’une Ă©conomie marchande se reflĂ©ta idĂ©ologiquement sous la forme de gĂ©nĂ©ralisations portĂ©es sur la nature de l’“homme” dans la sociĂ©tĂ©. » Voir l’article de M. Sahlins citĂ© in M. Godelier, Un domaine contesté , op. cit., en particulier p. 236 et suivantes. Ce qui, dans la sagesse conventionnelle de la science Ă©conomique, constitue des facteurs exogĂšnes ou non Ă©conomiques reprĂ©sente, dans la rĂ©alitĂ© tribale, l’organisation mĂȘme du processus Ă©conomique. L’anthropologie Ă©conomique ne peut les concevoir comme extĂ©rieurs, comme empiĂ©tant de quelque part Ă  l’extĂ©rieur sur le domaine de l’économie. Ils sont l’économie, ils sont des Ă©lĂ©ments fondamentaux du calcul Ă©conomique et de toute analyse vĂ©ritable qu’on peut en faire. À ce sujet, on pourrait dire en gĂ©nĂ©ral ce qu’Evans-Pritchard disait Ă  propos des Nuer “On ne peut traiter des rapports Ă©conomiques des Nuer en soi, car ils font toujours partie des rapports sociaux directs de type gĂ©nĂ©ral”. » C’est cette tradition qui a Ă©tĂ© nommĂ©e institutionnalisme et dont se rĂ©clament aujourd’hui non seulement des juristes, mais aussi des sociologues, dont l’idĂ©e maĂźtresse consiste Ă  dire que le marchĂ© n’existe pas tout seul et ne rĂ©git pas la sociĂ©tĂ©, mais que c’est au contraire un ensemble d’institutions, produit spĂ©cifiquement humain, culturel et social, qui rĂ©git celle-ci et le marchĂ©. C’est l’institution qui est premiĂšre. E. HalĂ©vy, Les principes de la distribution des richesses », art. cit. C’est nous qui soulignons. La Science Ă©conomique en France, ouvrage collectif, La DĂ©couverte, 1989. La citation est extraite de l’introduction de M. Guillaume, Le sommeil paradoxal de l’économie politique », p. 5. O. Lange, Économie politique, citĂ© in M. Godelier, Rationalité , op. cit., p. 26. M. Allais, Fondements d’une thĂ©orie positive des choix comportant un risque », citĂ© in M. Godelier, Rationalité , op. cit., p. 43. A. d’Autume, in La Science Ă©conomique en France, op. cit., p. 17. Lors d’une Ă©mission qui faisait dialoguer, sur Arte, A. Gorz et le commissaire gĂ©nĂ©ral au Plan, de Foucault, cet argument avait Ă©tĂ© mis en Ă©vidence. À A. Gorz expliquant que l’on pouvait envisager de renoncer Ă  une augmentation aveugle de la production, de Foucault rĂ©pondait Mais il reste tant de besoins insatisfaits »  Il oubliait, bien sĂ»r, de dire qui exprimait ces besoins et si l’augmentation de la production avait bien pour but de satisfaire ces besoins-lĂ . Ce n’est pas que dans les sociĂ©tĂ©s socialistes qu’il est conçu comme un producteur, ce n’est pas que dans les sociĂ©tĂ©s capitalistes qu’il est conçu comme un consommateur ; c’est l’image moderne de l’homme. Habermas, La crise de l’État providence », in Écrits politiques, op. cit., p. 115-116. Il ne faut pas oublier que Keynes a commencĂ© Ă  ĂȘtre Ă©coutĂ© lorsqu’on s’est aperçu qu’il pouvait y avoir un Ă©quilibre de sous-emploi, et donc une anomalie majeure de la rĂ©gulation, laquelle prĂ©suppose le plein emploi. M. Guillaume, in La Science Ă©conomique en France, op. cit., p. 6. C’est le processus que met bien en Ă©vidence P. Rosanvallon dans La Crise de l’État-providence, op. cit., et qu’il fait remonter Ă  la RĂ©volution française l’État dissout les corps intermĂ©diaires pour n’avoir plus en face de lui que des individus dispersĂ©s, qui n’ont pas le droit de se coaliser et en face desquels l’État apparaĂźt tout-puissant. Sur ce point, dĂ©montrĂ© de maniĂšre trĂšs concrĂšte et passionnante, cf. A. M Guillemard, Le DĂ©clin du social, PUF, 1986. Habermas, La Technique et la science comme idĂ©ologie », op. cit., p. 40. La fameuse technostructure dont Galbraith dĂ©crit la puissance Ă  cĂŽtĂ© des propriĂ©taires des entreprises. PrononcĂ©e en 1919 et rassemblĂ©e avec une autre Le mĂ©tier et la vocation de savant » sous le titre gĂ©nĂ©ral Le Savant et le Politique, qui manque la signification essentielle du propos. On se rĂ©fĂšre ici Ă  l’édition de poche, M. Weber, Le Savant et le Politique, 10/18, 1971. M. Weber, L’Éthique protestante
, op. cit., p. 81-104. M. Weber, Le Savant et le Politique, op. cit., p. 121 et 123. La comptabilitĂ© nationale fut conçue en France Ă  l’image de celle de l’entreprise. Les anciens Ă©conomistes, mĂȘme Smith, avaient en tĂȘte de diriger la nation productive comme une entreprise, un capital Ă  gĂ©rer et Ă  faire grandir », F. Fourquet, La Richesse et la Puissance, op. cit., p. 267. J. Rawls, ThĂ©orie de la justice, op. cit., p. 40 et 43. Rawls rappelle plus loin p. 175 que le concept de rationalitĂ© est celui qui est bien connu dans la thĂ©orie du choix rationnel l’individu rationnel est celui qui a un ensemble cohĂ©rent de prĂ©fĂ©rences face aux options disponibles. Il hiĂ©rarchise ces options selon la façon dont elles rĂ©alisent ses buts. Cet individu ne souffre ni de l’envie, ni de l’humiliation, ni de la jalousie. Ibid., op. cit., p. 30. R. Burling, ThĂ©ories de la maximisation et anthropologie Ă©conomique », citĂ© in Godelier, Un domaine contesté , op. cit., p. 110. Cf. la fin du chapitre iii du prĂ©sent ouvrage. Les thĂ©ories politiques du contrat se sont rĂ©vĂ©lĂ©es impuissantes Ă  fonder une sociĂ©tĂ© conçue autrement que comme un agrĂ©gat. Hobbes et Rousseau parviennent nĂ©anmoins Ă  donner une unitĂ© organique Ă  la sociĂ©tĂ© qu’ils dĂ©crivent, le premier grĂące Ă  la quantitĂ© de pouvoir que les individus transfĂšrent au souverain, le second grĂące au caractĂšre presque sacrĂ© du pacte qui transforme d’un coup la multitude en corps Et nous recevons en corps chaque membre comme partie indivisible du tout [
] À l’instant [
], cet acte d’association produit un corps moral et collectif [
], lequel reçoit de ce mĂȘme acte son unitĂ©, son moi commun, sa vie et sa volontĂ© » Contrat social livre I, chapitre iv ; c’est nous qui soulignons. Mais cette transmutation initiale est tout aussi miraculeuse que celle qui permet de passer de la multiplicitĂ© des volontĂ©s particuliĂšres Ă  la volontĂ© gĂ©nĂ©rale cf. Contrat social, livre II, chapitre iii. MalgrĂ© les nombreuses explications convaincantes qui ont Ă©tĂ© donnĂ©es de ces deux opĂ©rations cf. R. DerathĂ©, Rousseau et la science politique de son temps, op. cit., A. Philonenko, Jean-Jacques Rousseau et la pensĂ©e du malheur, Vrin, 1984, on ne peut nier que la pensĂ©e de Rousseau demeure aporĂ©tique, en raison de son point de dĂ©part individualiste, ainsi que le met en Ă©vidence l’intervention du lĂ©gislateur Contrat social, livre II, chapitre vii. Il nous semble qu’en revanche Hegel Ă©vite cette impasse parce que son point de dĂ©part est situĂ© dans l’histoire et dans la sociĂ©tĂ©. Comme c’est le cas chez Rousseau. C’est parce qu’il croit que l’homme n’est pas essentiellement, originellement et exclusivement producteur, mais aussi un ĂȘtre parlant homo loquax, que Habermas a consacrĂ© une grande partie de sa philosophie Ă  la communication et Ă  l’hermĂ©neutique. Il s’intĂ©resse non seulement Ă  la maniĂšre dont les signes renvoient au sens, mais Ă©galement Ă  la façon dont une communautĂ© peut voir son rapport Ă  son histoire ou Ă  elle-mĂȘme obscurci, et au fait qu’elle a besoin, pour se parler, de s’accorder sur un certain nombre de rĂšgles qui permettent l’exercice mĂȘme de la parole. C’est encore une fois le schĂšme de l’équilibre qui domine, Ă©quilibre adĂ©quat entre des revendications concurrentes », ThĂ©orie de la justice, op. cit., p. 36. Ce schĂšme est Ă©videmment profondĂ©ment Ă©conomique. La notion mĂȘme de voile d’ignorance et de justice procĂ©durale renvoie Ă  l’économie, comme le montre cette rĂ©fĂ©rence Ă  Hayek, citĂ© par Dupuy dans Le Sacrifice et l’Envie, op. cit., p. 227 C’est seulement parce que nous ne pouvons prĂ©dire le rĂ©sultat effectif de l’adoption d’une rĂšgle dĂ©terminĂ©e que nous pouvons admettre l’hypothĂšse qu’elle augmentera les chances de tous Ă©galement. Que ce soit l’ignorance du rĂ©sultat futur qui rend possible l’accord sur les rĂšgles [
], c’est ce que reconnaĂźt la pratique frĂ©quente qui consiste Ă  rendre dĂ©libĂ©rĂ©ment imprĂ©visible un rĂ©sultat, afin de rendre possible l’accord sur une procĂ©dure
 » J. Rawls, ThĂ©orie de la justice, op. cit., p. 38. C’est nous qui soulignons. Parmi toutes les conceptions traditionnelles, je crois que c’est celle du contrat qui se rapproche le mieux de nos jugements bien pesĂ©s sur la justice et qui constitue la base morale qui convient le mieux Ă  une sociĂ©tĂ© dĂ©mocratique », Ă©crit Rawls, ibid., p. 20. La justice sociale est l’application du principe de prudence rationnelle Ă  une conception du bien-ĂȘtre du groupe considĂ©rĂ© comme un agrĂ©gat », ibid., p. 50. C’est parce qu’il proposait une synthĂšse tellement dĂ©licate que Rawls a Ă©tĂ© introduit et surtout trĂšs commentĂ© en France, en particulier aprĂšs la publication d’un rapport du CERC, en 1989, montrant que les inĂ©galitĂ©s avaient fortement augmentĂ© en France dans les annĂ©es 1980 Les Revenus des Français, le tournant des annĂ©es 80, Documents du CERC, no 94. Rawls fut opportunĂ©ment citĂ© dans un document de travail du Commissariat gĂ©nĂ©ral du Plan intitulĂ© InĂ©galitĂ©s 90, l’annĂ©e suivante, pour illustrer le fait que certaines inĂ©galitĂ©s Ă©taient tout Ă  fait supportables, alors que d’autres ne l’étaient pas Des rĂ©flexions thĂ©oriques rĂ©centes, pouvait-on lire dans ce document, permettent de porter un regard nouveau sur les inĂ©galitĂ©s considĂ©rĂ©e avant la crise comme un bien en soi, la rĂ©duction des inĂ©galitĂ©s apparaĂźt aujourd’hui comme une question plus complexe. » Toutes les inĂ©galitĂ©s ne doivent pas ĂȘtre combattues, bien au contraire. Sur l’introduction de Rawls en France et les diverses interprĂ©tations dont il a Ă©tĂ© l’objet, on pourra lire B. ThĂ©ret, “Le Rawlsisme’ Ă  la française”, le marchĂ© contre l’égalitĂ© dĂ©mocratique ? », Futur antĂ©rieur, no 8, hiver 1991, et Y. Roucaute, Rawls en France », in L’Évolution de la philosophie du droit en Allemagne et en France depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, PUF, 1991. Ce dernier Ă©crit, p. 213 C’est l’époque oĂč l’on commence Ă  croire, sur fond de ruine des dĂ©rivĂ©s du lĂ©ninisme, que Rawls pourrait ĂȘtre un atout non nĂ©gligeable pour penser dans le “libĂ©ralisme” devenu hĂ©gĂ©monique, mais Ă  gauche. » Il poursuit, p. 223 Les intellectuels “de gauche” n’acceptaient pas avant 1982 une thĂ©orie qui lĂ©gitimait l’inĂ©galitĂ© sociale, marquĂ©e du sceau du lieu culturel de sa production nord-amĂ©ricaine ; les libĂ©raux français voyaient dans le principe de diffĂ©rence celui de la redistribution, et donc l’interventionnisme de l’État. [
] D’oĂč le succĂšs la rĂ©fĂ©rence Ă  Rawls n’est guĂšre dissociable d’une double crise qui coĂŻncide en quelques annĂ©es. » Sur tous ces auteurs, on pourra lire Dupuy, Ph. Van Parijs, A. Sen, dĂ©jĂ  citĂ©s, et aussi Kervegan, Y a-t-il une philosophie libĂ©rale ? Remarques sur les Ɠuvres de J. Rawls et F. von Hayek », Rue Descartes, no 3, 1992, ainsi que Individu et justice sociale, autour de John Rawls, Seuil, coll. Points », 1988. F. von Hayek, Droit, lĂ©gislation, libertĂ©, tome I, PUF, 1986, chapitre v. K. Polanyi, La Grande Transformation, op. cit., chapitre v. Dans ce chapitre, ainsi que dans les deux prĂ©cĂ©dents, Polanyi met bien en Ă©vidence que c’est ce schĂšme autorĂ©gulateur qui caractĂ©rise l’économie. Il Ă©crit, p. 88 La sociĂ©tĂ© est gĂ©rĂ©e en tant qu’auxiliaire du marchĂ©. [
] Au lieu que l’économie soit encastrĂ©e dans les relations sociales, ce sont les relations sociales qui sont encastrĂ©es dans le systĂšme Ă©conomique. » P. Batifoulier, L. Cordonnier, Y. Zenou, Le don contre-don, approche Ă©conomique et approche de la sociologie », Revue Ă©conomique, septembre 1992 ; B. Reynaud, ThĂ©orie des salaires, op. cit., et Le Salaire, la RĂšgle et le MarchĂ©, op. cit. Ibid. Voir les ouvrages de J. Elster, Leibniz et la formation de l’esprit capitaliste, Aubier, 1975 ; Karl Marx, une interprĂ©tation analytique, PUF, 1989 ; et la revue Actuel Marx, no 7 Le marxisme analytique anglo-saxon ». Pour une bibliographie et une analyse de l’institutionnalisme amĂ©ricain, voir L. Bazzoli, T. Kirat, Villeval, Contrat et institutions dans la relation salariale pour un renouveau institutionnaliste », Travail et Emploi, no 58, 1994. Sur Commons, voir note ronĂ©otĂ©e, L. Bazzoli, La crĂ©ation nĂ©gociĂ©e et pragmatique de rĂšgles. Apport de l’analyse institutionnaliste de Commons et enjeux d’une action collective rĂ©gulatrice du rapport salarial », avril 1993. Voir par exemple M. Lallement, ThĂ©orie des jeux et Ă©quilibres sociaux », Revue du Mauss, no 4, second semestre 1994. A. Sen, Éthique et Ă©conomie, op. cit., voir tout le chapitre ii, Jugements sur l’économie et philosophie morale ». A. Sen Ă©crit, p. 45 Par consĂ©quent, puisque la thĂšse de l’utilitĂ© en tant que seule source de valeur repose sur l’assimilation de l’utilitĂ© et du bien-ĂȘtre, on peut la critiquer pour deux raisons 1. parce que le bien-ĂȘtre n’est pas la seule valeur ; 2. parce que l’utilitĂ© ne reprĂ©sente pas correctement le bien-ĂȘtre. » F. Fourquet, Richesse et puissance, op. cit., p. 261. Il s’agit lĂ  d’une formule bien connue de Jean Bodin. Chapitre IX. RĂ©inventer la politique sortir du contractualisme Il est de l’intĂ©rĂȘt public de corriger par une bienfaisance rĂ©flĂ©chie les maux rĂ©sultant des mauvaises institutions qui ont maintenu et propagĂ© la pauvretĂ© », ComitĂ© de mendicitĂ© de la Constituante, QuatriĂšme rapport, 1790. Voir aussi Barthe, PauvretĂ©s et État-providence », art. cit. Le rapport de la Commission de l’assistance et de la prĂ©voyance publique, rĂ©digĂ© par A. Thiers en 1850, est un bon exemple de cette doctrine officielle. Par exemple Il importe que cette vertu [la bienfaisance], quand elle devient, de particuliĂšre, collective, de vertu privĂ©e, vertu publique, conserve son caractĂšre de vertu, c’est-Ă -dire reste volontaire, spontanĂ©e, libre enfin de faire ou de ne pas faire, car autrement elle cesserait d’ĂȘtre une vertu pour devenir une contrainte. » Voir aussi Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit., p. 258-270. E. Durkheim, La Division sociale du travail, op. cit. Et, en particulier, Ă©videmment les dĂ©chirements » de notre systĂšme de protection sociale entre deux conceptions, l’une relevant de l’assurance et l’autre de la solidaritĂ©, cf. Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit., p. 255. P. Laroque nous a confirmĂ© qu’il s’agissait bien, en 1945, de mettre en place un vĂ©ritable systĂšme de sĂ©curitĂ© sociale couvrant la totalitĂ© de la population. Voir des extraits de l’exposĂ© des motifs de l’ordonnance du 4 octobre 1945, in Join-Lambert, Politiques sociales, op. cit., p. 276. On y lit notamment Le problĂšme qui se pose alors est celui d’une redistribution du revenu national destinĂ©e Ă  prĂ©lever sur le revenu des individus favorisĂ©s les sommes nĂ©cessaires pour complĂ©ter les ressources des travailleurs ou des familles dĂ©favorisĂ©es. [
] EnvisagĂ©e sous cet angle, la sĂ©curitĂ© sociale obligatoire appelle l’amĂ©nagement d’une vaste organisation d’entraide obligatoire. » P. Rosanvallon, La Crise de l’État-providence, op. cit. L’opposition Gesellschaft/Gemeinschaft a Ă©tĂ© analysĂ©e par F. Tönnies, in CommunautĂ© et sociĂ©tĂ©. CatĂ©gories fondamentales de la sociĂ©tĂ© pure, Retz, 1977. Voir aussi L. Dumont, Essais sur l’individualisme, op. cit. Kant, IdĂ©e d’une histoire universelle du point de vue cosmopolitique, opuscule Ă©crit en 1784, repris avec une sĂ©rie d’autres textes dans Opuscules sur l’histoire, GF-Flammarion, 1990. L’expression insociable sociabilitĂ© » est utilisĂ©e par Kant ; elle dĂ©signe l’inclination des hommes Ă  entrer en sociĂ©tĂ©, qui est cependant doublĂ©e d’une rĂ©pulsion gĂ©nĂ©rale Ă  le faire, menaçant constamment de dĂ©sagrĂ©ger cette sociĂ©tĂ© ». Aristote, La Politique, op. cit., livre I, chapitre i, 1252a. Aristote ajoute dans le livre I, chapitre ii, 1252b-1253a Enfin, la communautĂ© formĂ©e de plusieurs villages est la citĂ© au plein sens du mot. [
] Ainsi formĂ©e au dĂ©but pour satisfaire les seuls besoins vitaux, elle existe pour permettre de bien vivre. C’est pourquoi toute citĂ© est un fait de nature. [
] La citĂ© est au nombre des rĂ©alitĂ©s qui existent naturellement, et l’homme est par nature un animal politique. Et celui qui est sans citĂ©, naturellement et non par suite des circonstances, est ou un ĂȘtre dĂ©gradĂ© ou au-dessus de l’humanitĂ©. » On se reportera Ă©galement aux analyses de E. Benveniste consacrĂ©es Ă  la diffĂ©rence entre la citĂ© grecque et la civitas romaine la polis grecque est premiĂšre et fonde la relation d’appartenance qui dĂ©finit le citoyen ; la civitas romaine est seconde par rapport aux citoyens, c’est la totalitĂ© additive des cives. Elle apparaĂźt donc comme une sommation, Ă©crit Benveniste, et elle rĂ©alise une vaste mutualitĂ©. E. Benveniste, ProblĂšmes de linguistique gĂ©nĂ©rale, tome II, Gallimard, coll. Tel », 1974, chapitre xx, p. 272-280. Voir sur ce point les nombreuses analyses d’I. Berlin, Éloge de la libertĂ©, Presses-Pocket, 1990 ; Le Bois tordu de l’humanitĂ©, Albin Michel, 1992, et À contre-courant. Essais sur l’histoire des idĂ©es, Albin Michel, 1988. En 1985, J. Rawls prĂ©cisait sa pensĂ©e, Ă©crivant [La justice politique] doit tenir compte d’une diversitĂ© de doctrines et de la pluralitĂ© des conceptions du bien qui s’affrontent et qui sont effectivement incommensurables entre elles, soutenues par les membres des sociĂ©tĂ©s dĂ©mocratiques existantes », in Individu et justice sociale, op. cit., p. 281. Sur cette interprĂ©tation, et pour la contredire, voir en particulier sur Hegel, E. Weil, Hegel et l’État, op. cit. ; et sur Marx, la prĂ©face de M. Rubel aux ƒuvres de Marx, Gallimard, coll. La PlĂ©iade », op. cit. ; son ouvrage, Karl Marx, essai de biographie intellectuelle, RiviĂšre, 1971 ; et M. Henry, Marx, 2 tomes, Gallimard, 1976. Ces derniers distinguent fortement la pensĂ©e de Marx du marxisme. Les exemples sont multiples. Parmi les plus fameux, on retiendra les ouvrages de F. von Hayek, et plus encore ceux de K. Popper, en particulier La SociĂ©tĂ© ouverte et ses ennemis, Seuil, 1979, dans lequel Popper fait de Hegel l’ancĂȘtre du totalitarisme. Mais, d’une maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, une trĂšs grande partie des travaux philosophico-logiques anglo-saxons sont destinĂ©s, depuis le dĂ©but du xxe siĂšcle, Ă  dĂ©montrer l’inanitĂ© des propos de la mĂ©taphysique allemande. Dans ses Essais sur l’individualisme, L. Dumont propose un lexique dans lequel on peut lire qu’ on dĂ©signe comme holiste une idĂ©ologie qui valorise la totalitĂ© sociale et nĂ©glige ou subordonne l’individu humain ». Or, toute la thĂšse de L. Dumont consiste Ă  dire qu’une sociĂ©tĂ© qui n’est pas conçue comme une agrĂ©gation est holiste, donc opprime l’individu
 L. Dumont dĂ©veloppe dans cet ouvrage comme dans d’autres une interprĂ©tation de Hegel qui passe Ă  cĂŽtĂ© de l’apport vĂ©ritable de celui-ci, et qui le confond avec la grande masse des holistes ». Voir en particulier GenĂšses II », in Essais sur l’individualisme, op. cit., oĂč L. Dumont interprĂšte les tentatives allemandes exclusivement comme une renaissance de l’universitas. L. Dumont, Homo aequalis, op. cit., p. 134. Nous nous appuyons largement sur ce livre, car c’est, nous semble-t-il, l’un des mieux connus des responsables politiques et administratifs. C’est un classique qui constitue pour beaucoup un bon rĂ©sumĂ© de la thĂ©orie politique actuelle et dont se sont Ă©galement inspirĂ©s un certain nombre d’essayistes. ThĂ©orie de la justice, op. cit., p. 53. Ibid., p. 92. Ibid. Rawls Ă©crit Ă©galement que les institutions les plus importantes sont la protection lĂ©gale de la libertĂ© de pensĂ©e et de conscience, l’existence de marchĂ©s concurrentiels ; la propriĂ©tĂ© privĂ©e des moyens de production et la famille monogamique en sont des exemples ibid., p. 33. Dupuy, Le Sacrifice et l’Envie, op. cit. Toute la philosophie hĂ©gĂ©lienne du droit est une critique de l’idĂ©e de contrat, de mĂȘme que de l’individualisme et du droit abstrait sur lesquels cette idĂ©e se fonde la volontĂ© pleinement autonome et l’individu du droit romain ou de la philosophie du xviiie siĂšcle ne sont que des abstractions. Il n’y a d’individu que pleinement incarnĂ© dans une sociĂ©tĂ©, de volontĂ© que dĂ©jĂ  Ă  l’Ɠuvre dans le monde, de contrat que dans la sociĂ©tĂ©. Hegel, PrĂ©cis de l’EncyclopĂ©die des sciences philosophiques, Vrin, 1970, § 495. Voir aussi Principes de la philosophie du droit, op. cit., 75 et l’article de G. Planty-Bonjour, MajestĂ© de l’État et dignitĂ© de la personne selon Hegel », in L’Évolution de la philosophie du droit
, op. cit., p. 7. Hegel, Principes de la philosophie
, op. cit., § 258. Cf. A. Wellmer, ModĂšles de la libertĂ© dans le monde moderne », Critique, juin-juillet 1989, p. 506 et suivantes. En ce qui concerne Hegel, les exemples sont innombrables. On retiendra Le droit de la particularitĂ© du sujet Ă  trouver sa satisfaction ou, ce qui revient au mĂȘme, le droit de la libertĂ© subjective constitue le point critique et central qui marque la diffĂ©rence entre les Temps modernes et l’AntiquitĂ© », in Principes de la philosophie
, op. cit., § 124 ; ou encore Il faut Ă©valuer comme quelque chose de grand le fait qu’aujourd’hui l’homme en tant qu’homme est considĂ©rĂ© comme titulaire de droits en sorte que l’ĂȘtre humain est quelque chose de supĂ©rieur Ă  son statut. Chez les IsraĂ©lites, avaient des droits, seulement les HĂ©breux, chez les Grecs, seulement les Grecs libres, chez les Romains seulement les Romains et ils avaient des droits dans leur qualitĂ© d’HĂ©breux, de Grecs, de Romains, non en leur qualitĂ© d’hommes en tant que tels. Mais Ă  prĂ©sent, comme source du droit, sont en vigueur les principes universels, et ainsi dans le monde a commencĂ© une nouvelle Ă©poque », citĂ© par G. Planty-Bonjour, MajestĂ© de l’État
 », art. cit. C’est ce que tend Ă  dĂ©montrer toute la philosophie de Hegel non seulement l’individu abstrait que dĂ©crivent les philosophies individualistes ou l’économie du xviiie siĂšcle n’existe pas, l’individu n’existe qu’incarnĂ© dans une communautĂ©, une langue, un territoire, des institutions politiques, mais, de plus, l’État est ce qui respecte infiniment l’individu Le principe des États modernes a cette force et cette profondeur prodigieuse de permettre au principe de la subjectivitĂ© de s’accomplir au point de devenir l’extrĂȘme autonome de la particularitĂ© personnelle et de le ramener en mĂȘme temps dans l’unitĂ© substantielle, et ainsi de conserver en lui-mĂȘme cette unitĂ© substantielle », Principes de la philosophie
, op. cit., § 260. Tocqueville dĂ©passe, lui aussi, l’étape de la libertĂ© nĂ©gative comme seul principe et tente de la concilier avec l’idĂ©e d’une communautĂ© politique. C’est pour cette raison que sa conception fait place Ă  l’idĂ©e d’un bien commun et d’individus discutant et dĂ©battant de la conception de ce bien commun La libertĂ© nĂ©gative telle qu’elle s’incarne dans les structures de la sociĂ©tĂ© civile est ici transformĂ©e dans la libertĂ© positive ou rationnelle de citoyens qui agissent ensemble ; cette libertĂ© positive ou rationnelle revient Ă  une forme de restauration de ces liens communautaires entre les individus dont l’absence dĂ©finit leur existence en tant que propriĂ©taires indĂ©pendants. [
] La libertĂ© seule [peut] retirer les citoyens de l’isolement dans lequel l’indĂ©pendance mĂȘme de leur condition les fait vivre, pour les contraindre Ă  se rapprocher les uns des autres. [
] Elle les rĂ©unit chaque jour par la nĂ©cessitĂ© de s’entendre, de se persuader, et de se complaire mutuellement dans la pratique d’affaires communes. [
] Seule elle fournit Ă  l’ambition des objets plus grands que l’acquisition des richesses », L’Ancien rĂ©gime et la RĂ©volution, GF-Flammarion, 1988, p. 94-95. I. Berlin, Éloge de la libertĂ©, op. cit., p. 50. Les spĂ©cialistes de Hegel ont montrĂ© depuis longtemps les confusions sur lesquelles s’appuyaient certaines lectures de Hegel il est bien au contraire, le penseur antinationaliste par excellence. Il est Ă©galement le concepteur de l’État moderne, un État fortement centralisĂ© dans son administration, largement dĂ©centralisĂ© en ce qui concerne les intĂ©rĂȘts Ă©conomiques, avec un corps de fonctionnaires de mĂ©tier, sans religion d’État. On lira sur tous ces points, outre les ouvrages dĂ©jĂ  citĂ©s de J. Hippolyte, K. Papaionnou et E. Weil, une sĂ©rie d’articles dans les Cahiers internationaux de sociologie, 1948, dont celui de J. Hippolyte, La conception hĂ©gĂ©lienne de l’État et sa critique par Marx ». Voir Marx, Critique de la philosophie politique de Hegel, Ă©crit en 1843 et publiĂ© dans le tome I de La PlĂ©iade, qui est un commentaire acĂ©rĂ© des Principes de la philosophie du droit de Hegel et dont le nƓud est prĂ©cisĂ©ment l’articulation entre sociĂ©tĂ© civile et État. La critique de Marx est extrĂȘmement pertinente elle montre que, chez Hegel, les individus, mĂȘme s’ils sont reconnus, ne participent pas rĂ©ellement Ă  la dĂ©termination des objectifs de l’État, que les ordres intermĂ©diaires ne servent qu’à peu de chose et que la sociĂ©tĂ© civile n’a aucun moyen de se protĂ©ger des dĂ©bordements de l’État voir en particulier p. 943. Mais Marx, de ce fait, en dĂ©duit qu’il faut supprimer l’État, et non le rĂ©former. C’est la Nation qui, dans le prĂ©ambule de la Constitution de 1946, assure Ă  l’individu et Ă  la famille les conditions nĂ©cessaires Ă  leur dĂ©veloppement, garantit Ă  l’enfant, Ă  la mĂšre et au vieux travailleur la protection sociale, le repos et les loisirs, proclame la solidaritĂ© et l’égalitĂ© de tous les Français devant les charges
 Dans cette tradition, on compte P. Rosanvallon, avec La Crise de l’État-providence, op. cit., mais aussi I. Illich, qui critique l’État au nom des valeurs d’usage ou du domaine vernaculaire ; voir en particulier Le Travail fantĂŽme, Seuil, 1981 ; Le ChĂŽmage crĂ©ateur, Seuil, 1977 ; LibĂ©rer l’avenir, Seuil, coll. Points », 1971 ; La ConvivialitĂ©, Seuil, 1975 ; mais aussi le premier » Habermas, par exemple La Technique et la Science comme idĂ©ologie », Gallimard, 1973. La quatriĂšme de couverture de La Crise de l’État-providence indiquait ainsi Cet essai se propose de substituer une triple dynamique de la socialisation, de la dĂ©centralisation et de l’autonomisation Ă  la logique classique de l’étatisation du social. » Sur le dĂ©veloppement des inĂ©galitĂ©s dans notre pays, voir en particulier Documents du CERC, Les Français et leurs revenus, le tournant des annĂ©es 80, no 94, La Documentation française et le rapport SantĂ© 2010, atelier Les inĂ©galitĂ©s devant la santĂ© », La Documentation française, 1993. C’est l’idĂ©e dĂ©veloppĂ©e depuis trente ans par Habermas et reprise des LumiĂšres accroĂźtre l’espace public, qui est le seul espace rĂ©ellement politique. Sur ce point, voir la thĂšse de Ferry, Habermas. L’éthique de la communication, PUF, 1987, et ce que Ferry dit des premiers travaux de Habermas consacrĂ©s Ă  cette notion. L’expression est de Habermas, La crise de l’État-providence », in Écrits politiques, op. cit., p. 120. Habermas prĂ©cisait auparavant qu’il n’y avait pas de solution de rechange perceptible Ă  l’État social. Voir Nancy, La CommunautĂ© dĂ©sƓuvrĂ©e, Christian Bourgois, 1990. Le projet de la modernitĂ© est le projet d’une telle rĂ©conciliation entre la libertĂ© nĂ©gative et la libertĂ© communautaire. Il faut dire contre Marx et contre Hegel que ce projet est un projet en marche, sans solutions dĂ©finitives. [
] Contre le libĂ©ralisme, il faut dire que, sans la rĂ©alisation d’une libertĂ© communautaire et rationnelle, et donc d’une forme dĂ©mocratique de vie Ă©thique, la libertĂ© nĂ©gative ne peut devenir qu’une caricature ou qu’un cauchemar », A. Wellmer, ModĂšles de la libertĂ© dans le monde moderne », art. cit. C’est une des grandes idĂ©es de Hannah Arendt que de penser que la sphĂšre de l’action politique est son propre contenu ; autrement dit, c’est en dĂ©battant du bien social que l’on fait le lien social ; cf. Essai sur la rĂ©volution, Gallimard, 1967. Il ne s’agit Ă©videmment pas de ne plus tenir compte des contraintes que nous impose notre intĂ©gration dans un systĂšme d’échanges mondiaux et dans leurs institutions, mais de revoir progressivement la place que tient l’économie dans nos sociĂ©tĂ©s modernes et de renverser le rapport Ă©conomie/politique en discutant des critĂšres de richesses considĂ©rĂ©s, du contenu de la croissance, du pĂ©rimĂštre pris en compte pour le calcul de la rentabilité  Il ne s’agit pas de rĂȘver » ou de prendre nos dĂ©sirs pour des rĂ©alitĂ©s, mais de redonner Ă  l’économie sa place celle d’une technique qui fait des calculs et propose diffĂ©rentes solutions, en affichant ses critĂšres, et dont les rĂ©sultats et les hypothĂšses de travail sont ensuite soumis Ă  discussion. Et donc d’engager une vĂ©ritable rĂ©forme de notre comptabilitĂ© nationale de la soumettre Ă  discussion et Ă  examen, de ne pas laisser les Ă©conomistes dĂ©cider de ce qui est ou n’est pas une richesse pour la sociĂ©tĂ©. Dans Le DĂ©senchantement du monde, Gallimard, 1985, M. Gauchet explique que le rĂŽle de l’État est dĂ©sormais de s’adapter totalement aux souhaits des citoyens L’État dĂ©mocratique – bureaucratique – progresse Ă  la mesure de son renoncement mĂȘme Ă  toute vue prescriptive de l’avenir et de l’accentuation de son ouverture reprĂ©sentative Ă  la multiplicitĂ© mouvante des aspirations et des initiatives de ses administrĂ©s », p. 262. C’est sans doute avoir lĂ  une idĂ©e insuffisante de la fonction de l’État. La fonction de mĂ©diation ne peut se rĂ©duire Ă  une fonction de reflet. La liste de tous les Ă©lĂ©ments que devrait publier l’État comptes certifiĂ©s, analyses des revenus et de leurs Ă©carts, analyses des dĂ©penses publiques avec des comptabilitĂ©s analytiques intĂ©grĂ©es, etc. serait fixĂ©e dans une loi d’un caractĂšre particulier. Le rĂŽle de l’État en matiĂšre de publicitĂ© » est essentiel publier selon une pĂ©riodicitĂ© donnĂ©e, et en les rendant accessibles, les donnĂ©es nĂ©cessaires au dĂ©bat social, sur la protection sociale, les diffĂ©rentes structures chargĂ©es de la gestion d’un intĂ©rĂȘt public ; publier les mĂȘmes donnĂ©es concernant son propre fonctionnement, de maniĂšre trĂšs prĂ©cise et sans qu’aucun gouvernement puisse y Ă©chapper ; donner des informations sur la structure et l’évolution des revenus et des avantages divers des diffĂ©rentes catĂ©gories socioprofessionnelles doit permettre d’amĂ©liorer la participation des citoyens au dĂ©bat public il n’y a aucune raison que seuls les fonctionnaires spĂ©cialisĂ©s aient accĂšs Ă  ces informations. L’État n’a pas suffisamment recours Ă  cette procĂ©dure. Ainsi par exemple, la loi DebrĂ© de 1958 sur les hĂŽpitaux prĂ©voyait que des cliniques privĂ©es pourraient obtenir des concessions de la part de l’État, c’est-Ă -dire prendre en charge un intĂ©rĂȘt public, en assurer la gestion, en suivant les objectifs fixĂ©s par l’État. Au lieu de cela, se sont dĂ©veloppĂ©s, soit des hĂŽpitaux publics gĂ©rĂ©s de maniĂšre publique », soit des cliniques privĂ©es, dont les obligations Ă©taient et restent trĂšs peu pesantes et diffĂ©rentes de celles qu’avait Ă  remplir le public incapacitĂ© de l’État Ă  fixer des objectifs et Ă  Ă©valuer rĂ©guliĂšrement leur rĂ©alisation, incapacitĂ© des acteurs privĂ©s Ă  se plier aux contraintes issues de la prise en charge d’un intĂ©rĂȘt public
 Qui est responsable ? Un raisonnement identique pourrait ĂȘtre tenu aujourd’hui en ce qui concerne la gestion de la SĂ©curitĂ© sociale distinguer intĂ©rĂȘt public et gestion publique, distinguer responsabilitĂ© gĂ©nĂ©rale et gestion quotidienne, cela est aujourd’hui essentiel. En particulier de l’ENA, de maniĂšre Ă  ce que cette Ă©cole forme des fonctionnaires et non des hommes politiques. Dans cet ordre d’idĂ©es, Habermas Ă©crit Les sociĂ©tĂ©s modernes disposent de trois ressources Ă  partir desquelles elles peuvent subvenir Ă  leurs besoins de rĂ©gulations l’argent, le pouvoir et la solidaritĂ©. Il serait nĂ©cessaire qu’il y ait un rééquilibrage de leurs sphĂšres d’influence », La crise de l’État-providence », in Écrits politiques, op. cit., p. 122. H. Bartoli, Science Ă©conomique et travail, op. cit., Le travail, source de droit », p. 51-54. C’est une notion qui a Ă©tĂ© rĂ©pandue en France par la traduction du livre de J. Rawls. Le terme fairness est traduit par Ă©quitĂ© » et J. Rawls parle de la thĂ©orie de la justice comme Ă©quitĂ© » voir p. 29, par exemple. Les sommes dĂ©pensĂ©es pour permettre aux familles disposant des plus hauts revenus d’utiliser une aide Ă  domicile pour faire garder leurs enfants sont Ă©videment proportionnellement beaucoup plus Ă©levĂ©es qu’une bonne politique d’équipements publics. Les Ă©quipements publics ont vu leur dĂ©veloppement entravĂ© en France, Ă  la diffĂ©rence par exemple des pays scandinaves, parce qu’ils pĂšsent sur le budget de l’État et obligent Ă  recourir Ă  l’impĂŽt. On prĂ©fĂšre les solutions individuelles. Mais, comme on l’a dit, ces services publics ne doivent pas nĂ©cessairement ĂȘtre gĂ©rĂ©s par l’État ; leur inscription comptable peut ĂȘtre revue si ce n’est que cela
 ; enfin, le tabou pesant sur l’impĂŽt devrait faire aujourd’hui l’objet d’une pĂ©dagogie active l’impĂŽt sert Ă  financer des fonctions collectives, il faut donc, et il suffit, qu’il soit bien utilisĂ©. Pour cela, il reste Ă  fixer des rĂšgles d’information et Ă  amĂ©liorer la participation des citoyens au choix des prioritĂ©s et Ă  la connaissance de ce Ă  quoi l’argent public a Ă©tĂ© employĂ©. Voir le numĂ©ro spĂ©cial de la revue Droit social, no 3, mars 1990, sur ce thĂšme, et B. ThĂ©ret, Le “rawlsisme” Ă  la française », art. cit. La rĂ©gression Ă  l’infini Ă  laquelle se livre Rawls ThĂ©orie de la justice, op. cit., p. 30 et suivantes est la suivante – une situation est Ă©quitable parce qu’elle a Ă©tĂ© choisie dans des conditions Ă©quitables. Cette procĂ©dure aboutit, en fait, Ă  un rĂ©sultat semblable Ă  celui d’un tirage au sort. Ce qui est Ă©vident, c’est qu’ordre naturel ou tirage au sort reviennent au mĂȘme il s’agit d’éviter Ă  tout prix le choix et la discussion, ainsi que la constitution d’un intĂ©rĂȘt commun. Chapitre X. DĂ©senchanter le travail Le terme a Ă©tĂ© popularisĂ© par Weber, qui utilise la formule dĂ©senchantement du monde » Ă  de nombreuses reprises dans son Ɠuvre. Le terme entzaubern, qui signifie dĂ©sensorceler, dĂ©senchanter, briser le charme », Ă©tait utilisĂ© dans le corpus romantique, en particulier par Goethe pour dĂ©signer le rĂ©sultat de l’AufklĂ€rung. Les LumiĂšres, l’utilisation de la raison ont vidĂ© le monde de ses forces magiques et mystĂ©rieuses, ont ĂŽtĂ© la dimension Ă©nigmatique du monde pour le soumettre aux sĂšches catĂ©gories de l’entendement. M. Weber, L’Éthique protestante
, op. cit., p. 117. Voir aussi C. Colliot-ThĂšlĂšne, Max Weber et l’histoire, PUF, coll. Philosophies », 1990, p. 52 et suivantes. Habermas, La crise de l’État-providence », in Écrits politiques, op. cit., p. 110 ; voir aussi C. Offe, Le travail comme catĂ©gorie de la sociologie », art. cit. Le fait de travailler, en lui-mĂȘme, ne peut guĂšre ĂȘtre pris comme point de dĂ©part de la formation de groupes culturels, organisationnels et politiques », et B. Guggenberger, qui, dans Wenn uns die Arbeit ausgeht, op. cit., p. 94, parle d’ anachronistiche ArbeitszentralitĂ€t », c’est-Ă -dire de l’anachronique centralitĂ© du travail ». Il Ă©crit aussi Le travail manque Ă  la sociĂ©tĂ© du travail. » Qu’il s’agisse de Nietzsche, de Weber, de Freud, de Hannah Arendt, de Benjamin, de Bloch, de Habermas, de Hans Jonas, mais aussi de Heidegger. L’école de Francfort, au carrefour des hĂ©ritages marxistes, freudiens et heideggeriens, avait tentĂ© de donner Ă  la philosophie une telle ambition celle d’ĂȘtre une philosophie sociale, appuyĂ©e sur des Ă©tudes sociologiques et statistiques et capable de dĂ©boucher sur une pratique. Voir en particulier GĂ©nĂ©alogie de la morale. Pour comprendre l’entreprise gĂ©nĂ©alogique qui caractĂ©rise la pensĂ©e de Nietzsche, voir, de J. Granier, Le ProblĂšme de la vĂ©ritĂ© dans la philosophie de Nietzsche, op. cit., en particulier les chapitres ii et iii sur les notions de gĂ©nĂ©alogie et de critique. Nous avons l’art pour ne pas mourir de la vĂ©ritĂ© », Ă©crit Nietzsche, qui dĂ©crit l’art comme un voile jetĂ© sur la vĂ©ritĂ©. CrĂ©er, c’est voiler la vĂ©ritĂ© de la nature. L’art est la catĂ©gorie gĂ©nĂ©rale sous laquelle Nietzsche comprend toutes les formes que prend la facultĂ© artiste, la facultĂ© de crĂ©er de l’homme l’art, c’est l’activitĂ© plastique de la volontĂ© de puissance. IdentitĂ© de nature entre le conquĂ©rant, le lĂ©gislateur et l’artiste – la mĂȘme façon de se traduire dans la matiĂšre, la plus extrĂȘme Ă©nergie. [
] Transformer le monde, afin de pouvoir tolĂ©rer d’y vivre, voilĂ  l’instinct moteur », in VolontĂ© de puissance, tome II, livre IV, § 118, citĂ© par J. Granier, Le ProblĂšme de la vĂ©ritĂ© dans la philosophie de Nietzsche, op. cit., p. 524. On lira Ă©galement le Nietzsche de Heidegger, Gallimard, 1980, qui illustre parfaitement ceci. H. Achterhuis, La responsabilitĂ© entre la crainte et l’utopie », in Hans Jonas, Nature et responsabilitĂ©, op. cit., p. 44. Voir aussi, du mĂȘme auteur, La critique du modĂšle industriel comme histoire de la raretĂ© », Revue philosophique de Louvain, 1989, no 81, p. 47-62. Telle est la genĂšse de la civilisation » que prĂ©sentent Nietzsche ou Freud. Certes, nous n’en sommes pas au point oĂč l’ensemble des apprentissages Ă©ducatifs devront ĂȘtre dĂ©terminĂ©s par leur capacitĂ© Ă  rendre les facultĂ©s humaines totalement disponibles pour le systĂšme productif ce qui n’est pas grave, nous rĂ©torquera-t-on, puisque le systĂšme productif est productif de tout, y compris des besoins humains les plus Ă©levĂ©s
 et oĂč les rĂ©sultats issus des recherches en sciences cognitives seront utilisĂ©s Ă  grande Ă©chelle pour rendre cette opĂ©ration la plus rentable possible, mais nous sommes sur la bonne voie
 Voir l’ensemble des travaux rĂ©alisĂ©s par le CNAM au moment de son bicentenaire, en particulier le colloque Changement technique, mondialisation, emploi – oĂč allons-nous ? », 17 et 18 novembre 1994, et, dans celui-ci, le support Ă©crit intitulĂ© Une nouvelle dynamique pour l’emploi », dont l’ambition est le retour au plein emploi. Voir aussi Banque Indosuez, Conjoncture mensuelle, novembre 1994, no 59, Le chĂŽmage idĂ©es fausses et vraie solution ». Ibid. Club de Rome, note d’O. Giarini, Some Considerations on the Future of Work. Redefining Productive Work », OCDE-ScĂ©nario-Emploi, juin 1994. La logique d’un tel dĂ©veloppement, c’est que le temps d’un cadre est infiniment plus prĂ©cieux que le temps d’une personne qui a fait trois ans ou cinq ans de moins d’études, ou dont la qualification est infĂ©rieure. Le cadre prĂ©fĂšre donc consacrer un dixiĂšme ou un vingtiĂšme du salaire qu’il gagne en un mois Ă  payer une personne Ă  disposition chez lui. Les deux temps de ces deux personnes n’ont pas la mĂȘme valeur, et pourtant l’échange est considĂ©rĂ© comme Ă©gal. DĂšs lors, on conçoit que l’investissement initial importe Ă©normĂ©ment. L’éducation apparaĂźt comme un investissement qui rapportera vingt ans plus tard. L’idĂ©e d’une sociĂ©tĂ© de serviteurs, d’une nĂ©odomesticitĂ© a Ă©tĂ© dĂ©veloppĂ©e par A. Gorz Ă  de nombreuses reprises. Elle paraĂźt absolument Ă©vidente, sauf si l’on continue Ă  considĂ©rer que les personnes disposant de moyens financiers font un cadeau aux personnes moins qualifiĂ©es en leur donnant » un travail. M. Godet, Le Grand Mensonge l’emploi est mort, vive l’activitĂ© !, Fixot, 1994. Voir C. Dejours, Entre souffrance et rĂ©appropriation, le sens du travail », art. cit. Il serait vain d’essayer de construire une cohĂ©sion vitale, en tant qu’unitĂ© subjectivement significative, en partant de la sphĂšre du travail. [
] DiscontinuitĂ© dans la biographie de travail et part de temps de travail diminuĂ©e sur l’ensemble de la vie auront probablement pour effet de transformer le travail en fait parmi d’autres et de relativiser sa fonction comme point de repĂšre pour l’identitĂ© personnelle et sociale », C. Offe, Le travail comme catĂ©gorie de la sociologie », art. cit. Expression de Habermas qui se situe dans la droite ligne du La vie est action, non production » d’Aristote, in La Politique, op. cit., livre I, chapitre iv, 1254a. Voir Ă©galement le commentaire de cette expression par G. Markus philosophe de l’école de Budapest, Praxis et poeisis au-delĂ  de la dichotomie », Actuel Marx, no 10, 1991. Les avis sur ce point sont trĂšs partagĂ©s certains soutiennent que le progrĂšs technique va contribuer, au moins dans un premier temps, Ă  supprimer de trĂšs nombreux emplois voir le colloque du CNAM citĂ©, et un numĂ©ro spĂ©cial de Futuribles, consacrĂ© Ă  l’allocation universelle et au partage du travail, no 184, fĂ©vrier 1994, Pour ou contre le revenu minimum, l’allocation universelle, le revenu d’existence ? ». Des industriels affirment que 40 % des emplois seraient en Allemagne susceptibles d’ĂȘtre supprimĂ©s dĂšs aujourd’hui, sans compter les rĂ©serves de productivitĂ© dans les services non marchands ; sur ce dernier point, voir l’article de B. Bruhnes, Le travail rĂ©inventĂ© », in La France au-delĂ  du siĂšcle, L’Aube, DATAR, 1994. B. Guggenberger, Wenn uns die Arbeit ausgeht, op. cit., p. 123. Selon la thĂ©orie Ă©conomique classique, le chĂŽmage doit se rĂ©sorber dans la mesure oĂč les personnes qui se trouvent brutalement dĂ©qualifiĂ©es doivent peu Ă  peu se porter vers les nouveaux secteurs crĂ©ateurs de produits et demandeurs de main-d’Ɠuvre. C’est la thĂšse de Sauvy, dite du dĂ©versement ». Un certain nombre d’études macroĂ©conomiques ont montrĂ© qu’une rĂ©duction du chĂŽmage Ă©tait possible si certaines conditions Ă©taient rĂ©alisĂ©es, comme une lĂ©gĂšre baisse des salaires, un remaniement de l’organisation du travail, le caractĂšre massif de la rĂ©duction. Voir les Ă©tudes de l’OFCE et l’intervention de P. Artus, in actes du colloque Les rĂ©ductions du temps de travail », CGP-DARES, La Documentation française, 1995. Il proposera au contraire une allocation universelle. Actuellement, un certain nombre d’auteurs soutiennent que l’importance de notre chĂŽmage vient de la surprotection qui est accordĂ©e Ă  ceux qui ont un statut protecteur et, d’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, Ă  ceux qui ont un emploi et dont les salaires ont augmentĂ©. Parmi eux, certains ont dĂ©veloppĂ© l’idĂ©e que la diminution des statuts protecteurs accordĂ©s aux salariĂ©s baisse du SMIC, contrats prĂ©caires, petits boulots » trĂšs peu rĂ©munĂ©rĂ©s, qui consisterait en une autre forme de partage dĂ©velopperait une pauvretĂ© Ă  l’amĂ©ricaine, c’est-Ă -dire tout un pan de la population vivant d’expĂ©dients. Dans les deux cas, la sociĂ©tĂ© est fortement segmentĂ©e et dans les deux cas aussi, la possession d’un travail permet de doubler la mise plus le travail est intĂ©ressant, bien payĂ©, responsabilisant, etc., plus la protection et les avantages attachĂ©s sont grands. Sur le nombre de personnes en situation fragile » aujour-d’hui, voir Documents du CERC Centre d’études des revenus et des coĂ»ts, PrĂ©caritĂ© et risque d’exclusion en France, no 109, La Documentation française, troisiĂšme trimestre 1993 Au total, le nombre de personnes y compris conjoints et enfants qui Ă©chappent Ă  la pauvretĂ© ou Ă  la prĂ©caritĂ© grĂące aux diffĂ©rents mĂ©canismes de notre protection sociale est aujourd’hui probablement de l’ordre de 12 Ă  13 millions. » Il faut nĂ©anmoins considĂ©rer ces chiffres avec prĂ©caution, car toute une partie de la fragilitĂ© ainsi mise en Ă©vidence n’est pas mesurĂ©e objectivement, mais ressentie subjectivement. De trĂšs nombreuses analyses ont Ă©tĂ© consacrĂ©es Ă  l’allocation universelle depuis quelques annĂ©es. On pourra en particulier consulter Y. Bresson, L’AprĂšs-salariat, Economica, 1984 ; un numĂ©ro spĂ©cial de la Revue Nouvelle, L’allocation universelle », avril 1985 ; Garantir le revenu, une des solutions Ă  l’exclusion », Transversales Science Culture, mai 1992, no 3 ; Allocation universelle et plein emploi, l’inĂ©luctable alliance », in Ph. Van Parijs, Reflets et perspectives de la vie Ă©conomique, Bruxelles, 1994 ; et Futuribles, op. cit., fĂ©vrier 94, no 184. Dans les annĂ©es 1970, une partie des critiques contre le travail se faisaient du point de vue de la dignitĂ© de l’individu et au nom de celui-ci. Habermas, A. Gorz, Illich imaginaient la libĂ©ration du travail aussi comme un retour Ă  l’individu. Habermas et A. Gorz sont largement revenus sur ce point de vue depuis. Voir les ouvrages de J. Dumazedier, W. Grossin et l’ensemble des rĂ©flexions sur le temps libre en 1980, qui n’ont pas abouti aprĂšs la mise en place Ă©phĂ©mĂšre d’un ministĂšre du mĂȘme nom. B. Guggenberger pose cette question et intitule l’un des chapitres de son livre La paresse des actifs ». Le problĂšme, Ă©crit-il, ce n’est pas l’ennui, c’est notre impatience, notre incapacitĂ© Ă  rester tranquilles. » C’est nous qui traduisons. À combien d’heures doit ĂȘtre fixĂ© le temps de travail de chacun ? Il s’agit d’une question qui a occupĂ© beaucoup d’esprits. M. Johada se demande aussi De combien de travail l’homme a-t-il besoin ? », Braucht das Mensch die Arbeit » [L’homme a-t-il besoin du travail], in F. Niess, Leben Wir um zu arbeiten ? Die Arbeitswelt im Umbruch, Köln, 1984. B. Guggenberger pose la mĂȘme question dans Wenn uns die Arbeit ausgeht, op. cit. Dela division du travail social est une Ɠuvre sociologique et mĂȘme philosophique que Durkheima Ă©crit dans le but de mieux comprendre le procĂ©dĂ© de formation de la sociĂ©tĂ© Ă  partir de l’union ÉnoncĂ©Explication de texte Chaque peuple a sa morale, qui est dĂ©terminĂ©e par les conditions dans lesquelles il vit. On ne peut donc lui en inculquer une autre, si Ă©levĂ©e qu'elle soit, sans le dĂ©sorganiser, et de tels troubles ne peuvent pas ne pas ĂȘtre douloureusement ressentis par les particuliers. Mais la morale de chaque sociĂ©tĂ©, prise en elle-mĂȘme, ne comporte-t-elle pas un dĂ©veloppement indĂ©fini des vertus qu'elle recommande ? Nullement. Agir moralement, c'est faire son devoir, et tout devoir est dĂ©fini. Il est limitĂ© par les autres devoirs on ne peut se donner trop complĂštement Ă  autrui sans s'abandonner soi-mĂȘme ; on ne peut dĂ©velopper Ă  l'excĂšs sa personnalitĂ© sans tomber dans l'Ă©goĂŻsme. D'autre part, l'ensemble de nos devoirs est lui-mĂȘme limitĂ© par les autres exigences de notre nature. S'il est nĂ©cessaire que certaines formes de la conduite soient soumises Ă  cette rĂ©glementation impĂ©rative qui est caractĂ©ristique de la moralitĂ©, il en est d'autres, au contraire, qui y sont naturellement rĂ©fractaires et qui pourtant sont essentielles. La morale ne peut rĂ©genter outre mesure les fonctions industrielles, commerciales, etc., sans les paralyser, et cependant elles sont vitales ; ainsi, considĂ©rer la richesse comme immorale n'est pas une erreur moins funeste que de voir dans la richesse le bien par excellence. Il peut donc y avoir des excĂšs de morale, dont la morale d'ailleurs est la premiĂšre Ă  souffrir ; car, comme elle a pour objet immĂ©diat de rĂ©gler notre vie temporelle, elle ne peut nous en dĂ©tourner sans tarir elle-mĂȘme la matiĂšre Ă  laquelle elle s'applique. ȃmile Durkheim, De la division du travail social 1893
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PierreFAVRE. Professeur de Science politique Ă  l’UniversitĂ© de Clermont-Ferrand (1985) “Histoire dela science politique.” LES CLASSIQUES DES SCIENCES SOCIALESCHICOUTIMI, QUÉBECCHICOUTIMI, QUÉBEC 403 ERROR The Amazon CloudFront distribution is configured to block access from your country. We can't connect to the server for this app or website at this time. There might be too much traffic or a configuration error. Try again later, or contact the app or website owner. If you provide content to customers through CloudFront, you can find steps to troubleshoot and help prevent this error by reviewing the CloudFront documentation. Generated by cloudfront CloudFront Request ID 9n0yeYzDSyC7SCYDVR80_XPBRvlDArblJmaTMGt2oUHpN0__X2Y7Xw==
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Dela division du travail social / Emile Durkheim. Fiche du document. Auteur Émile (1858-1917). Auteur du texte Durkheim Émile (1858-1917). Auteur du texte Durkheim, « De la division du travail social / Emile Durkheim », Monographies imprimĂ©es de Gallica. Partage / Export Par les mĂȘmes auteurs. Sur les mĂȘmes sujets
France mĂ©tropolitaine ‱ Juin 2021Durkheim, De la division du travail socialexplication de texte 4 heures20 pointsIntĂ©rĂȘt du sujet ‱ La morale dĂ©signe un ensemble de rĂšgles communes visant Ă  nous faire bien agir. Mais quand un pays commerce avec un autre, est-ce la morale qui doit guider sa conduite ? Si la poursuite de la richesse ne fait l'objet d'aucun impĂ©ratif moral, si elle peut mĂȘme ĂȘtre moralement condamnĂ©e, un pays doit-il pour autant s'en dĂ©tourner ? Expliquez le texte suivant Chaque peuple a sa morale qui est dĂ©terminĂ©e par les conditions dans lesquelles il vit. On ne peut donc lui en inculquer une autre, si Ă©levĂ©e qu'elle soit, sans le dĂ©sorganiser, et de tels troubles ne peuvent pas ne pas ĂȘtre douloureusement ressentis par les particuliers. Mais la morale de chaque sociĂ©tĂ©, prise en elle-mĂȘme, ne comporte-t-elle pas un dĂ©veloppement indĂ©fini des vertus qu'elle recommande ? Nullement. Agir moralement, c'est faire son devoir, et tout devoir est fini. Il est limitĂ© par les autres devoirs ; on ne peut se donner trop complĂštement Ă  autrui sans s'abandonner soi-mĂȘme ; on ne peut dĂ©velopper Ă  l'excĂšs sa personnalitĂ© sans tomber dans l'Ă©goĂŻsme. D'autre part, l'ensemble de nos devoirs est lui-mĂȘme limitĂ© par les autres exigences de notre nature. S'il est nĂ©cessaire que certaines formes de la conduite soient soumises Ă  cette rĂ©glementation impĂ©rative qui est caractĂ©ristique de la moralitĂ©, il en est d'autres, au contraire, qui y sont naturellement rĂ©fractaires et qui pourtant sont essentielles. La morale ne peut rĂ©genter outre mesure les fonctions industrielles, commerciales, etc., sans les paralyser, et cependant elles sont vitales ; ainsi, considĂ©rer la richesse comme immorale n'est pas une erreur moins funeste que de voir dans la richesse le bien par excellence. Il peut donc y avoir des excĂšs de morale, dont la morale, d'ailleurs, est la premiĂšre Ă  souffrir ; car, comme elle a pour objet immĂ©diat de rĂ©gler notre vie temporelle, elle ne peut nous en dĂ©tourner sans tarir elle-mĂȘme la matiĂšre Ă  laquelle elle s' Durkheim, De la division du travail social, connaissance de la doctrine de l'auteur n'est pas requise. Il faut et il suffit que l'explication rende compte, par la comprĂ©hension prĂ©cise du texte, du problĂšme dont il est question. Les clĂ©s du sujetRepĂ©rer le thĂšme et la thĂšseDans ce texte, Durkheim se demande quel doit ĂȘtre notre rapport Ă  la morale. Faut-il penser la morale comme un discours fait de rĂšgles absolues qui rĂ©giraient tous les aspects de notre vie ?Il dĂ©montre que la morale est avant tout une production humaine qui nous permet de vivre ensemble. Aussi ses rĂšgles doivent-elles ĂȘtre conçues comme relatives, limitĂ©es et circonscrites Ă  certains domaines d' la problĂ©matiqueRepĂ©rer les Ă©tapes de l'argumentationLes titres en couleurs et les indications entre crochets servent Ă  guider la lecture mais ne doivent en aucun cas figurer sur la abordĂ©e] Dans cet extrait de La division du travail social, Durkheim se demande quel doit ĂȘtre notre rapport Ă  la morale. A priori, on pourrait penser que la morale est faite pour rĂ©gler de façon absolue l'ensemble de nos actions il nous faudrait bien agir en toutes circonstances. Mais ne serait-ce pas oublier la vĂ©ritable raison d'ĂȘtre de la morale ? [ThĂšse] Durkheim dĂ©montre ici que la morale est avant tout une production humaine nĂ©cessaire Ă  la vie sociale et donc que ses rĂšgles doivent ĂȘtre Ă  la fois relatives, limitĂ©es et circonscrites Ă  certains domaines d'action. [ProblĂ©matique et annonce du plan] Pour dĂ©montrer cela, Durkheim Ă©tablit d'abord le caractĂšre relatif de la morale une morale est toujours produite par un peuple. De plus, notre obĂ©issance Ă  nos devoirs est elle-mĂȘme relative, puisque ceux-ci se limitent mutuellement. Mais la morale ne doit-elle pas porter sur l'ensemble de nos actions et, en ce sens, n'est-elle pas absolue ? Dans un deuxiĂšme temps, Durkheim montre que la morale doit en rĂ©alitĂ© se limiter Ă  certains domaines une morale qui se donnerait pour absolue ruinerait la vie sociale qu'elle a pourtant pour but de rendre Nos obligations morales sont relativesA. La morale est une production socialeDans un premier temps de sa dĂ©monstration, Durkheim dĂ©montre le caractĂšre nĂ©cessairement relatif des rĂšgles morales. La morale est le discours qui porte sur le domaine de nos actions, le domaine pratique, et entend proposer des principes susceptibles de guider notre conduite en rĂ©pondant aux questions que devons-nous faire ? comment devons-nous nous conduire ? On pourrait penser que ces rĂšgles sont les mĂȘmes pour tous les hommes, ce qu'affirme par exemple la morale religieuse, qui repose sur des commandements universels. Mais Durkheim part d'une observation qui remet en cause cette nĂ©cessitĂ© d'un caractĂšre absolu de la morale chaque peuple a sa morale, qui est dĂ©terminĂ©e par les conditions dans lesquelles il vit ». Autrement dit, chaque morale est avant tout une production sociale et diffĂšre des autres selon le mode de vie et les besoins du peuple qui la produit. Comme l'indique son Ă©tymologie de mores, qui signifie les mƓurs », la morale dĂ©signe avant tout les coutumes, les rĂšgles de vie communes qui valent dans une sociĂ©tĂ© donnĂ©e Ă  une Ă©poque qui est absolu de ab-solutus, qui signifie sĂ©parĂ© de » ne dĂ©pend d'aucune qui est relatif est en relation avec un certain contexte et donc rĂšgles, dit-il, sont celles qui conviennent Ă  ce peuple prĂ©cis aussi ne peut-on imposer une nouvelle morale Ă  un peuple sans dommages, tant collectifs qu'individuels. Dans la mesure oĂč un systĂšme moral naĂźt du besoin particulier de chaque peuple, besoin issu de son environnement et de ses caractĂ©ristiques propres, lui imposer une autre morale serait faire violence Ă  l'individu comme Ă  la sociĂ©tĂ© Ă  laquelle il appartient. Mais si chaque morale est relative Ă  chaque peuple, les impĂ©ratifs moraux ne s'imposent-ils pas de façon absolue Ă  tous les membres de ce peuple ?B. Au sein d'une morale, chaque devoir constitue la limite d'un autreCertes la morale est relative et variable, mais l'individu n'est-il pas absolument tenu d'ĂȘtre vertueux, quel que soit le contexte ? Durkheim formule lui-mĂȘme l'objection, Ă  laquelle il entreprend de rĂ©pondre en mettant en Ă©vidence le caractĂšre limitĂ© de chaque devoir. De fait, la morale sociale nous prescrit un certain nombre de devoirs, c'est-Ă -dire d'obligations morales, et il convient de s'y conformer. Mais, observe Durkheim, la premiĂšre limite posĂ©e Ă  ces obligations rĂ©side en rĂ©alitĂ© dans les autres devoirs propres Ă  cette obligation de ob-ligare, qui signifie lier par contrat » dĂ©signe un devoir, prescrit par une loi Ă  laquelle nous obĂ©issons contrainte dĂ©signe en revanche ce qui fait obstacle Ă  notre s'appuie alors sur deux exemples. Si j'agis conformĂ©ment Ă  l'obligation qui m'est faite d'aider les autres ou de les aimer, ce qui va limiter mon action en ce sens sera l'obligation de ne pas me nĂ©gliger, de ne pas me perdre dans ma conduite altruiste. De la mĂȘme façon, l'obligation que j'ai de m'affirmer, de faire valoir mes dĂ©sirs, va se heurter Ă  l'obligation contraire qui me pousse Ă  ne pas ĂȘtre ces deux exemples, Durkheim met en Ă©vidence l'existence d'une sorte de rĂ©gulation de ma conduite, par le fait que coexistent dans une mĂȘme morale des devoirs qui pourraient entrer en contradiction si je les cultivais excessivement. De fait, si je me dĂ©voue aux autres, j'agis moralement, mais si ce dĂ©vouement me pousse Ă  me nĂ©gliger, Ă  en oublier ma propre vie, alors cette action, entrant en contradiction avec le devoir que j'ai de me soucier de moi-mĂȘme, perdra son caractĂšre moral.[Transition] Mais si nos actions morales sont ainsi rĂ©gulĂ©es, tempĂ©rĂ©es par le fait que nous nous trouvons toujours placĂ©s entre plusieurs devoirs, la morale n'est-elle pas absolue au sens oĂč elle porte sur l'ensemble de nos actions ?2. Nos devoirs se limitent Ă  certains domainesA. La morale ne doit pas rĂ©gir la vie Ă©conomiqueDans un deuxiĂšme temps de sa dĂ©monstration, Durkheim met en Ă©vidence une seconde limite posĂ©e Ă  notre attitude vertueuse. Si la morale propre Ă  notre sociĂ©tĂ© est bien faite de devoirs, notre effort pour nous y conformer ne se heurte pas seulement Ă  notre obligation de respecter les autres devoirs il rencontre Ă©galement un certain nombre d'impĂ©ratifs propres Ă  la vie distingue alors certaines conduites soumises Ă  cette rĂ©glementation impĂ©rative qui est caractĂ©ristique de la moralitĂ© » d'autres qui y seraient naturellement rĂ©fractaires ». Mais quels seraient ces domaines d'action qui devraient par nature Ă©chapper Ă  la morale et dans lesquels mes obligations morales pourraient lĂ©gitimement m'apparaĂźtre secondaires ? L'auteur en donne deux exemples les fonctions industrielles, commerciales » doivent Ă©chapper Ă  la morale puisqu'elles sont des fonctions essentielles », vitales » desquelles dĂ©pend la satisfaction des besoins d'une sociĂ©tĂ©. En d'autres termes, dans ces domaines nĂ©cessaires Ă  la vie d'une sociĂ©tĂ©, ce n'est pas la morale qui doit orienter nos qui est essentiel, c'est ce qui dĂ©finit une chose, ce sans quoi elle ne pourrait pas ĂȘtre contraire, ce qui est accidentel est ce qui ne relĂšve pas de l'essence de cette Les impĂ©ratifs moraux sont limitĂ©s par la nĂ©cessitĂ© vitaleS'agit-il pour autant de dire que quand je fais du commerce, par exemple, il est lĂ©gitime que je me conduise de maniĂšre immorale ? Durkheim prĂ©cise alors son propos en s'appuyant sur l'exemple de la richesse. Dans une perspective morale, il est en effet possible de condamner la richesse. Le dĂ©sir de richesse est ainsi considĂ©rĂ© par Épicure comme un dĂ©sir vide », c'est-Ă -dire un dĂ©sir produit par l'influence sociale et qui, n'existant pas naturellement en l'homme, ne sera source d'aucun plaisir et nous livrera aux souffrances d'une quĂȘte sans noterDans la Lettre Ă  MĂ©nĂ©cĂ©e, Épicure explique que pour accĂ©der au bonheur nous devons nous dĂ©tourner des conduites excessives. Il Ă©tablit que, par essence, le dĂ©sir de richesse est un dĂ©sir sans observe Durkheim, dire que la morale ne doit pas porter sur la fonction commerciale d'une sociĂ©tĂ©, ce n'est pas dire qu'il faille s'adonner sans limite au dĂ©sir de richesse. ConsidĂ©rer la richesse comme immorale n'est pas une erreur moins funeste que de voir dans la richesse le bien par excellence », dit-il, renvoyant dos Ă  dos deux principes d'action contraires selon lesquels il faudrait en toutes circonstances fuir la richesse ou, au contraire, obtenir Ă  tout prix la richesse. De fait, une sociĂ©tĂ© doit se prĂ©occuper de la satisfaction des besoins des individus, elle doit par exemple se livrer au commerce et l'objectif du commerce est bien l'enrichissement. Cette nĂ©cessitĂ© limite donc le domaine d'action de la morale. L'espace du commerce n'est pas exemptĂ© de toute morale, ce qui y prĂ©vaut n'est pas le vice cependant, nos devoirs se trouvent, en ce domaine, limitĂ©s et lĂ  encore rĂ©gulĂ©s par la nĂ©cessitĂ© Le but de la morale est de faciliter la vie socialeDurkheim conclut sa dĂ©monstration en prĂ©cisant le but de la morale elle a pour objet immĂ©diat de rĂ©gler notre vie temporelle ». En d'autres termes, la raison d'ĂȘtre de la morale n'est pas la vie spirituelle mais la vie temporelle, c'est-Ă -dire que la morale est faite pour rĂ©pondre au mieux Ă  nos intĂ©rĂȘts, Ă  nos besoins fait, nous sommes des ĂȘtres sociaux, notre nature rĂ©clame une organisation sociale, mais nous sommes aussi immĂ©diatement guidĂ©s par la recherche de notre satisfaction individuelle, ce qui produit des heurts. Pour qu'une vie sociale soit possible, il est nĂ©cessaire non seulement d'Ă©tablir des lois juridiques, mais aussi une morale qui saura limiter la poursuite individuelle de nos intĂ©rĂȘts par une intĂ©riorisation de nos devoirs. Dans Le Malaise dans la culture, Freud souligne ainsi la nĂ©cessitĂ© des impĂ©ratifs moraux, par exemple du devoir d'aimer les autres, en expliquant que sa justification vĂ©ritable est prĂ©cisĂ©ment que rien n'est plus contraire Ă  la nature humaine primitive », fondamentalement Durkheim nous met-il en garde contre les excĂšs de morale », c'est-Ă -dire contre une façon de se rapporter aux devoirs moraux sans tenir compte des limites que reprĂ©sentent les autres impĂ©ratifs moraux, mais aussi les impĂ©ratifs vitaux pour la sociĂ©tĂ©. Tout envisager dans une perspective morale, c'est oublier que la morale est un discours qui porte sur nos actions et dont le but premier est de nous aider Ă  vivre dĂ©finitive, non seulement la morale est relative, mais nos obligations morales sont limitĂ©es et ne doivent nous guider que dans certains domaines. Indispensable Ă  la vie sociale, la morale doit rester conforme Ă  son but, qui est de rĂ©frĂ©ner l'aspiration individuelle Ă  satisfaire exclusivement ses intĂ©rĂȘts, afin de rendre possible la coopĂ©ration. Ainsi, une morale qui prĂ©tendrait imposer des obligations absolues et valoir dans tous les domaines de la vie entrerait finalement en contradiction avec sa raison d'ĂȘtre.
Si l'intĂ©rĂȘt rapproche les hommes, ce n'est jamais que pour quelques instants ; il ne peut crĂ©er entre eux qu'un lien extĂ©rieur. Dans le fait de l'Ă©change, les divers agents restent en dehors les uns des autres, et l'opĂ©ration terminĂ©e, chacun se retrouve et se reprend tout entier. Les consciences ne sont que superficiellement en contact ; ni elles ne se pĂ©nĂštrent, ni elles n Ce sujet de bac philo 2021 porte sur l'explication d’un texte d’Émile Durkheim extrait De la division du travail social. Les rĂ©ponses des enseignants en ligne de Prof Express. Notion du programme en jeu Le devoir. Superheroes, Superlatives & present perfect - Niveau BrevetComment former et utiliser les superlatifs associĂ©s au present perfect en anglais ? Voir l'exercice Condition et hypothĂšse en anglaisQuelle est la diffĂ©rence entre "whether" et "if "? Voir l'exercice Durkheim La division du travail social (1893) mĂȘme lĂ  oĂč la sociĂ©tĂ© repose le plus com­plĂštement sur la division du travail, elle ne se rĂ©sout pas en une poussiĂšre d'atomes juxtaposĂ©s, entre lesquels il ne peut s'Ă©tablir que des contacts extĂ©rieurs et passagers. Mais les membres en sont unis par des liens qui s'Ă©tendent bien au
363 pages ; 23 cm"De la division du travail social a été écrit en 1893 par Émile Durkheim, sociologue français, considéré comme le père fondateur de la sociologie française. Cet ouvrage, issu de son travail de thèse, est encore aujourd'hui une référence dans le champ de la sociologie. À l'origine de ce livre, une inquiétude - qui parcourra l'ensemble de l'Ɠuvre de Durkheim - sur la cohésion sociale dans nos sociétés modernes en cette période d'industrialisation et d'urbanisation. Durkheim constate, fin xixe siècle, que les individus sont de plus en plus différenciés, que les consciences individuelles s'autonomisent de façon croissante. Comment, dans ce contexte de montée de l'individualisme, la cohésion sociale peut-elle être préservée ?"-Résumé de l'éditeur"Essai"Comprend des références bibliographiques
Dela division du travail social correspond Ă  la thĂšse princi­pale de Durkheim qui avait pour sous-titre Étude sur l’organisa-tion des sociĂ©tĂ©s supĂ©rieures. Elle fut soutenue le 3 mars 1893 Ă  la FacultĂ© des Lettres de Bordeaux. Cette thĂšse est fondamen­tale pour trois raisons. Il s’agit tout d’abord du premier livre de Durkheim dans lequel il tente de fonder la sociologie. L

Durkheim dans ce texte nous expose deux sortes de solidaritĂ© positive, l'une qui dĂ©rive des similitudes, l'autre de la division du travail. Il distingue par la suite deux types de solidaritĂ© sociale. L’une mĂ©canique dans laquelle les individus sont semblables et partagent la mĂȘme conscience commune sans spĂ©cialisation des tĂąches et l’autre organique dans laquelle les tĂąches sont diffĂ©renciĂ©es et dans laquelle le corps social va se diviser en sous-groupes spĂ©cialisĂ©s. C'est cette diffĂ©renciation qui permet l'individualisation. Dans une telle sociĂ©tĂ© l'individu existe en tant que source autonome de pensĂ©e et d'action donc tous ne partagent plus les mĂȘmes croyances. Dans un deuxiĂšme temps l’auteur nous expose les progrĂšs de la division du travail qui ont deux causes. Tout d’abord l'accroissement de la densitĂ© morale de la sociĂ©tĂ©, symbolisĂ© par l'accroissement de la densitĂ© matĂ©rielle et l'accroissement du volume des sociĂ©tĂ©s. Durkheim fait Ă©galement rĂ©fĂ©rence Ă  la thĂ©orie de M. Spencer, d'aprĂšs laquelle l'accroissement de volume n'agirait qu'en multipliant les diffĂ©rences individuelles. Il aborde Ă©galement le fait que l'accroissement de volume et de densitĂ© dĂ©termine mĂ©caniquement les progrĂšs de la division du travail. Pour Durkheim, la division du travail ne se produit donc qu'au sein des sociĂ©tĂ©s constituĂ©es. Licence Chacun des Ă©lĂ©ments constituant le site sont protĂ©gĂ©s par le droit d'auteur. Il est donc strictement interdit d'utiliser, reproduire ou reprĂ©senter mĂȘme partiellement, modifier, adapter, traduire, ou distribuer l'un quelconque des Ă©lĂ©ments. En cochant la case ci-dessous, j'accepte les conditions gĂ©nĂ©rales d'utilisation de Accepter le terme et la condition Connectez-vous pour tĂ©lĂ©charger Connexion

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